vendredi 4 septembre 2020

"Immigrants" de Christophe Dabitch et collectif

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Le contenu : Au XXe siècle, la France a été l'un des principaux pays d'immigration dans le monde. Cet aspect de notre histoire contemporaine a longtemps été refoulé de la mémoire collective. Aujourd'hui, le vieux stéréotype "nos ancêtres, les Gaulois" tend à disparaître. Mais d'autres préjugés se sont installés, notamment l'idée que les immigrants d'autrefois se seraient "bien intégrés", alors que ceux d'aujourd'hui "poseraient problème". L'histoire de l'immigration montre qu'en réalité, c'est toujours le dernier venu qui a été perçu comme le plus menaçant aux yeux des autochtones...

Cet ouvrage n'a pas pour objectif d'être représentatif des différentes réalités vécues de l'immigration. Il s'agit de porter un regard sur quelques trajectoires singulières et, grâce au travail de réflexion des historiens, d'interroger quelques thématiques liées à l'immigration.

Ils viennent de Roumanie, d'Angola, de Turquie, d'Uruguay... Pour des raisons économiques ou politiques ou de santé, leurs parents, ou eux-mêmes, ont dû quitter leur pays pour la France. Ce livre raconte leur intégration, qui passe très souvent par une phase de "racisme ordinaire".

La critique de Mr K : Super lecture que Immigrants de Christophe Dabitch et tout un collectif de dessinateurs, un ouvrage que j’avais emprunté avant les vacances au CDI de mon établissement. Il propose un mix original mais essentiel par rapport au thème abordé : on alterne ici textes d’historiens sur différents aspects de l’immigration et des témoignages mis en image par un auteur de BD et une mise en mots de Christophe Dabitch. Loin d’être moralisateur ou versant dans l’apitoiement, cet ouvrage permet surtout de faire le point, de préciser les choses et de remettre les pendules à l’heure. Vu la démagogie ambiante autour du thème des migrants depuis un certain temps (depuis toujours en fait quand on a bien lu ce livre), voila une lecture fondamentale et diablement maligne.

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Le postulat de départ est de proposer quelques trajectoires particulières brutes de décoffrage sans fioritures, sans lissage. D’origines très diverses, les hommes et femmes qui peuplent ces pages hantent longtemps l’esprit du lecteur tant ils forcent souvent le respect. Tout quitter par obligation ou par choix, tenter sa chance vers un Eden supposé, tels sont les points de départ de petits récits pas plus longs de dix pages à chaque fois qui frappent en plein cœur. De tout âge, sexe ou origine, avec de l’éducation ou non, ces immigrants partagent leur foi en l’avenir, leur réussite pour certains mais aussi parfois leurs désillusions. Ces fragments d’humanité sont très touchants car très réalistes, à 10 000 lieux des images d’Epinal que les médias fascisants nous servent jusqu’à l’écœurement. Comment ne pas être touché par ces personnes ultra diplômées qui se retrouvent à travailler dans des métiers dont personne ne veut mais qui sont finalement les seuls qu’on leur propose. Comment ne pas se révolter face au racisme imbécile du péquin moyen, phénomène courant et malheureusement commun à tous les pays et tous les temps.

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Car en parallèle de ces destinées, des historiens s’intercalent en reprenant la thématique sous différents angles. C’est très instructif, bien mené et très accessible même pour un non initié. Pas de côté rébarbatif mais un sacré travail de mémoire qu’il serait bon de partager avec les personnes les plus obtuses qui malheureusement ont bien trop souvent pignon sur rue. On revient au détour de ces pages sur un fait indubitable : nous sommes une nation d’immigrants qui s’est lentement constituée des apports successifs de travailleurs nécessaires à la construction et reconstructions qui ont égrainé les derniers siècles. Quelques moments clefs de notre Histoire sont présents ici comme les guerres mondiales ou encore les Trente Glorieuses. Certes, les minorités visibles sont souvent célébrées comme footballeurs, sportifs et autres artistes mais l’immense majorité sont avant tout des personnes ayant œuvré dans le bâtiment, la cuisine ou le tertiaire, il est bon de le rappeler. On revient aussi ici sur les immigrantes elle-même car trop souvent dans les imaginaires réactionnaires, le migrant est un homme seul venant subvenir aux besoins de sa famille dans notre pays. Grosse grosse approximation, la part des femmes est très importante et leur apport lui aussi est indubitable. D’autres textes reviennent sur les stéréotypes et leur origine, et enfin sur la colonisation, brèche encore ouverte à vif de notre Histoire que l’on n’arrive pas à accepter et à aborder avec sérénité (il suffit d’entendre les déclarations de Tsar Cozy ou Micron Ier pour s’en convaincre). Bel apport théorique donc qui a le mérite de clarifier les choses avec neutralité et volonté pédagogique manifeste. Pari largement réussi aussi à ce niveau !

