Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le Capharnaüm Éclairé
13 mai 2015

"L'Été des pas perdus" de Rachel Hausfater

L'histoire : Il ne se souvient de rien. Enfin... c'est pas tout à fait vrai. Il se souvient de loin. D'avant, il se souvient bien.

 

Madeleine a un grand-père dont elle est très proche. Mais depuis quelque temps, il change, il oublie les choses ; pour lui, passé et présent se confondent. Le temps d'un été, Madeleine et lui vont cheminer ensemble.

 

La critique de Mr K : Attention grande lecture avec cet Été des pas perdus qui sort justement aujourd'hui dans toutes les bonnes librairies. L'auteur, Rachel Hausfater est une auteure française spécialisée dans le livre jeunesse, elle exerce aussi comme professeur de français à Bobigny. Le sujet abordé ici est grave et touchant à la fois: la maladie d'Alzeihmer et ses répercussions sur le malade et ses proches. Sortez vos mouchoirs, un drame se joue dans ce récit entre nostalgie et confrontation intergénérationnelle.

 

Madeleine passe l'été chez son grand-père à Paris. Elle nous dit que son père n'en a rien à faire d'elle préférant ses nouvelles conquêtes à la chair de sa chair. La mère n'est pas mieux et très absente. Heureusement, elle a son grand-père qui s 'occupe d'elle comme personne d'autre et qui comble l'affection qui lui fait défaut chez ses géniteurs. Pourtant, une ombre plane : Grégoire commence à avoir des trous de mémoire, à mélanger le passé et le présent... La jeune fille qui inconsciemment craint de perdre le seul être qu'elle adore (les copines non merci) ne comprend pas, s'agace de certaines situations, s'amuse d'autres... mais la réalité est bel et bien là, son grand-père est malade. Elle va se raccrocher avec lui à ses souvenirs de jeunes garçons et entreprendre un ultime voyage dans une Normandie fantasmée par elle et résurgente dans l'esprit de Grégoire à travers les souvenirs d'une époque révolue. Elle reviendra changée de ce voyage quasi initiatique.

 

J'ai été touché d'un bout à l'autre, le cœur au bord des lèvres, la larme au coin de l’œil. Écrit à la première personne, ce roman traduit le regard incrédule et vif d'une adolescente qui doit faire face à l'éventualité de la mort de son grand-père. C'est donc à travers un langage simple, sans chichi et brut de décoffrage qu'on rentre dans son quotidien où elle partage son temps entre son grand-père bienveillant et aimant, et Grégoire le petit garçon normand qui a perdu jeune, sa grande sœur adorée. Peu à peu, elle se rend compte qu'elle va devoir rentrer dans le jeu du vieil homme pour éviter de le perturber et pour qu'il puisse se raccrocher à une amarre sûre et rassurante. En effet, madeleine porte le prénom de cette sœur disparue et va endosser son rôle. Ensemble, la petite fille et son aïeul décident (lors d'un moment de lucidité de Grégoire) de partir dans la Normandie natale du vieil homme. Ce sera l'occasion pour celui-ci de transmettre ses souvenirs pour ne pas qu'ils s'effacent, garder la trace d'une existence qui peu à peu s'étiole au fil des pertes de mémoire successives. La charge émotionnelle prend alors son envol et il est vraiment plus que difficile de rester de marbre face à l'évolution de la situation.

 

Au delà de la gradation de la tension liée à la maladie qui est très bien retranscrite, j'ai aussi aimé la douceur des rapports, l'humanité profonde qui se dégage de cette relation unique. De l'amour, de la tendresse et de l'humour lorsque Grégoire déraille et raconte n'importe quoi. Le passage des vaches qu'il aurait oublié de rentrer et qui le réveillent en pleine nuit est assez décalé et drôle. J'ai aussi apprécié la franchise de l'un envers l'autre, ils n'hésitent pas à se frotter et se piquer au détour d'une réflexion malheureuse de Madeleine (le RDV chez le médecin où elle remplace son père pour emmener Grégoire voir un spécialiste) ou lorsque le grand-père chavire sérieusement de la bouillotte. C'est beau, simple, pur et remarquable de justesse et de pudeur. Belle manière en tout cas de s'emparer d'un sujet difficile et tellement douloureux pour les proches des victimes de cette maladie implacable et détestable au possible.

 

Une grande et émouvante lecture que l'on peut entreprendre dès 12 ans (et bien après aussi !) et qui prouve une fois de plus le bien-fondé des choix audacieux et réussis de la maison Flammarion dans ses séries destinées à la jeunesse. Un grand bravo et un grand merci !

Publicité
Publicité
Commentaires
F
Roooh qu'il a l'air bien ce roman jeunesse : je note !
Répondre
Publicité
Suivez-moi
Archives
Publicité