"Le café où vivent les souvenirs" de Toshikazu Kawaguchi
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L’histoire : Sur le flanc du mont Hakodate, au nord du Japon, le café Dona Dona est réputé pour sa vue imprenable sur le port de la ville. Mais surtout, comme au café Funiculi Funicula, à Tokyo, il est possible pour ses clients d'y vivre une expérience extraordinaire : voyager dans le passé, le temps d'une tasse de café.
On y rencontre Yayoi, une jeune fille qui en veut à ses parents défunts d'avoir fait d'elle une orpheline ; Todoroki, un comédien qui se languit de son épouse et de leurs rêves communs ; Reiko, submergée par la disparition de sa soeur ; Reiji, qui réalise trop tard à quel point il aime son amie d'enfance... Autant d'âmes sincères et émouvantes qui, en retrouvant un pan de leur passé, apprennent à regarder le présent autrement et à envisager l'avenir avec plus de sérénité.
La critique de Mr K: J’avais vu passer pas mal d’articles et de post Instagram sur Toshikazu Kawaguchi depuis quelques temps. C’est un auteur très apprécié et jusqu’à ma lecture de son dernier arrivé en France Le café où vivent les souvenirs, je n’avais jamais franchi le pas. J’ai bien fait tant cette lecture s’est révélée prenante et apaisante malgré parfois des sujets graves. C’est ce que j’aime avec la littérature japonaise, elle apporte toujours un éclairage différent sur des sujets existentiels sans pour autant tomber dans le cliché ou l’exagération. Tout est exactement à sa place, au bon moment comme s’il y avait une certaine forme d’harmonie dans l’agencement du monde. C’est typiquement le genre de lecture qui fait du bien par les temps qui courent.
Le café Dona Dona est un lieu qui au prime abord n’a rien d’exceptionnel si ce n’est sa très belle vue donnant sur le port. Et pourtant, si vous vous asseyez à la bonne place, que vous suivez quelques commandements et que vous êtes servi par la bonne personne, vous aurez la possibilité de voyager dans le passé, le temps de la dégustation d’un café. L’ouvrage va nous faire suivre l’expérience menée par quelques personnes tourmentées d’une manière ou d’une autre. C’est aussi l’occasion de croiser des figures récurrentes et les employés de ce café pas comme les autres. Les histoires se mêlent, se complètent et donnent à lire un bon condensé des affres de la vie humaine entre joies et peines.
On est directement happé par la lecture, hypnotisé par une écriture subtile qui fait la part belle aux échanges verbaux. En soi, le style est très différent de ce que j’ai l’habitude de lire en provenance de l’archipel nippon à commencer par l’indépassable Haruki Murakami ou son homonyme Ryu. Plus simple d’accès je trouve mais néanmoins profond dans la caractérisation de ses personnages et très rythmé de par les multiples conversations qui nous y sont relatées, on se sent un peu comme chez soi dans ce café et on aimerait bien s’y asseoir un temps pour observer ce qui s’y passe en vrai.
Tous les personnages sont attachants, on apprend à les connaître, à les aimer, les interroger aussi par rapports aux vides qui parfois les habitent ou les torturent. La perte d’un être cher qui nous rend inconsolable, la quête de l’amour qui parfois peut se révéler bien plus proche qu’on ne le pensait, le poids de décisions passées qui nous font porter un fardeau qui nous tue à petit feu, le rêve impossible que l’on poursuit sans regarder ce qui nous entoure et bien d’autres thématiques sont abordées dans cet ouvrage malin dans sa construction et qui va vraiment au fond des choses, de manière directe et instinctive presque parfois. Que j’ai aimé me laisser mené par le bout du nez et suivre les mouvements pendulaires des habitués, les gestes du quotidien des employés et leurs discussions à bâtons rompus !
L’aspect fantastique mis en avant dans la quatrième de couverture est traité avec une rare élégance, une économie de mot louable qui rend le phénomène crédible et emprunt d’une certaine mélancolie. On tourne vite les pages avec un certain serrement au cœur, en se demandant bien vers où l’auteur nous emmène nous et le personnage. Tout n’est pas rose loin s’en faut et certaines scénettes, révélations, mettent à mal les protagonistes et l’on apprend parfois de bien tristes nouvelles. Mais la vie est ainsi faite et ce roman en est le digne reflet. Merci à l’auteur de nous le rappeler et de nous le faire vivre par procuration à travers son écrit.
Beau, léger, enivrant, Le café où vivent les souvenirs est une vraie lecture doudou qui apporte réconfort, sagesse et apaisement. Un petit bijou que vous seriez bien inspirés de découvrir à votre tour.