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Le Capharnaüm Éclairé
16 juillet 2015

"American Gods" de Neil Gaiman

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L'histoire: Dans le vol qui l'emmène à l'enterrement de sa femme tant aimée, Ombre rencontre Voyageur, un intrigant personnage. Dieu antique, comme le suggèrent ses énigmes, fou, ou bien simple arnaqueur? Et en quoi consiste réellement le travail qu'il lui propose? En acceptant finalement d'entrer à son service, Ombre va se retrouver plongé au sein d'un conflit qui le dépasse : celui qui oppose héros mythologiques de l'ancien monde et nouvelles idoles profanes de l'Amérique. Mais comment savoir qui tire réellement les ficelles : ces entités légendaires saxonnes issues de l'aube des temps, ou les puissances du consumérisme et de la technologie? A moins que ce ne soit ce mystérieux M. Monde...

La critique de Mr K: Il s'agit de ma première lecture de Neil Gaiman plutôt reconnu dans la blogosphère et le reste du monde réel. Nelfe a déjà eu l'occasion de le pratiquer à deux reprises avec un Neverwhere qu'elle avait trouvé plutôt moyen et un Coraline qu'elle avait adoré (je me suis contenté du film au cinoche et je l'avais trouvé dément). American Gods est le fruit d'une rencontre impromptu chez Emmaüs (une fois de plus!) et il est auréolé de multiples récompenses comme les prix Hugo et Nebula en 2002. La quatrième de couverture ayant ouvert en moi des gouffres de perplexité, je sautai le pas et m'en portai acquéreur.

Ombre sort de prison après un braquage qui a mal tourné. En trois ans, il a eu le temps de réfléchir, il veut se ranger et retrouver sa femme qu'il aime plus que tout. Tout s'écroule quand on lui annonce la mort de son aimée. Sur le vol qui le ramène chez lui, il croise la route du Voyageur, un être énigmatique qui se révèle être bien plus qu'une simple rencontre de passage. De fil en aiguille, Ombre va voir son destin attaché à ce personnage qui va l'emmener bien plus loin que n'importe quel mortel avant lui. Oui, le Voyageur est un Dieu pluri-millénaire mais que lui veut-il? Et qui sont ces mystérieuses personnes en costume et véhicules noirs qui les suivent?

C'est à un sacré voyage que l'auteur nous convie avec cet ouvrage. Il y a tout d'abord Ombre, un ex taulard en quête de rédemption qui enchaîne les déconvenues en début de roman et qui va devoir trouver un nouveau sens à son existence. Je me suis attaché quasi immédiatement à ce personnage plutôt classique mais qui permet de donner un repère solide au lecteur par rapport au background et à l'évolution du récit. Il est à mes yeux le personnage le plus réussi du roman, complexe et en perpétuelle remise en question, on le retrouve là où parfois on ne l'attend pas, sa traversée de l'Amérique apporte un regard intéressant car différent sur le monde qui l'entoure. Rien ne lui est épargné et pourtant il semble naviguer à vue, sans excès, de manière neutre comme s'il se fichait un peu de la tournure des événements. Ce côté stoïque et détaché m'a beaucoup plu.

Cela détonne par rapport à l'univers développé par Gaiman. On croise une multitude de divinités anciennes ramenées par les émigrés lors de leur traversée de l'Atlantique ou du Pacifique. Mais elles ont tendance à mourir (oui, les Dieux meurent aussi) à cause de l'oubli, ne devant leur existence qu'à la croyance que l'on porte en eux. Ce champs du crépuscule est joué par toute une nouvelle génération de dieux issus de l'évolution technologique du monde, de jeunes ambitieux qui ne rêvent que d'une chose: supplanter leurs glorieux aînés. La bataille approche et tout le monde se range en ordre de bataille. Manipulations, faux-semblants, retournements de situations mais aussi quelques moments de paix attendent notre héros brinquebalé entre volontés divines et son existence en miette. La trame est dense, très dense même, on peut juste reprocher une fin plutôt convenue alors que l'on attendait quelque chose de plus explosif, de plus inventif.

