"Je, François Villon" Jean Teulé
L'histoire: Il est peut-être né le jour de la mort de Jeanne d'Arc. On a pendu son père et supplicié sa mère. Il a étudié à l'université de Paris. Il a joui, menti, volé dès son plus jeune âge. Il a fréquenté les miséreux et les nantis, les curés, les assassins, les poètes et les rois. Aucun sentiment humain ne lui était étranger. Des plus sublimes aux plus atroces, il a commis tous les actes qu'un homme peut commettre. Il a traversé comme un météore trente années de l'histoire de son temps. Il a ouvert cette voie somptueuse qu'emprunteront à sa suite tous les autres poètes: l'absolue liberté.
L'avis de Mr K: Mon premier contact avec Villon remonte à fort longtemps lorsque je n'étais qu'un littéraire boutonneux de lycée. Puis est venue la période de mes chères études d'Histoire avec ma spécialisation sur la période médiévale. Et puis, il y a eu le post de l'amie Ys concernant ce livre et mon père qui me prête le bouquin en me disant que j'allais prendre une claque et que l'époque est fidèlement retranscrite par Teullé.
J'ai dévoré ce volume. Déjà la vie de Villon en soi est passionnante: personnage historique abject par ses actes (viols, meurtres et tutti quanti) il a été aussi un génie hors norme: inventeur stylistique et linguistique, centrage de son oeuvre sur les réprouvés et esprit en avance sur son temps. Bien que parcellaire (beaucoup d'éléments restent encore inconnus pour les historiens), la vie de Villon nous emmène dans les prieurés, le faste des châteaux de la noblesse et dans les culs de basse fosse les plus sordides. C'est d'ailleurs dans la description de ces derniers, des cimetières de l'époque (manquent plus que les cochons qui dévoraient les cadavres!), des demeures des pauvres et tavernes mais aussi des tortures judiciaires pratiquées à l'époque que Teulé excelle, on retrouve ici la fascination morbide de l'auteur de Darling.
Le personnage du tuteur de Villon est une merveille: homme bon de nature qui se laisse dépasser par son filleul et ne pourra l'empêcher de faire les pires atrocités. Isabelle la jeune fille noble amoureuse de Villon qui lui fera subir la pire des humiliation (attention scène choc!) est un véritable éclat de soleil au milieu de la fange qui nous est ici décrite. Niveau glauque, on est servi par les personnages de la prostituée initiatrice, le charcutier cannibale, le bourreau sadique, un inquisiteur complètement félé et un Villon véritable génie du mal pour qui je n'ai eu aucune sympathie si ce n'est pour son oeuvre.
Une bien bonne lecture avec un tout petit reproche cependant. La fascination morbide de Teulé éclipse tous les pans positifs de l'époque notamment la grande solidarité sociale qui pouvait exister dans la société française au niveau du peuple (fêtes, entraide etc...).
Alors certes, le Villlon fut un bien mauvais garçon mais sa vie fut un roman et Jean Teulé maîtrise son sujet. Tout cela m'a donné envie de replonger dans l'oeuvre du célèbre poète en commençant peut-être d'ailleurs par les adaptations qu'en a fait Brassens.