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Le Capharnaüm Éclairé
8 avril 2024

"Les mains au feu" de Virginie Armano

 

L’histoire : François a seize ans. Ni courageux ni endurant, sans ambition ni vocation, il flotte dans la vie, observe ce qui lui arrive et les gens qui l’entourent avec distance, légèreté et drôlerie.
Sur décision de son père, lassé de son peu d’entrain pour les études, François devient apprenti coiffeur dans un salon pour dames. Il y compte les heures, dans un état semi-végétatif. Jusqu’à l’arrivée de Gabriel. Charismatique, ambitieux et instinctif, le jeune homme attire et hypnotise. François a enfin trouvé son modèle, son frère, son héros. Mais peut-on à ce point idolâtrer sans risquer de se perdre ?

 

La critique de Mr K : Aujourd’hui, je vais vous parler d’un premier roman. Ça a toujours une saveur particulière de lire le premier ouvrage de quelqu’un. De suite, c’est la couverture qui m’a attiré, je la trouve irrésistible et le résumé à l'arrière a fini de me convaincre. Les mains au feu de Virginie Armano se lit vite et bien, on accroche direct et il est impossible de relâcher le livre avant le mot fin. Seul bémol, un épilogue qui vient doucher l’enthousiaste constant qui m’a habité lors de cette lecture.

 

François est un adolescent lambda. Perdu, sans réel objectif, il vit sa vie de manière désincarnée comme beaucoup de jeunes de son âge. Apathique, feignant, volontiers cynique à l’occasion, il ne brille guère à la maison comme au lycée. D’ailleurs y aller semble être une perte de temps et un jour le paternel décide de le placer en apprentissage chez maman qui est coiffeuse de son état et possède son affaire. Voilà notre héros obligé de passer le balai à longueur de journée et d’apprendre à shampouiner les cheveux de toutes les vieilles du quartier. Pas de quoi faire rêver si ce n’est que François semble détenir un étrange pouvoir entre les mains, pouvoir auquel une cliente ne semble pas insensible…

 

Un beau jour, Gabriel fait une entrée fracassante dans la vie de François. 22 ans, une gueule d’ange et une gouaille imparable. Son charisme ébranle François qui très vite tombe sous le charme. C’est la rupture avec son passé médiocre, Gabriel le met en avant, le persuade que ses mains ont un don et les voila qui s’installent dans une maison à l’écart de la ville pour prodiguer soins et accompagnement aux personnes en détresse. François en est persuadé, il se réalise enfin, il a trouvé sa voie… Mais plus la lecture avance, plus on se rend compte que Gabriel loin d’être un simple ami, se révèle être un prédateur, un manipulateur de premier ordre à qui il ne faut pas s’opposer.

 

Ce roman est avant tout un très beau portrait d’un ado qui se cherche. Sa psychologie et celle de ses proches est très poussée, réaliste et donne à voir les travers auxquels on peut succomber quand on est déboussolé, jeune et pas sûr de soi. François, on l’apprécie et on s’en méfie en même temps. Il est touchant et agaçant, complètement à l’ouest mais pétri d’idéaux qu'il ne sait pas encore inatteignables. Il faut dire qu’il n’est pas aidé par son père hyper rigide et une maman effacée. Heureusement qu’il peut compter sur mamie (Simone, prénommée comme la mienne) pour le soutenir et l’inspirer, même s’il s’en éloigne au fur et à mesure que l’emprise de Gabriel se fait de plus en plus forte. Le glissement est bien mené et même si à de nombreuses reprises on se dit que François est trop bête, c’est crédible et flippant à la fois.

 

Avec un sens du rythme indéniable et une belle plume, l’auteure nous invite à suivre la mue de François qui pense échapper à une captivité (son existence, l’école, ses parents) pour tomber dans une autre (Gabriel encore et toujours). Le rapport de dominant à dominé est très bien rendu, l’évolution très progressive du personnage principal est bluffante et l’on se demande bien où tout cela va finir. L’association entre François et Gabriel prend de plus en plus d’importance, les implications aussi et le crash final n’en prend que plus de force. J’aurais arrêté le livre à 5 pages de la fin, sur un élément brutal mais pur et totalement assumé.

 

Malheureusement, l’auteure se sent obligée de nous projeter dans un futur plus lointain où tout se passe pour le mieux pour François et un autre personnage. L’effet s’est révélé à mes yeux totalement artificiel, brisant une tension et une énergie terrible pour sombrer dans un happy end guimauve même si des incertitudes demeurent. Aaaaarg ! J’avoue être rentré dans une rage folle car jusque là tout était parfaitement agencé, dosé. Dommage vraiment...

 

Malgré cette ultime déception, la lecture fut rapide, addictive, Les mains au feu vaut le détour pour son évocation de l’adolescence, des choix qui bouleversent une vie, de la fragilité de l’être humain, sa propension parfois à se voiler la face aussi et une écriture séduisante et vive. On n'était pas loin du "perfect".

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