"Comme un coq en plâtre" de Sylvie Granotier
L’histoire : Un chien susceptible, un garagiste irascible, des clodos refroidis. Qui se méfierait d'une petite coiffeuse, boucles platine, nylon rose et talons aiguilles ? Quand son quartier se met à puer le rance et le roussi, Cheryl met ses mains au bout de ses bras, et c'est le grand ménage de printemps. Poussez pas. Y'en aura pour tout le monde. Des shampouineuses échauffées, un cyclope amoureux, un dealer pété et un Poulpe emplâtré, dans le 3ème arrondissement, opportun aux assassins.
La critique de Mr K : Retour dans l’univers poulpesque aujourd’hui avec Comme un coq en plâtre de Sylvie Granotier dans une enquête menée en grande partie cette fois-ci par Chéryl, la douce shampouineuse que l’on croise très souvent dans les aventures de Gabriel aka Le Poulpe. On passe encore un bon moment avec une galerie de personnages croustillants, les passages obligés dans le repère du poulpe et dans le salon de coiffure de la belle et une plongée bien sombre dans les bas-fonds de Paris à la rencontre de personnes peu recommandables.
Comme vous avez pu le deviner en lisant le résumé de l’histoire, l’enquête porte sur la disparition de SDF que l’on retrouve refroidis. Rien de bien nouveau malheureusement surtout en plein hiver, l’affaire va attirer le poulpe car avec ses entrées à la morgue et en interrogeant la médecin légiste chargée des autopsies des deux quidams, il s’avère que les trépassés sont morts chacun d’une overdose d’insuline alors qu’ils ne sont même pas diabétiques ! Qui sème ces cadavres ? Gabriel tique et s’il n’avait pas glissé sur une crotte de chien posée là par un clébard quelque peu mélancolique, c’est lui qui aurait mené les investigations. C’est Chéryl qui s’y colle tout en devant s’occuper de son salon, de son mec diminué (et c’est chiant un mec malade, j’en suis l’exemple parfait). Mais elle a de la ressource et entre tracas perso et professionnels, elle va fourrer son nez là où il faut et frôler bien des fois les ennuis.
Comme dans beaucoup romans de la série, l’enquête n’est pas l’aspect primordial du livre. Il n’y a pas de réels rebondissements et l’on suit l’affaire de loin, sans trop vraiment se préoccuper du résultat. Il tombera rassurez-vous mais l’intérêt est ailleurs. À commencer par les personnages que l’on croise qui ne sont pas piqués des vers avec Léon le chien du bar du Poulpe qui déprime et va causer comme je le disais plus haut un accident fatal à Gabriel, un garagiste exploiteur de sans-papiers qui s’avère plus nuancé que cela, une petite vieille qui recueille les SDF chez elle pour les aider le temps d’une semaine, des coiffeuses folles dingues qui proposent des coupes plus qu’approximatives lorgnant vers l’art contemporain (un moment hilarant de cette lecture)… et puis les relations tellement vives et mouvantes entre Chéryl et son poulpe de mec.
On rit beaucoup, on se délecte des belles formules de Sylvie Granotier qui manie la langue à merveille et touche parfois au sublime avec des scènes dantesques et des références à peine voilées à San Antonio dans ses grandes années. Les punchlines se multiplient, les dialogues sont gouleyants à souhait et les pages se tournent toutes seules. Lecture délassante, fun et engagée à sa manière par les thèmes qu’elle aborde, on passe un très bon moment.
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