"Rafael, derniers jours" de Gregory McDonald
L'histoire: Il est illettré, alcoolique, père de trois enfants, sans travail ni avenir. Il survit près d'une décharge publique, quelque part dans le sud-ouest des Etats-Unis. Mais l'Amérique ne l'a pas tout à fait oublié. Un inconnu, producteur de snuff films, lui propose un marché : sa vie contre trente mille dollars. Il s'appelle Rafael, et il n'a plus que trois jours à vivre...
La critique Nelfesque: Attention roman violent. Il ne s'agit pas de gore, la description de ce qui va arriver à Rafael ne fait qu'un chapitre, mais de violence psychologique. Le snuff movie n'est ici que prétexte à décrire le quotidien de Rafael, de ses amis et de sa famille. Ce quotidien fait de débrouille, de mépris, d'injustice et de bêtise crasse.
Je rapprocherai "Rafael, derniers jours" de "Des Fleurs pour Algernon" non pas pour l'histoire qui est complètement différente ici mais pour le fond. Les auteurs de ces deux romans pointent du doigt des problèmes que le commun des mortels ne fait qu'effleurer, ils mettent en avant des hommes différents, des laissés pour compte, et donnent la possibilité aux lecteurs d'apprendre à les connaitre. Indéniablement ici, on s'attache à Rafael, cet homme gentil, naïf au point de pouvoir vendre sa vie pour un snuff movie dont ni lui, ni sa famille, ne verront jamais les dollars promis... Un homme qui parce qu'il parle à quelqu'un d'"important", lui donne sa confiance, sans arrière pensée. On sait que l'histoire finira mal, on sait que Rafael se fait avoir et on a de la peine pour lui.
Gregory McDonald nous présente ici une tranche de sa vie, sans doute la plus importante, ses derniers jours avec sa femme et ses enfants avant de devenir une star du cinéma... Grâce à une avance sur "salaire", il va pouvoir gâter ceux qu'il aime et organiser leur avenir loin du bidon ville dans lequel ils vivent. Morgan Town, ancienne station service, proche de la décharge et de l'autoroute, devenue peu à peu le point de chute de nombreuses familles faisant de ce no man's land un quartier où certains bus acceptent de s'arrêter malgré l'absence d'arrêt.
Ce geste de bonté de la part de Rafael va attirer commérages et jalousie de la part de la communauté qui ne va pas tarder à lui mettre sur le dos le meurtre d'une caissière lors d'un hold-up. Le lecteur navigue ainsi entre pitié, indignation et incompréhension. L'auteur nous propose là un roman noir qui fait mal, marque et dont on se souviendra longtemps. Le personnage de Rafael, simple et bon, sans vice ni malice, nous rappelle ce qu'il y a d'important et d'essentiel dans la vie. Un très beau roman.
Cette lecture entre dans le cadre du challenge "Un mot, des titres..."