"Le Collier rouge" de Jean-Christophe Rufin
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L’histoire : Dans une petite ville du Berry, écrasée par la chaleur de l'été, en 1919, un héros de la guerre est retenu prisonnier au fond d'une caserne déserte.
Devant la porte, son chien tout cabossé aboie jour et nuit.
Non loin de là, dans la campagne, une jeune femme usée par le travail de la terre, trop instruite cependant pour être une simple paysanne, attend et espère.
Le juge qui arrive pour démêler cette affaire est un aristocrate dont la guerre a fait vaciller les principes.
Trois personnages et, au milieu d'eux, un chien, qui détient la clef du drame...
La critique de Mr K : Cela faisait longtemps que je n’avais pas lu un Jean-Christophe Rufin, un auteur qui a une place à part chez moi et que j’affectionne énormément. Le Collier rouge m’a été dégoté par Nelfe lors d’une de ses visites surprises chez Emmaüs et l’ouvrage m’attendait depuis trop longtemps dans ma PAL. Je décidai de l’en sortir et je n’ai pas été déçu.
1919, la guerre est terminée depuis un petit moment, nous sommes dans le Berry au cœur de la France sous une chaleur accablante. Un mystérieux prisonnier est enfermé dans une ancienne caserne. Ancien héros de guerre, il n’a de cesse de clamer sa culpabilité sans que l’on sache vraiment de quoi il s’agit et il n’attend plus que le juge venu statuer sur son sort. Ce dernier va finir par arriver sur place et va devoir dénouer tout cela. Il sera bien vite mis sur la piste d’une jeune femme liée au prisonnier et devra conjuguer avec un étrange chien qui n’a de cesse d’aboyer sous la fenêtre de son maître incarcéré.
La tension est à son maximum durant toute la lecture, nous sommes en 1919 et la France sort tout juste de la guerre. C’est le début de la reconstruction, c’est aussi l’heure des procès de soldats pour leurs "mauvais agissements" envers la nation. Les gens n’en peuvent plus, trop de vies ont déjà été sacrifiées et il suffirait d'un rien pour que la colère n'éclate.
Ce court roman de 154 pages est un modèle de concision et de structuration. La construction est très maline et l’on se demande bien de quoi il est vraiment question durant les trois quart du livre. Au fil des pérégrinations du héros dans sa quête de vérité, les impasses et les avancées parfois saisissantes, on va apprendre à connaître la vie de ce prisonnier pas tout à fait comme les autres, issu du peuple de la Terre et qui au contact de la Guerre va voir toutes ses certitudes ébranlées. Son parcours une fois révélé prend vraiment une ampleur insoupçonnée et la révélation finale est très réussie.
Tous les personnages du roman (y compris le chien) sont à l’avenant. Fouillés, complexes et riches en surprises dans leur développement. Cela donne un caractère hautement addictif au récit qui bien que lent dans son déroulé se révèle passionnant et universel. En effet, Rufin aborde des questions et des thèmes importants qui transcendent les époques et les lieux comme la barbarie de la guerre, la mort en masse d’anonymes décidée en haut lieu, les blessures dont on ne guérit jamais et qui vous brisent, les difficultés à se réinsérer… mais aussi la fidélité, incarnée par Guillaume (le fameux chien), l’amour qui nous transcende quand on est au cœur de l’enfer et la paternité qui nous tombe dessus sans que l’on sache vraiment à quoi s’attendre.
L’ensemble se lit d’une traite avec un plaisir continu, une émotion qui nous étreint de la première à la dernière page et en refermant l’ouvrage, on a vraiment conscience d’avoir lu un livre assez unique. Un petit bijou.
Également lus et chroniqués au Capharnaüm éclairé du même auteur :
- Rouge Brésil
- La Salamandre
- Le parfum d'Adam
- Globalia
- L'Abyssin