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Le Capharnaüm Éclairé
3 juillet 2022

"Après la rafle, une histoire vraie" d'Arnaud Delalande et Laurent Bidot

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L’histoire : Jo Weismann, un destin : l'un des derniers rescapés de la rafle du Vel' d'Hiv Le 16 juillet 1942, les autorités de Vichy procèdent à une rafle de familles juives parisiennes. Joseph et les siens sont conduits au Vélodrome d'Hiver, puis en wagons à bestiaux jusque dans le camp de transit de Beaune-la-Rolande. Transit... Vers où ? Un matin, on arrache à Jo ses parents et ses deux soeurs, qui sont déportés à Auschwitz. À Beaune-la-Rolande, une autre guerre a commencé : celle d'un enfant de 11 ans perdu dans un camp d'orphelins.

Joseph est jeune, mais il sent, comprend. Il monte un plan d'évasion avec un autre enfant : Joseph Kogan. Ensemble, ils se glissent sous 15 mètres de barbelés qu'ils "détricotent" à mains nues, durant 6 heures d'affilée. Une fois extirpés des barbelés, ils courront pour leur liberté, dans un monde devenu cauchemar. Ils se retrouveront des années après leur évasion, pour tenter de mettre du baume sur leurs souvenirs...

Depuis, Joseph Weismann, 90 ans aujourd'hui, participe à des conférences, des colloques, des débats, des films. Et il raconte. Sa guerre à lui ne s'est jamais vraiment achevée. Mais nous sommes tous les héritiers de sa douleur et de ses espérances.

La critique de Mr K : Très bel ouvrage qu’Après la rafle, une histoire vraie d’Arnaud Delalande et Laurent Bidot avec la collaboration précieuse de Joseph Weismann dont c’est l’histoire qui est racontée ici. Après un livre, un film que beaucoup d’entre vous ont du voir (La rafle de Rose Bosch), c’est en BD que son témoignage est adapté, l’idée étant d’élargir un peu plus le public qu’il veut toucher pour que plus personne n’accepte l’inacceptable comme il le répète inlassablement au cours de ses interventions.

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Le témoignage est terrible. Un jeune garçon se retrouve plongé au plein cœur du drame de la Seconde Guerre mondiale, lorsque le 16 juillet 1942 les policiers français viennent chez lui pour l’arrêter lui et sa famille. Juifs donc ciblés par les restrictions, les tracasseries administratives puis des mesures plus sévères encore, la famille va se voir séparée puis détruite avec l’envoi dans les camps d’extermination des parents et des deux sœurs de Joseph (alias Jo). Ce dernier va réussir à s’évader en compagnie d’un ami du cap de Beaune-la-Rolande et commencé à essayer de se reconstruire une fois la guerre terminée...

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La première partie de la bande dessinée reprend exactement la même trame que le film. On s’immerge dans cette famille parisienne qui vit chichement mais heureuse d’être ensemble. Quelques planches suffisent pour se faire une idée de l’harmonie et l’amour qui règne dans leur foyer. Le choc est donc d’autant plus grand quand les forces de l’ordre viennent les chercher. Les Weismann avaient confiance en la France, s’étaient fait enregistrés comme juifs, avaient porté l’étoile jaune... pour au final être enlevés et assassinés. On rentre alors dans la phase de la répression, de la séparation aussi. Jo se retrouve vite seul et va devoir apprendre à se débrouiller.

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Désespéré mais pas sans volonté, il va trouver l’énergie pour s’en sortir. À commencer par le camp où il est enfermé avec d’autres enfants. Puis, ce sera le temps des placements en familles, avec des rencontres parfois rudes. La population française s’est révélée très divisée face au sort réservé aux juifs mais avec un mélange de chance, de culot et de hasards heureux, le petit Jo sortira vivant du conflit et va pouvoir continuer sa vie malgré tout. Cette partie de son existence est passionnante car méconnue par celui qui comme moi n’a vu que le film. Cela en dit long sur les errances administratives qu’ont subi un certain nombre d’apatrides, les réticences de la France à régulariser Jo montrent bien l’hypocrisie du système et sa propension à l’injustice. En filigrane du récit, on apprend au fil du déroulé que Jo et son ami se sont revus après la guerre, l’occasion pour eux de mettre du baume sur leurs blessures qui ne se refermeront jamais.

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En terme historique, c’est parfait. Rien à redire sur la contextualisation générale avec des planches consacrées notamment au départ à la politique menée par l’État français dirigé par le Maréchal Pétain qui éclairent sans alourdir le récit. Mais les auteurs par le biais de certaines cases rendent compte aussi des attitudes contradictoires des français face au sort des juifs. Certains ferment leur fenêtres, d’autres les donnent et parfois un gendarme peut laisser la porte de votre cellule ouverte pour que vous puissiez vous évader au petit matin... La reconstitution en terme de décors, vêtements, véhicules est bluffante, l’immersion totale.

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Face à un tel témoignage, on ne peut rester de marbre. Les émotions nous sautent à la gorge et l’on éprouve un panel très varié de sentiments, de l’amour à la colère, en passant par la peur et l’espoir. Remarquablement mis en mot, en image, voila un ouvrage à lire absolument, une pépite indispensable au Devoir de mémoire qu’il est bon de soutenir encore et encore face notamment aux pseudos intellectuels médiatiques qui monopolisent certaines chaînes et assènent sans honte des propos révisionnistes.

Gros gros coup de cœur donc que je vous invite à découvrir au plus vite si ce n’est déjà fait.

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T
Une exposition sur la rafle du Vél' d'Hiv' est en cours au Mémorial de la Shoah à Paris, jusqu'au 7 novembre 2022. Elle est organisée autour de 15 dessins de Cabu, qui lui avaient été commandés en 1967 à l'occasion de la sortie du livre La rafle du Vél' d'Hiv de Clade Levy et Paul Tillard.
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