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Le Capharnaüm Éclairé
29 juin 2016

"Marionnettes humaines" de Robert Heinlein

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L'histoire : L'invasion a commencé en 2007 - sans que personne ne le sache. Les extraterrestres ont atterri en divers points stratégiques de l'Amérique du Nord, puis ils ont pris la tête des services de communications, du Gouvernement, de l'industrie. Personne n'a été capable d'endiguer cette invasion. Car les extraterrestres ont le pouvoir de contrôler les esprits. Seul Sam Cavanaugh, agent surentraîné œuvrant pour un des services secrets les plus puissants des Etats-Unis, peut encore stopper les envahisseurs. A condition d'accepter d'en payer le prix...

La critique de Mr K : Retour à l'âge d'or SF aujourd'hui avec un roman de Robert Heinlein, auteur culte chez les afficionados du genre mais qui m'avait quelque peu déçu avec son Étoiles, garde à vous que j'avais trouvé creux et décevant au regard de la virevoltante et thrash adaptation cinématographique de Verhoeven. Ayant apprécié son Histoire du futur dans mon adolescence, je ne pouvais rester sur ce goût de déception et à la faveur d'un chinage fructueux, je tombai sur cette histoire d'invasion extra-terrestre lorgnant clairement vers le cultissime b-movie L'Invasion des profanateurs. Au final, du rythme, une lecture rapide mais un sous-texte parfois nauséabond et vieillissant. Y a comme un malaise...

Écrit en 1951, Marionnettes humaines décrit l'année 2007 comme celle du grand remplacement. Pas celui, imaginé par quelques esprits complotistes dérangés à la mode sur le web mais une invasion de parasites extra-terrestres prenant possession des corps et des esprits. Ils transforment ainsi les humains en marionnettes entièrement téléguidées. Dotés d'une intelligence collectiviste (gare au communisme les gars !) et d'une capacité de reproduction par mitose très rapide, l'heure est grave. Heureusement la Section (organisme de renseignement US extrêmement secret) veille et Sam, leur meilleur agent va tout faire pour contrer le plan des aliens belliqueux. Y'a du coup pied au cul qui se perd, moi j'vous le dis !

Amusant de lire une histoire qui est censée s'être déroulée il y a 9 ans à travers le prisme d'une époque révolue : la Guerre froide ! Le rideau de fer n'est pas tombé et nombreux sont les clichés débités par les protagoniste américains du livre : les rouges sont encore l'objet de tous les fantasmes et peurs cristallisés par la bipolarisation du monde et cela donne de bons moments de comique involontaire. Malgré des avancées technologiques certaines et éparpillées discrètement au fil des pages (notamment en terme de médecine et de moyens de transport), il se dégage un charme désuet et une peinture plutôt rétro du monde. Ça agacera certains sans doute, perso j'ai adhéré. Sans doute la nostalgie a joué, je repensais durant ma lecture à la découverte de vieux illustrés de SF des années 60 que j'avais découvert par hasard dans une malle étant gamin...

J'ai aussi aimé tout ce qui appartient au domaine du background lié à l'invasion elle-même. Les phases de découverte et de réactions sont très bien menées, Heinlein excelle à décrire le sentiment de persécution, de paranoïa dans les foules face à un événement qu'on ne peut expliquer et qui semble inarrêtable. Prises de position du président, lois d'exceptions adoptées par nécessité et complètement ubuesques quand on pense au puritanisme ambiant aux USA à l'époque de l'écriture (l'injonction Tous à poil n'a jamais été aussi sérieuse que dans ce récit !) émaillent des péripéties nombreuses sous un rythme qui ne se ralentit jamais, accroche le lecteur et l'invite à suivre le combat à mener. Franchement, ça se lit vite, le style épuré et direct rend l'angle action / réaction très réussi. Mais cela ne suffit pas à faire un bon livre...

La déception apparaît assez rapidement. En effet, malgré des atours séduisants, les personnages ne restent que de vulgaires caricatures et s'avèrent peu ou pas du tout attachants. Je ferai une exception pour le chef de la Section qui aime souffler le chaud et le froid, manipule son petit monde et m'a électrisé par son sang froid et son cynisme. Par contre, que dire du héros qui s'avère être un ersatz de James Bond le charme en moins : misogyne, mélange improbable de bourrin de base et de romantique qui s'ignore (ces passages précis sont d'un ridicule sans nom). Il m'a littéralement ulcéré et ses réflexions sur la gente féminine sont vraiment abjectes. Pas de retournement de situation dans ce domaine ni de second degré à attendre. Heinlein, pour lui donner un pendant, lui adjoint Mary qui apparaît tout d'abord comme une super espionne, sexy et sûre d'elle. Mais laissez le charme opérer et elle ne devient qu'un faire-valoir tout bon qu'à pondre des marmots. A gerber ! Vous l'avez compris, on se croirait dans la série Mad men... mais après tout le livre date du début des années 50. Rajoutez à cela, un éloge final à la pugnacité et la violence du genre humain pour se faire respecter dans toute la galaxie et vous obtenez une morale douteuse et à mon sens fortement dérangeante. J'ai du mal à y voir encore une fois l'excuse du cynisme pensé et réfléchi pour dénoncer le va t'en guerre et l'impérialisme.

Je dois avouer que ce parti pris passéiste m'a agacé assez vite et même si j'ai lu Marionnettes humaines rapidement (2 jours et demi), il me reste un goût amer dans la bouche, celui de la déception. Finalement Heinlein n'est pas si incontournable que cela. Je lui donnerai une ultime chance avec un autre titre se trouvant dans ma PAL mais il va falloir qu'il assure car en deux lectures récentes (à un an intervalle tout de même), il est redescendu dans mon estime. Mais que voulez-vous, il y a des œuvres intemporelles et d'autres que les outrages du temps et l'évolution des mœurs égratignent...

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