"Kaïken" de Jean-Christophe Grangé
L'histoire : Quand le Soleil Levant devient un Soleil Noir,
Quand le passé devient aussi tranchant qu'une lame nue,
Quand le Japon n'est plus un souvenir mais un cauchemar,
Alors, l'heure du kaïken a sonné.
La critique Nelfesque : Quand un nouveau Grangé sort en librairie, je deviens folle, il me le faut là maintenant tout de suite ! Je campe devant la librairie, je saute dessus comme une droguée en manque. Cette année, j'ai eu la chance de découvrir ce "Kaïken" en avant première. De quoi me rendre limite hystéro, vous vous imaginez bien... J'ai attendu qu'il soit disponible pour vous en parler. Vous pourrez ainsi à la fin de ce billet, vous propulsez chez votre dealer de bouquins !
Dès le premier chapitre, les 6 premières pages, le ton est donné. "Kaïken" va être un roman à 100 à l'heure, un roman qui n'attendra pas la page 120 pour démarrer, un roman qu'il va être difficile de lâcher avant la fin. On retrouve la plume incisive et addictive de Grangé, ses phrases courtes et percutantes, ses chapitres "droits au but". Certains se lassent peut-être de ce procédé, maintes fois copié mais difficilement égalé. Personnellement, j'aime à chaque fois retrouver la plume si caractéristique de cet auteur, cette plume qui vous prend au bide et vous entraine dans les pires horreurs.
L'originalité de ce roman réside dans le fait que l'on a l'impression de commencer par la fin. On connait le nom du coupable, la traque policière touche à sa fin et très rapidement la main est mise sur le grand méchant du bouquin. Petite feinte de l'auteur qui va faire intervenir ici une seconde histoire dans son roman. L'occasion, comme à son habitude, de nous faire découvrir des contrés lointaines, d'autres coutumes et une façon de vivre littéralement différente de nos vies d'occidentaux.
"Kaïken" est une immersion dans le Japon légendaire, celui des samouraïs et de la philosophie zen, celui des rites initiatiques et de la maîtrise de soi. C'est aussi un bel hommage au Japon d'aujourd'hui et l'occasion pour Grangé de nous faire partager sa passion pour ce pays à travers les 472 pages de son roman. Comme à son habitude, l'auteur nous livre ses connaissances à bon escient et distille des informations sur le thème pour plonger le lecteur dans une ambiance particulière et lui faire comprendre la psychologie de ses personnages.
Niveau gore, le lecteur en prend encore une fois plein la tête avec un tueur sanguinaire détraqué, surnommé "L'accoucheur" parce qu'il enlève des femmes enceintes, les éviscère et brûle leurs fœtus encore reliés au cordon ombilical. Bon appétit si vous êtes à table ! L'enquête sur l'accoucheur est la première du roman mais bien vite, Passan, le flic de l'histoire, va se retrouver confronté à une enquête beaucoup plus personnelle qui touchera l'intérieur même de son foyer. Comment réagit un flic Grangesque lorsqu'un malade cherche sa femme et ses enfants ? Réponse : il ne reste pas 2 heures le cul sur sa chaise et agit dans la seconde. Raaaa que ça fait du bien !
Alors OK, l'univers policier est un peu caricatural, un peu comme Olivier Marchal nous le présente au cinéma, mais ce sont ces flics là que j'aime. Je ne m'en plaindrai donc pas. The dark side of the police man !
Léger reproche à faire à ce "Kaïken" : une fin trop rapide. C'est d'ailleurs le seul défaut que je trouve à l'ensemble des romans de Grangé. Là où on aimerait une scène finale de 40 ou 50 pages, il nous les torche en 10. Frustration suprême ! La fin de ce présent roman, très cinématographique aurait mérité d'être plus longue mais au final c'est le roman dans son ensemble que l'on retient et non la fin. Vous pouvez donc y aller !
Et bien voilà, mis à part pour "La Forêt des Mânes" qui m'a agacée sur plusieurs points, je renouvelle mon amour pour Grangé et vous conseille de découvrir ce dernier roman.
La critique de Mr K (edit du 06/10/20) : C’est en voyant Nelfe attaquer la lecture du dernier Jean Christophe Grangé que je me suis dit que ça faisait un bail que je n’avais pas fréquenté ce maître du thriller à la française. En fait, ma dernière lecture de lui date de 2015, la honte ! Je décidai de recommencer là où je m’étais arrêté avec Kaïken, un titre que Nelfe avait bien aimé. J’ai passé un bon moment pour une lecture ultra-rapide, il sait y faire le bougre et l’addiction vient très vite. Ce n’est pas pour autant un très grand Grangé, la faute essentiellement à un changement narratif déroutant et une fin un peu abrupte.
Un flic au bord de la rupture nerveuse dont le couple bat de l’aile et un meurtrier particulièrement retors qui s’en prend à des femmes enceintes et le fruit de leurs entrailles sont les deux points de départ d’un ouvrage qui démarre vite et fort. En quelques chapitres courts, Grangé décrit en quelques lignes bien senties dont il a le secret ses personnages et leur psyché. Passant allégrement du flic à bout de souffle au chtarbé complètement à l’ouest qui essaie de reproduire un mystérieux rite, on enchaîne les chapitres avec un plaisir sadique non feint. S’éloignant en cercles concentriques de ces deux protagonistes centraux, on fait connaissance avec la femme japonaise de notre antihéros, une femme pleine de contradictions, et ses deux enfants. Il y a Sandrine la meilleure amie du couple qui vit une terrible épreuve sans que personne ne le sache, il y a aussi les équipiers du héros fidèle à leur chef en pleine descente.
Comme toujours, on se fait avoir. Les fautes pistes se multiplient, on exploite les abysses de ces esprits torturés qui se débattent entre réel et perceptions trompeuses. Les fins de chapitres créent l’attente avec une formule choc qui nous emmène vers des ailleurs que l’on ne soupçonnait pas. Puis, curieusement, en plein milieu le dénouement arrive et l’on passe ensuite à une deuxième affaire dont le lien est plus que ténu avec la première. Le principe ne me dérange pas, le traitement a été quelque peu raté. J’ai trouvé ce deuxième fil rouge moins puissant et enveloppant que le premier. L’intérêt est moindre même si l’on tourne tout de même les pages à toute vitesse. Le final effectivement tombe assez vite et à plat, la fin est presque heureuse... ce qui m’a le plus surpris et un peu déçu.
Pour autant, cet ouvrage procure un sacré plaisir de lecture, il est tout bonnement impossible de le relâcher avant la fin et je l’ai parcouru en deux soirées environ. Moins fourni en détails gores (il y a tout de même de bons passages), il fait la part belle à la psychologie et aux renversements de situations sous fond de culture japonaise, ce qui n’est pas pour me déplaire. Une bonne lecture détente qui en appelle d’autres, je recroiserai à nouveau cet auteur dans les mois à venir c’est sûr !
Déjà lus et chroniqués du même auteur au Capharnaüm éclairé (à la date de mise en ligne de la chronique initiale) :
- "Le Passager"
- "La Forêt des Mânes"
- "Le Serment des limbes"
- "Miserere"