Pour autant, ne boudons pas notre plaisir, au-delà de l'histoire à proprement parler, ce livre est aussi l'occasion pour Gaiman de nous décrire les États-Unis, de parcourir ce grand pays et les différentes réalités qui l'ont construit et le constitue encore aujourd'hui. Les métropoles toutes puissantes, la toute puissance financière, la percée des nouvelles technologies et leur influence sur la conduite de nos vies et du monde, son passé douloureux (le génocide amérindien, le racisme envers les nouveaux arrivants, un magnifique passage sur l'esclavagisme à la fois dur et évocateur comme jamais), ses petites communautés repliées sur elles-même (le passage du héros à Lakeside est parmi mes préférés du roman)… Livre-somme, American Gods flatte l'intellect et l'imagination, présente un melting pot de références et connaissances assez hallucinant qui donne le vertige et impressionne par leur concomitance. C'est surtout à ce niveau là que l'on prend vraiment une claque avec ce roman, ce qui justifie pleinement la moisson de récompenses qu'il a pu recueillir.

Bien que foisonnant dans son contenu, ce livre se lit facilement en grande partie grâce à l'écriture de Gaiman qui est accessible et simple. C'est d'ailleurs ce dernier point qui m'empêche de le classer dans la catégorie des chefs d’œuvre absolus. On retrouve un sens du rythme certain mais la qualité littéraire n'est pas assez poussée. On passe cependant un moment étourdissant et bluffant qui me fait dire que je retournerai sans doute faire un tour dans la bibliographie de cet auteur.

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Commentaires
N
Je l'ai terminé il y a peu et je suis un peu mitigé pas aussi dithyrambique que beaucoup. L'idée de départ est excellente et très casse-gueule. Gaiman s'en tire très bien mais au prix de simplifications ou d'omissions sur les tenants et aboutissants de cet univers. De plus, on a l'impression qu'on va vers un roman épique (Guerre entre Dieux) et cela est plus intime (mais très bien trouvé). C'est un peu déceptif quand même. J'ai adoré la chute malgré tout.
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A
Il y a un an, j'avais entamé la lecture de ce roman et entre temps, j'ai dû la stopper car ai eu à déménager et ai eu quelques fièvres qui ne me permettaient pas de suivre au mieux l'intrigue qui malgré son accessibilité par la fluidité de la plume de GAIMAN reste assez complexe. Il faut savoir suivre le personnage et aller à la rencontre des autres personnages, divins ou non, en plus de passer d'un moment à l'autre, d'un Monde à l'autre. <br /> <br /> Par la suite, je reprendrai probablement la lecture de ce roman mais depuis, j'avoue m'être orientée vers d'autres lectures et en ce moment, celles qui m'occupent sont certes assez simples mais adaptées à la période... <br /> <br /> Merci pour ton avis Mr K. <br /> <br /> <br /> <br /> Passez, Nelfe et toi, de bonnes vacances ! ;) :)
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E
Pareil, je le croise sans arrêt mais j'avais lu que son style était parfois un peu trop simple mais les histoires très fortes. Le chant du crépuscule des dieux ? Je le note et tu as raison, je regardais chez Emmaüs au rayon SF / Fantasy la prochaine fois !
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Z
Je n'ai encore jamais lu cet auteur tant vanté, il faudrait que je m'y mette... peut-être bien avec celui-ci que j'ai dans ma PAL !
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D
Lecture très imagée, un peu complexe mais quand on saisit le sens de tout ça on se rend comme que oui, c'est réellement un chef d'oeuvre !
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F
Je l'ai lu il y a un bail (avant mon blog :)) et j'avais beaucoup aimé. C'était le premier Gaiman que je lisais et il m'avait agréablement surprise. Bryan Fuller va adapter le livre en série pour la chaîne Starz, ça devrait être diffusé fin 2016. J'ai hâte de voir ce que cela donnera.
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