"Le Signe du singe" de Bruno Gauscher
L’histoire : D’habitude je ne parle pas aux canards. Mais à vrai dire ce n’est pas moi qui ai commencé. C’est le canard – enfin le canard de la bouée en forme de canard, celui qui était près de moi à la plage. Je vous explique. J’étais allongé sur ma serviette, en train de bronzer, j’ai fait un petit somme et quand je me suis réveillé des gens s’étaient installés juste sur ma droite. Il y avait un grand parasol, plusieurs serviettes, des sacs, des pelles et un seau, et là à quelques centimètres de moi la bouée-canard, vous voyez la bouée standard avec sa couleur bien jaune, le bec orange et les deux grands yeux ronds dessinés façon BD, noirs sur fond blanc...
La critique de Mr K : Chronique d’une lecture singulière aujourd’hui avec Le Signe du singe de Bruno Gauscher, un recueil se composant de 41 micro-récits ne dépassant pas chacun les quatre à six pages. Peut-on pour autant parler de nouvelles ? Rien n’est moins sûr tant les écrits proposés ici s’en détachent, bousculent les codes établis et proposent des textes aussi incisifs que nébuleux lorgnant parfois vers les exercices de style chers à Queneau.
Pas de résumé vraiment possible pour vous décrire le contenu des textes, ceux-ci sont très variés et n’ont pas de réel lien entre eux. Sachez simplement que l’on y rencontre à chaque fois un personnage à qui le quotidien réserve quelque chose dans le déroulé de la journée ou une réflexion que l’on peut se faire face à un événement ou une interaction sociale. Oui, je sais, c’est vague mais je ne peux vraiment pas faire mieux. Il est ici question de l’humain dans toute sa complexité et tous les aspects de nos vies sont abordés : amour / haine, vie et mort, jeunesse et vieillesse, routine et moments exceptionnels, et bien d’autres situations sont au rendez-vous dans cet ouvrage bien souvent malicieux où les textes défilent rapidement.
En toute honnêteté, tout n’est pas à garder à mes yeux dans ce recueil, des histoires font mouche (une grande majorité), d’autres m’ont laissé totalement froid. Question de contenu, de thématique abordée aussi, il faut reconnaître par contre que le style est toujours impeccable et la langue se révèle vraiment inventive. On passe d’un ton à un autre en toute liberté et parfois avec fracas, la finesse d‘écriture permet à notre auteur de proposer un large spectre d’émotions et d’expériences humaines avec une économie de mot vraiment poussée à son paroxysme (bon, je vous l’accorde c’est tout de même plus long que des haïkus).
Facile d’accès, l’ouvrage propose finalement une belle réflexion sur nous autres homo sapiens, chacun y trouvera d’ailleurs un peu ce qu’il veut avec quelques textes à l’interprétation libre virant à la métaphysique sur certaines séquences. Un livre vraiment à part, qui ne plaira pas à tout le monde tant sa forme peut désarçonner mais une fois qu’on a pris le pli, il est presque impossible de s’en échapper. Avis aux amateurs !