"Du bruit dans la nuit" de Linwood Barclay
L’histoire : Paul Davis n'est que l'ombre de lui-même : huit mois plus tôt, ce professeur de littérature à l'existence sans relief a vu un assassin transporter des cadavres de femmes dans le coffre de sa voiture. Depuis, Paul subit les assauts d'un violent syndrome de stress post-traumatique. Comment se libérer de cette nuit d'horreur ?
Pour l'aider, son épouse l'encourage à coucher sur le papier les pensées qui le rongent et lui offre, pour ce faire, une vieille machine à écrire. Mais bientôt, aux images cauchemardesques de ses nuits viennent s'ajouter des bruits étranges, le tac tac tac frénétique des touches d'un clavier. Et plus inquiétants encore sont les messages cryptiques, tapés par la machine, que Paul découvre au petit matin.
Somnambulisme ? Machination ? Démence ? A moins que les victimes du tueur ne s'adressent à lui pour réclamer vengeance ? Avec le soutien d'Anna White, sa charmante psychiatre, Paul s'enfonce dans les méandres d'une enquête aux soubresauts meurtriers...
La critique de Mr K : Retour aujourd’hui sur ma lecture de Du bruit dans la nuit de Linwood Barclay, un auteur de thriller canadien que j’aime beaucoup et sait y faire pour maintenir le suspens. Cet ouvrage m’a laissé plutôt circonspect au départ car j’avais l’impression de tout deviner au fil des révélations et puis finalement, l’auteur a réussi à me cueillir en avançant d’ultimes pions que je n’avais pas vu venir. Si ça c’est pas la preuve qu’on a affaire à un bon thriller...
Paul est professeur de littérature dans une université où il dispense sa passion des livres et notamment des œuvres dites "grand public" auxquelles il prête de belles qualités. Un soir alors qu’il rentre chez lui, il aperçoit une voiture devant lui qui fait des embardées et reconnaît le véhicule de son mentor, professeur de sciences dans la même institution. Quelle n’est pas sa surprise quand l’ayant suivi puis approché lorsque ce dernier s’est arrêté sur le bord de la route de découvrir qu’il cherche à se débarrasser de deux cadavres de femmes égorgées ! Le temps de réaliser cela, l’assassin lui assène un terrible coup de pelle le laissant inconscient... Quand il se réveille le lendemain, son collègue a été arrêté, il sera ensuite condamné à une longue peine de prison.
L’action reprend après ce prologue huit mois plus tard. Paul, un homme plutôt discret et pas des plus sûrs de lui au départ est dans une mauvaise passe. Malgré une femme aimante qui a eu très peur pour lui suite à cet "accident" et qui depuis est aux petits soins pour lui, il sombre peu à peu dans la dépression et subit de plein fouet un violent stress post-traumatique avec notamment des cauchemars particulièrement éprouvants où il revit la fameuse scène où Kenneth (le tueur) apparaît régulièrement et le menace dans des flashs d’une horreur totale, fruit d’un inconscient qui travaille et mouline au maximum. Pour l’aider, sa femme lui offre une vieille machine à écrire pour qu’il écrive ses souvenirs et pensées qui lui viennent tout en continuant ses séances avec sa psychiatre. Loin de l’aider, ce don va devenir une vraie malédiction car figurez-vous que la machine tape des messages dans la nuit sans que personne ne soit derrière le clavier ! Paul déjà fragilisé s’enfonce dans l’obsession et la terreur avec des messages semblant venir d’outre-tombe adressés par les victimes non apaisées du tueur. Aïe aïe aïe...
Cette lecture a été très addictive immédiatement comme souvent avec cet auteur. Personnages bien troussés et multiples, ils révèlent leurs complexités petit à petit pour le plus grand plaisir du lecteur. Paul, sa femme, le meilleur pote toujours là en cas de coup dur, la psychiatre à la pratique professionnelle faillible par moment, le père de cette dernière atteint de sénilité, un patient plus qu’indélicat, une ex épouse soupçonneuse sur la santé mentale de Paul et pléthore de personnages secondaires s’entremêlent dans les pages de ce roman à tiroir où l’on soupçonne quasiment tout le monde à tour de rôle. Pour ma part, j’ai deviné assez vite ce qui se cachait derrière la trame principale et je dois avouer que je partais du coup sur une certaine déception. Quand on est un vieux briscard de la lecture, il est souvent difficile d’être surpris et clairement je ne m’attendais pas à la fin qui est venue retourner un certain nombre de certitudes après un événement assez fort intervenant au deux tiers du roman. Peu d’auteurs se permettent ce type de péripétie pour leur personnage principal et rien que pour ça ce thriller psychologique est une réussite car il emprunte alors des sentiers plus mystérieux et les révélations finissent par pleuvoir sans qu’on s’y attende.
À la manière d’un puzzle, les pièces nous sont livrées dans le désordre et même si le fil principal peut paraître faible pour les experts du thriller, le jeu en vaut la chandelle car sans qu’on le sache Linwood Barclay a déjà semé les indices qui vont permettre de densifier le récit et lui faire emprunter une route secrète bienvenue et franchement réussie. Certains personnages très peu esquissés ou abordés au détour d’une phrase ou d’un paragraphe vont s’avérer cruciaux pour la résolution finale, tout s’imbrique parfaitement comme un savant travail de construction entre minutie et liens secrets. C’est brillamment exécuté et c’est le sourire aux lèvres qu’on referme l’ouvrage.
Comme d’habitude avec Linwood Barclay, c’est très bien écrit. À la fois simple et efficace, il ne fait jamais l’économie de la caractérisation de ses personnages qui malgré quelques aspects caricaturaux fascinent et engagent le lecteur vers la voie de l’empathie. Ça se lit tout seul avec un plaisir renouvelé et franchement en tant qu’amateur de suspens je ne suis pas resté sur ma faim. Un beau titre que je vous invite à découvrir si vous êtes amateur du genre et des histoires tortueuses à souhait. Vous ne serez pas déçus !
Déjà lus et chroniqués du même auteur au Capharnaüm éclairé :
- Cette nuit-là
- Crains le pire
- Les Voisins d'à côté