"Les Illuminés" de Jean Dytar et Laurent-Frédéric Bollée

L’histoire : Plongeant au cœur de notre patrimoine culturel, deux auteurs, au sommet de leur art, s'associent et nous entraînent dans le parcours chaotique du manuscrit des Illuminations, d'Arthur Rimbaud.

Qui se cache à l'ombre des Illuminations, cette pièce unique de la poésie française ? Arthur Rimbaud, bien sûr, mais aussi Paul Verlaine et Germain Nouveau. Entre 1872 et 1877, les trois poètes se tournent autour, se cherchent, se fuient, s'enivrent, tentent d'être libres ou s'acharnent à ne pas l'être. Et puis un manuscrit, l'ultime, circule de main en main et semble leur brûler les doigts...

La critique de Mr K : Nouveau prêt de l’ami Franck et nouvelle pépite avec Les Illuminés de Jean Dytar et Laurent-Frédéric Bollée, deux auteurs qui nous livrent ici une œuvre aussi belle que subtile sur les poètes maudits du XIXème siècle que j’affectionne tellement. Ce fut une lecture passionnante et audacieuse, le genre de volume que l’on refeuillette après l'avoir lu pour mesurer sa portée.

Le parti pris de narration est très original. Nous suivons Rimbaud, Verlaine et Nouveau de manière séparée via des bandeaux qui divisent les planches en deux ou en trois selon l’époque. Chacun a une couleur dominante et l’on reste dans la monochromie verdâtre, grisâtre ou sépia avec des dessins effectués au pinceau ce qui donne à l’ensemble un aspect impressionniste de bon aloi et en totale adéquation avec le propos. L’œuvre est majestueuse et impressionnante de maestria esthétique.

Ces trois là ont eu une vie digne d’un roman, pas besoin d’effets de manche pour intéresser le lecteur, tout foisonne et devient grandiose à leur contact. Le poète installé et amoureux qui ne veut pas lâcher sa femme, le jeune génie à la sensibilité exacerbée, celui qui se cherche et pourrait se révéler au contact des deux autres… sur la période tirant de 1872 à 1877, les auteurs grâce à un énorme travail de documentation et de recherche retranscrivent ces trois trajectoires qui tour à tour s’épousent ou s’opposent.

Il y a bien sûr la quête de l’ivresse et de l’inspiration (la couverture est sans ambiguïté à ce niveau là), les soirées qui n’en finissent pas, les discussions à bâtons rompus au café avec les célébrités de l’époque, Paris ville lumière qui est autant un personnages que les trois que nous suivons… l’époque est très bien retranscrite avec finesse, justesse et délicatesse. Et puis au centre de tout, il y a le manuscrit de Rimbaud, une œuvre qui n’attend qu’un geste pour être portée au public, une œuvre qui pourrait changer les choses malgré le peu d’attrait qu’a la poésie pour le lectorat de l’époque (et encore aujourd’hui). Tout se mêle harmonieusement et propose un voyage à nul autre pareil.

L’ouvrage s’admire, se goutte, se digère avec un plaisir sans fin. C’est beau, pur, unique et l’expérience se révèle vraiment mémorable. Vous savez ce qu’il vous reste à faire !