"Monde des ténèbres" de Robert Bloch
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L’histoire : Depuis que le bon Dieu est, paraît-il, mort, les psychiatres ont pris la relève. Les gardes-fou, les Pères fouettards, c'est eux. Le paradis, c'est la Maison de Santé. Qui parfois se transforme en Enfer, quand l'un des Anges, devenu complètement dingue, assassine le Patron et ses sous-fifres les infirmiers. Alors, dans toute la Californie, c'est la chasse à l'Ange. Difficile, effrayante. D'autant plus qu'on ne sait pas qui c'est, qu'on n'a jamais vu son visage, à ce nouveau Lucifer.
La critique de Mr K : Ça faisait un petit bout de temps que je n’avais pas lu un ouvrage de la collection Série noire de Gallimard. Ce livre m’est tombé dans les mains lors d’un chinage hasardeux de plus durant nos vacances estivales dans le Sud-Ouest. Je connaissais Robert Bloch de lectures plus anciennes et la quatrième de couverture m’a de suite convaincu. Je dois avouer que je n’ai pas fait de recherches quand je l’ai lu, elle m’a parlé de suite ! Il faut dire que j’aime bien les œuvres littéraires ou cinématographiques qui se déroulent dans des asiles d’aliénés ou des hôpitaux psychiatriques… Non non, ne cherchez pas, je suis normalement constitué... mais je m’égare là… Monde des ténèbres ne m’a pas duré très longtemps, je l’ai littéralement dévoré. Imaginez un mélange entre roman policier classique, immersion dans des esprits vraiment dérangés et des révélations en cascade et vous obtenez un roman noir de chez noir qui m’a séduit au plus haut point.
Le docteur qui suit son conjoint a appelé Karen, elle peut venir voir son mari qui est en clinique depuis six mois sans qu’elle puisse venir le visiter. Il devrait bientôt pouvoir sortir. Cette working girl active et assumée est ravie, elle va enfin pouvoir retrouver Bruce, l’homme de sa vie. Elle prend donc sa voiture et part pour la maison de soin, perdue au milieu de nulle part et où elle arrive en pleine nuit (c’est quand même bien pratique pour planter une bonne ambiance dès le début). Et là, horreur, malheur, c’est le chaos. Une infirmière étranglée avec un fil téléphonique, le médecin psychiatre en chef brûlé vif sur la chaise d’électro choc réservée habituellement aux patient, un infirmier trucidé et une patiente morte d’un arrêt cardiaque… Karen hallucine et les autres patients de cette clinique de luxe ont disparu dans la nature…
Il faut appeler les flics et ces derniers arrivent vite sur les lieux, l’enquête peut débuter. Karen se pose de plus en plus de questions. Quid de Bruce ? Est-il responsable de près ou de loin de toutes ces horreurs ? D’ailleurs, elle semble garder un certain nombre d’éléments pour elle quand les policiers l’interrogent sur le passé de son mari. Le doute s’insinue alors dans l’esprit du lecteur et le récit continue avec des morts qui s’accumulent, des personnes liées de près ou de loin avec la fameuse clinique. Fausses pistes et faux semblants vont s’enchaîner jusqu’à une révélation finale bien trouvée qui ponctue parfaitement le récit.
Ce dernier est très bien troussé, le suspens est constant. L’auteur va à l’essentiel sans pour autant sacrifier la profondeur des personnages. Très vite, on plonge dans une ambiance un peu paranoïaque, Karen ne sait pas à quel Saint se vouer et nous non plus. Les chapitres ne sont pas forcément centrés sur les mêmes personnages, certains passages s’apparentent clairement à une immersion totale dans l’esprit d’un être dérangé en quête de vengeance et / ou de rédemption. C’est assez déstabilisant et on est d’ailleurs mis dans le bain dès le premier chapitre qui est une ouverture parfaite en terme de création d’attente chez le lecteur. Ce côté borderline perdure durant toute l’œuvre, on est régulièrement bousculé et l’on se demande bien où tout cela va nous mener.
Sous une première perception simple, les personnages s’avèrent très fouillés, les esprits sont complexes (pour ne pas dire tortueux) et quand les révélations tombent, on ne peut s’empêcher de se dire que c’est rudement bien trouvé. L’ambiance de fin du monde, très sombre, sans espoir et les crimes qui s’accumulent créent un climax poisseux à souhait mais pourtant réjouissant. L’écriture très accessible est un bonheur de lecture, les pages se tournent toutes seules et au final, quand on referme le roman, on se dit que l’on a passé un très bon moment. Un titre hautement recommandable donc. Avis aux amateurs !