"Angel, l'Indien blanc" de François Place
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L’histoire : Corvadoro s’effaça brusquement devant moi en plongeant le buste. Je ne l'avais jamais vu faire ce drôle de geste. "Cela s'appelle une révérence, m'expliqua-t-il. Ne vous méprenez pas, Angel, ce n'est pas devant vous que je m'incline, c'est devant votre destin ! Lorsqu'on rencontre quelqu'un dont la chance sort autant de l'ordinaire, il ne faut pas se refuser le plaisir de la saluer au passage, vous ne croyez pas ?
La critique de Mr K : Place à l’aventure aujourd’hui avec cette lecture délectable à souhait qui m’a replongé dans mes premiers souvenirs de lecture, quand je découvrais Stevenson, Verne ou encore Wells dans mes premières grandes expériences de lecture. Angel, l’Indien blanc de François Place est un court roman prenant à souhait, qui ne laisse aucun répit au lecteur littéralement prisonnier de ces pages.
Angel est métis, fruit du viol de sa mère lorsque celle-ci a été enlevé par une tribu indienne venue piller la demeure d’un riche colon blanc exploitant leurs terres immémoriales. Vendu comme esclave, il est séparé d’elle très jeune et doit vivre sous le joug d’un maître cruel. L’occasion va se présenter pour qu’il s’enfuit et qu’il rejoigne comme passager clandestin, un navire parti à la découverte de nouvelles terres australes. Très vite repéré, le capitaine le garde à son service comme matelot. Le récit débute vraiment alors et fait la part belle à la vie à bord, un genre que j’affectionne tout particulièrement.
Arrivé à destination, un groupuscule doit explorer ces territoires vierges ou presque. Ils vont faire la connaissance d’une tribu primitive parmi laquelle vont devoir séjourner, suite à un concours de circonstances, Angel et Corvadoro, un scientifique féru de sociologie et de découvertes. Les autres membres d’équipage sont sensés venir les chercher mais la venue d’un hiver précoce et glacial va bloquer le navire dans la glace et obliger l’équipage à survivre dans des conditions extrêmes. On suit en parallèle ces deux arcs narratifs qui finiront, vous l’imaginez bien, par se rejoindre.
J’ai vraiment retrouvé les sensations de mon enfance lorsque je lisais des récits d’aventure en mer, d’exploration. Adapté à un lectorat jeune et sans trop d’expérience, cet ouvrage n’est pas pour autant simpliste et léger. L’auteur n’alourdit jamais son propos, va à l’essentiel mais pour autant l’immersion est totale. On se croirait vraiment à bord avec ses fortunes de mer, les rapports hiérarchiques, le quotidien rude mais aussi enthousiasmant pour Angel qui découvre la vie et qui il est vraiment.
Les personnages sont tous très bien croqués. Bien sûr, on est dans l’archétype classique de ce type de roman, on n’est jamais vraiment surpris par leur développement par exemple, mais ça fait le job et même rudement bien. C’est réaliste, souvent bien pensé et la rencontre avec les autochtones va révéler bien des choses à commencer par Angel et le chemin qu’il va choisir de suivre et non celui qu'on lui a imposé jusque là. Cet aspect initiatique sans être au cœur de la trame est bien troussé et agréable à lire.
Le background est quant à lui bien distillé, sans en faire trop mais suffisamment pour s’imaginer l’époque et les lieux. Les descriptions sont courtes mais suffisantes et efficaces. De la vie d’esclave à celui d‘homme d’équipage, les coutumes des populations australes, la vie des phoques et leur interaction avec les humains, les croyances et espérances de chacun… tout se mélange parfaitement et propose un voyage passionnant de bout en bout.
L’ouvrage se lit d’une traite avec un plaisir renouvelé, François Place s’y entend pour tenir ses lecteurs en haleine et proposer un récit vif et profond à la fois. Une belle expérience que je vous invite à entreprendre au plus vite.