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Le Capharnaüm Éclairé
10 septembre 2013

"Avis de tempête" de Serge Brussolo

avisdetempeteL'histoire: Imaginez une épave flottante, un bateau abandonné par son équipage, il y a de cela des années, et qui continue malgré tout à dériver en haute mer, au hasard des courants. Ses cales sont remplies de lingots d’or, trésor de guerre offert au premier qui osera s’en emparer. Mais attention! Aborder ce vaisseau fantôme, c’est pénétrer dans une épave où rode l’ombre d’un criminel de guerre que la solitude a rendu fou. Méfiez-vous! Car la peur vous attend, tapie entre les flancs de ce bateau qui n’en finit plus de faire naufrage. La peur, mais aussi la folie et la mort, trois passagères clandestines qui vous feront payer cher l’audace d’être monté à bord...

 

La critique de Mr K: Quoi de meilleur qu’un petit Brussolo pour passer un bon moment en cette fin de période estivale! En trois lectures dont deux polars bien ficelés, j’ai été conquis par le style de cet auteur hautement prolifique qui a un don certain pour pondre des histoires déroutantes et mener en bateau ses lecteurs. Dans ce volume, on retrouve le héros de "Bunker" dans une nouvelle aventure sud-américaine pas piquée des hannetons!

 

Ne vous laissez pas abuser par le résumé de quatrième de couverture, le passage dans le fameux bateau fantôme ne concerne que le dernier quart du roman. Tout commence par un premier chapitre haletant mettant en scène Arcaño, un apparatchik d’un régime totalitaire mourrant, fuyant la populace en colère, se réfugiant dans son yacht pour échapper à la révolution qui va renverser son dictateur de patron. Il a de l’or, beaucoup d’or qu’il a accumulé et entassé dans la soute de son bateau. Malheureusement pour lui, une terrible tempête va mettre fin à son rêve de retraite dorée... Le récit reprend trois ans plus tard et nous retrouvons Caine, écrivaillon de seconde zone, dans le pays imaginaire Terremoto portant toujours les stigmates de la révolution et vivant dans une autarcie tant politique que technologique. La chasse au trésor peut commencer et rien ne sera épargné au héros principal.

 

On retrouve dans cette aventure le personnage ambigu de Caine que j’avais bien apprécié dans Bunker. Baroudeur jusqu’au bout des ongles, on a parfois du mal à voir ses réelles motivations. Les frontières entre le bien et le mal sont parfois bien floues et ce périple va mettre à mal sa morale et ses désirs. Il croise sur son chemin des personnages complètement barrés qui vont tour à tour l’aider ou lui mettre des bâtons dans les roues. Il y a Kitty, ex-mannequin reconvertie dans l'activité de guide de plaisance qui va faire la totalité du chemin avec lui et se révéler bien surprenante au delà de son aspect de bimbo décérébrée. Il y a Sozo, un être difforme, vivant reclus dans la jungle, fuyant son passé et cachant un lourd secret. Puis il y a Carlita, égérie de l’ancien régime, cachée au fin fond d’un hôpital psychiatrique à moitié désaffecté bordé par une forêt menaçante. Au delà de ce triptyque de personnage singulier, le lecteur est plongé dans un univers violent et déviant. La population de Terremoto, endurcie et marquée par les épreuves, fait preuve d’une violence sans nom quand elle met la main sur d’anciens membres du régime dictatorial. Cela donne lieu à des descriptions parfois bien gores, limite farfelue tant Brussolo se complait dans le scabreux et dans le délirant. Ces passages ont le doux parfum d’une bonne série B.

 

On nage donc dans le glauque et plus on avance dans le récit plus on se rend compte que cette chasse au trésor s’apparente à un gigantesque test. Comment va en ressortir Caine? Va-t-il arriver au bout de sa quête? Sa soif d’or va-t-elle le perdre? Il va devoir tour à tour combattre des singes sauvages amateurs de chair humaine, des gardiens d’Hopital Psychique pervers, un ermite fou, les flots déchaînés des courants d’El Niño, des squales bien partant pour faire de lui leur déjeuner et enfin, une épave pleine de promesse. Le tout est concentré sur 250 pages ce qui donne un récit sans temps mort, à la langue simple et directe, efficace comme un uppercut dans le foie lorsque l’auteur se targue de descriptions borderlines sur l’état psychique du héros ou sur la nature sauvage (de très belles évocations de la forêt tropicale et de l’Océan Pacifique).

 

Au final, je n’ai pas vu le temps passer et il ne m’a fallu que deux sessions de lecture fiévreuses pour en venir à bout. Certes ce récit ne révolutionne pas le genre mais on y trouve ce supplément d’âme qui fait que ce roman se situe au dessus de la moyenne. Beau périple en tout cas, glauque à souhait et au suspens constant jusqu’à la toute fin. Ça ne se refuse pas, non?

 

Egalement lus et chroniqués au Capharnaüm éclairé du même auteur:
- "Le Syndrome du scaphandrier"
- "Bunker"
- "Les Emmurés"

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