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Le Capharnaüm Éclairé
29 septembre 2015

"L'Arrière-monde" de Pierre Gripari

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L'histoire: On ne fait pas ce qu'on veut dans l'imaginaire. Chaque monde parallèle a ses lois qui, pour être inconnues, n'en sont pas moins précises. Si vous croyez y pouvoir fuir la tyrannie que vous reprochez aux lois du monde réel, vous vous trompez. Il ne s'agit ni d'invention, ni d'évasion, mais d'expérience! Le monde réel est une croûte, une surface à crever, c'est vrai. Mais une fois crevée cette surface, la vérité, l'erreur, la surprise et l'effort gardent tout leur sens…

La critique de Mr K: Les Contes de la rue Mouffetard ont bercé mon enfance. Quand j'y pense, une douce nostalgie m'envahit en me remémorant ces historiettes décalées que j'ai lu et relu en leur temps (m'est avis d'ailleurs que je remettrai bien la main dessus pour les relire encore! Aie ma PAL!). C'est le hasard une fois de plus qui me mit sur la route de ce recueil de treize nouvelles destinées cette fois ci à un public adulte. Un post nostalgique sur la blogosphère m'y fit penser et je décidai d'entreprendre cette lecture.

Gripari dans son recueil L'Arrière-monde verse dans la SF et l'absurde. On y croise nombre de personnages étranges et autres créatures improbables: une limace à l'appétit gargantuesque créée de toute pièce par un savant fou, un fabricant de rêve qui en obtenant une promotion se voit confier la mission de créer un cauchemar, un robot femelle au grand cœur qui vient au secours de deux amoureux, une bonne-sœur mariée au Bon Dieu dans tous les sens du terme, un personnage qui raconte sa propre histoire (beau challenge narratif!), un compte rendu d'exploration spatio-temporelle de notre planète par cinq espions extra-terrestres, une interview déjantée du Père-Noël, le récit d'une prostituée racontant une histoire à la Benjamin Button, des extra-terrestres qui colonisent la Terre sans désir de la changer, un homme qui fait transplanter son cerveau dans un corps robotique, deux personnages dotés du don d'ubiquité (dans une nouvelle rédigée sous forme théâtrale), une bonne témoignant pour son maître-vampire et Dieu lui-même qui apparaît à tous dans une ultime nouvelle aussi divine que pessimiste.

C'est autant de petites histoires qui au-delà de ce qu'elles racontent nous font réfléchir à des sujets plus graves qu'il n'y paraît. Daté de 1969, en filigrane il y a des notions qui aujourd'hui n'ont plus lieu d'être, notamment la Guerre Froide qui transparaît dans 4 / 5 nouvelles. La lutte des deux blocs faisant rage, l'auteur l'utilise notamment dans ses nouvelles prospectives où il imagine le futur de notre Planète bleue. À ce petit jeu, la critique est acerbe et nul n'est épargné que ce soit les capitalistes libéraux américains ou les soviets collectivistes de l'est. Il flotte donc un petit parfum désuet sur certaines histoires qui n'est pas pour me déplaire et flatte nos connaissances de cette époque pas si lointaine et qui influence encore aujourd'hui la géopolitique mondiale (notamment l'interventionnisme forcené de Poutine en Ukraine au hasard…).

Il y a aussi dans ces nouvelles des réflexions sur l'humain en lui-même: sa capacité de nuisance notamment que l'on retrouve condamnée avec finesse au détour des histoires qui nous sont ici proposées avec parfois des êtres artificiels ou d'autres venus de l'espace bien plus sages que nous autres Homo Sapiens Violens. Beaucoup d'interrogations aussi sur Dieu et la foi, le rapport qu'entretiennent les hommes avec leurs croyances. Gripari était un athéiste forcené et il ne se prive pas pour livrer sur deux nouvelles un avis rigolard et décomplexé sur le sujet. Rafraîchissant sans pour autant tomber dans la charge anticléricale aveugle!

Ce livre se lit aisément et avec intérêt. Le style Gripari reste le même: accessible et limpide. On retrouve un sens du rythme rapide et efficace, des changements de ton parfois déconcertant (j'adore cela dans une lecture!) et un univers farfelu vraiment prenant avec ici des saillies connotées sexuellement qui se destine comme dit précédemment principalement vers les adultes. Ces nouvelles réservent beaucoup de surprises et malgré quelques fins de récit parfois "faciles", on ressort de cette lecture enthousiaste et heureux. Une belle expérience pour un trip "revival" de plus.

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Commentaires
V
J'aime beaucoup Gripari mais je ne connaissais pas du tout celui-là, ça a l'air vachement bien. A voir !
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Z
OK, je sais pas comment je vais le trouver celui-ci mais direction ma PàL. Merci !
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