"Cascade" de Craig Davidson

L'histoire : Non loin de Niagara Falls, une jeune femme s'enfonce dans une forêt enneigée, son bébé dans les bras, après un terrible accident de voiture ; un basketteur prodige hanté par son passé sort de prison ; un ancien pompier se lance à la poursuite d'un dangereux pyromane ; deux jumeaux détenus dans un établissement pénitentiaire pour mineurs se confrontent à leur tragique différence...

La critique Nelfesque : Sept nouvelles. Sept expériences viscérales et organiques. Noirceur, désespoir, solitude, différence, peurs... Avec une précision chirurgicale, Craig Davidson dissèque, détaille jusque dans les moindres recoins, l'âme humaine et les obsessions de ses personnages. Brillant !

Voilà le mot est lancé. Ni plus ni moins. Chaque nouvelle de ce recueil est passionnante, non pas tant par les thèmes qu'elle aborde que par le style de l'auteur qui nous prend dans ses filets et ne nous relâche (ou plutôt ne nous recrache) qu'à la toute dernière ligne. Quel point commun peut-il y avoir entre un ancien soldat, un basketteur, une mère de famille, un pompier reconverti, un jeune adolescent, une assistante sociale, un être hyper-sensible, un pédiatre, une strip-teaseuse, une junkie, un avocat, une mère de famille, une infirmière... ? Peut-on trouver un point commun à chaque être vivant sur terre ? Chacun étant différent, il est facile de balayer la question d'un simple non et pourtant fondamentalement il existe et se trouve dans ces pages.

"Cascade" est un condensé de tout ce qui fait la fragilité de l'être humain, de ces existences à la fois anonymes et singulières qui vont arriver à un point de rupture, basculer, dans l'indifférence générale au milieu d'un grand tout mais bouleversant leur propre vie. Le lecteur est embarqué dans un flot d'informations, saturé dans tous les sens, Craig Davidson caractérisant à fond ses personnages et leur milieu, pris de vertige. On ne sait jamais où cela va nous mener mais c'est à la fois avec peur au ventre et avidité que l'on avance vers l’abîme. La première nouvelle de ce recueil "Les lumières fantômes" en est l'exemple parfait. Le ton est donné... et ça va faire mal au plus profond de nous-même car il y a un peu de chacun d'entre nous dans les personnages qui peuplent ce recueil.

"Cascade" aborde les thèmes de la maternité, de la culpabilité, de l'amour quel qu'il soit, de la loyauté, de l'ambition, de l'espoir. Tout n'est pas tout noir, tout n'est pas tout blanc. Pas de manichéisme ici, pas de clichés, un savant mélange de dualité et de paradoxes qui font de nous ce que nous sommes. "Cascade" a parfois résonné en moins de manière très violente. "A moitié solide" fut une grande claque alors que je ne suis pas foncièrement passionnée par le monde du bras de fer. Tout ici m'a parlé, j'ai adoré le personnage de bout en bout, son humour, sa dérision mais aussi son sang froid, sa droiture. Et la fin m'a mis une boule dans la gorge comme jamais. En 30 pages, je suis passée par toutes les émotions. Une prouesse technique, un talent pur de l'auteur.

On pourrait revenir sur chaque nouvelle de ce recueil mais mon conseil serait de s'y plonger sans trop savoir de quoi il en retourne, sans trop en attendre. Ce que j'ai fait. Comme on plonge dans la vie en quelque sorte. Une belle métaphore qui résume tout. Lisez-le !