"Petit traité de taxidermie" de Maja Thrane
L’histoire : Le récit du quotidien de Björn et Vera, un jeune couple de néoruraux habitant dans une maison au coeur de la campagne, anciennement occupée par un intendant taxidermiste du muséum d'histoire naturelle de Göteborg.
La critique de Mr K : Je vous invite à découvrir aujourd’hui un objet livresque non identifié à la poésie étrange et au propos alambiqué avec le Petit traité de taxidermie de Maja Thrane. On aime ou on déteste. Perso, j'appartiens à la première équipe !
Ce très court roman d’une centaine de pages réunit des moments de vie qui se sont déroulés dans une demeure perdue au fond de la campagne suédoise profonde. On partage ainsi des parcelles d’existences notamment celles de Björn et Véra, deux citadins venus chercher une forme de paix dans un lieu isolé, leurs amis, leurs voisins et l’on croise très régulièrement un zoologiste / taxidermiste qui a réellement existé et a habité la maison (August Wilhelm Malm 1821-1882).
Divisé en très courts chapitres, de quelques lignes à deux pages maximum, l’auteure nous invite à laisser notre sens logique au vestiaire, à plonger directement dans sa matière poétique et à nous laisser porter par son verbe. C’est assez déroutant, on ne sait jamais vraiment où l’on va, quel est le but et parfois les symboles cachés derrière cette lecture... mais finalement, on s’en fiche un peu, l’essentiel est ailleurs. Dans le bonheur de lire une langue splendide, magnifiquement traduite (sacré boulot je pense, même si je ne suis pas un spécialiste), une écriture qui s’adresse à l’âme, belle, musicale et âpre à la fois.
On saisit cependant bien quelques thématiques qui reviennent, des interrogations éternelles et propres à notre espèce : la notion d’existence, de sa permanence et de sa fin ; notre rapport à la nature (avec de très belles évocations) et notre propension à la transformer selon nos envies (chapitre Nature et Culture du programme de philosophie de nos années de Terminales -sic-), le lien passé / présent qui nous construit et nous enrichit, la science et les croyances plus ésotériques... Par petites touches, des allusions souvent fugaces, l’ensemble porte en lui une puissance évocatrice certaine et engendre une succession d’émotions diverses et porteuses de sens.
J’ai bien conscience que cette chronique ne livre pas beaucoup d'éléments sur le contenu mais c’est typiquement le genre de livre qu’on doit découvrir seul, on y apporte ce qu’on veut et on en retire chacun je pense quelque chose de différent car ici on ne rationalise pas, on expérimente, on ressent. Un livre vraiment différent au charme étrange et puissant. À la croisée des genres et des styles.