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Le Capharnaüm Éclairé
6 mai 2020

"Violent cases" de Neil Gaiman et Dave McKean

L’histoire : Ce comic est le premier produit par le duo formé par le scénariste Neil Gaiman et le dessinateur Dave McKean. Dans ce récit onirique, sombre mais magnifique, Gaiman se met en scène lui-même et, s'adressant directement au lecteur, évoque ses souvenirs d'enfances. Il se souvient de sa rencontre avec un vieillard qui se révèle avoir été l'ostéopathe d'Al Capone.

 

La critique de Mr K : Très beau roman graphique que celui découvert en plein confinement courant avril. C’est une première pour moi que de lire une œuvre de Neil Gaiman où il n’est que scénariste, je suis un grand amateur de l’écrivain et je savais qu’il avait emprunté cette voie sans jamais l’avoir moi-même explorée. C’est désormais chose faite avec Violent cases, le premier titre d’une série de comics où il s’associe avec le talentueux dessinateur Dave McKean.

 

L’œuvre se présente comme l’évocation de souvenirs d’enfance de Neil Gaiman, souvenirs relativement glaçants où la figure paternelle impose le respect (et la peur) et où suite à un accident domestique (une altercation violente avec son géniteur en l’occurrence), le jeune garçon est envoyé chez l’ostéopathe pour réparer un traumatisme à l’épaule. Un lien se crée entre le vieil homme et le jeune, des confidences s’échangent et c’est la découverte pour le jeune garçon de l’univers sombre et décadent du grand banditisme à travers les brides de récits autobiographiques que lui livre le praticien.

 

1

 

Il faut se laisser porter par l’histoire, les dessins car ici toutes les clefs ne sont pas remises dès le départ au lecteur. Les auteurs manipulent avec soin l’art de l’ellipse, les éléments narratifs se répondent les uns aux autres sans pour autant que l’on sache précisément où l’on veut nous mener. On explore l’univers mental du jeune garçon progressivement avec en ligne de mire et repère central, un père aimé mais aussi craint. Le petit héros se livre peu mais écoute et observe. Cela prend tout son sens lors des rencontres avec le médecin qui vont exacerber sa curiosité, celle qu’éprouvent beaucoup d’enfants face aux interdits, aux choses que l’on redoute mais que l’on veut quand même connaître. C’est aussi ainsi que l’on se forge sa propre identité, il y a d’ailleurs un parallèle très intéressant entre cette jeune âme en pleine construction, le vieil homme qui se livre partiellement et qui laisse entr'apercevoir une vie riche et tumultueuse. Clairement, la thématique de l’identité est au cœur du récit.

 

2

 

Plus en retrait au départ puis davantage développée par la suite, les auteurs s’attardent sur la fascination du jeune sur les gangsters et leurs pratiques. Il y a les apparences avec des hommes portant le chapeau, de beaux costumes taillés sur mesure se déplaçant dans de belles voitures. Peu à peu, l’image se fissure avec des récits de flambées de violences qui vont marquer le garçon et le confronter à ses premières images mentales violentes. Là encore, on n’est pas dans le voyeurisme, ces éléments choquants s’intègrent parfaitement dans le processus global du développement du jeune garçon.

 

3

 

Il y a de la grâce dans ce récit pourtant crépusculaire dans son contenu et sa forme. Les dessins sont magnifiques avec une variation quasi monochromatique autour du bleu, gris, brun qui donne un cachet esthétique certain à une œuvre toute en nuances. Très découpée en terme de cases, la forme souligne le fond, transcende les répliques et les émotions que véhicule le récit. Il y a une réelle complémentarité entre l’écriture volontairement lacunaire et onirique de Gaiman et le trait de crayon de McKean.

 

Cette lecture est donc une belle expérience qui conjugue à la fois récit intimiste et une puissance évocatrice qui désarçonne et séduit à la fois le lecteur. Avis aux amateurs !

 

Lus et chroniqués de Neil Gaïman au Capharnaüm Éclairé :
- "De bons présages" (en collaboration avec Terry Pratchett)
- "Stardust"
- "American gods"
- "Anansi boys"
- "Coraline"
- "Neverwhere"

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