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Les BD en elle-même sont assez inégales en terme d’esthétique, certaines sont magnifiques, d’autres plus discutables dans les choix opérés. Mais même pour ces dernières, le plaisir est là, les mots nous transportent dans ces réalités si éloignées de nous puis finalement pas tellement. Ça prend à la gorge parfois et éclaire de manière forte et juste les propos historiques précédemment lus. Franchement, voici un ouvrage à mettre entre toutes les mains malgré qu’il soit daté d’avant la crise des migrants et de la Syrie. Pour autant, les mécanismes décrits sont malheureusement toujours d’actualité et ce recueil vaut tous les discours humanistes du monde. À lire absolument !


samedi 4 août 2018

"Eerie" Anthologie, volumes 1 et 2 - Collectif

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Le contenu : Lancés par l’éditeur Warren Publishing respectivement en 1964 et 1966 et publiés jusqu’en 1983, les magazines d’horreur Creepy et Eerie étaient initialement inspirés des comics classiques américains publiés dans les années 50 par la maison d’édition EC. Grâce à leur format magazine destiné à un public plus âgé, Creepy et Eerie allaient contourner les problèmes de censure qui sévissaient alors aux Etats-Unis, et purent s’appuyer sur une équipe composée d’artistes parmi les plus talentueux de cette époque, dont un bon nombre était déjà issu des emblématiques publications EC.

Al Williamson, Wallace Wood, Alex Toth, Joe Orlando ou Johnny Craig allaient accompagner, au lancement de Creepy et Eerie, d’autres artistes majeurs de l’industrie de la BD tels que Frank Frazetta, Steve Ditko, John Severin ou Gene Colan et poser à nouveau une formidable empreinte dans l’histoire du comic-book Américain indépendant.

La critique de Mr K : Voilà un petit bout de temps que ce volume me tentait énormément. Il faut dire que j’adore le label Delirium qui a la bonne idée depuis quelques années de rééditer des trésors de la BD fantastique. J’avais ainsi pu redécouvrir en deux volumes le magazine Creepy et plus récemment, me délecter de leurs deux volumes consacré à Richard Corben, un de mes dessinateurs US préféré.

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Comme chaque année, j’aime m’offrir un petit cadeau de Noël en retard, et en janvier dernier, j’ai craqué pour ce volume 1 d’anthologie à la revue Eerie, petite cousine de Creepy. J'ai accompagné cette impulsion première en juin, en me prenant le volume 2. Inutile de vous dire que j’ai de nouveau pris une claque !

On est dans chacun de ces ouvrages face à 26 courts récits d’horreur et de fantastique parus entre 1965 et 1968 dans le magazine Eerie. On retrouve le plus souvent à la baguette scénaristique Archie Godwin qui s’accompagne de nombreux dessinateurs connus de l’époque (dont ici Joe Orlando, Gene Colan ou encore Reed Crandall) pour nous apporter frissons et réflexions plus globales sur l’humain qui bien souvent se retrouve ici puni par là où il a péché. Bien sûr monstres et esprits surnaturels sont au RDV mais pas seulement... car en tout individu, une part sombre sommeille et ne demande qu’à sortir, ce qui est le cas dans toutes les historiettes qui nous sont contées dans ce volume.

Bien souvent, tout commence par une transgression morale, un acte de pure cupidité ou répondant de tout autre pêché capital qui va entraîner le personnage principal vers le trépas ou la folie. On croise donc nombre de tristes sires qui veulent s’accaparer la richesse qui ne leur appartient pas, d’autres tromper la mort ou s’adjuger une découverte, découvrir une vérité cachée pour de mauvaises raisons, réussir un exploit pour briller en société, franchir une frontière immatérielle au détour du quotidien, ne pas respecter un tabou antédiluvien... Gare à eux cependant car tout acte a ses conséquences et elles se révèlent bien souvent tragiques. Attendez-vous à une exploration sans pitié de l’âme humaine, ses défauts et le déchaînement de forces surnaturels qui nous dépassent et que l’on peut parfois manipuler pour son bien personnel.

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Le format très court impose une économie de mots et d‘images bienvenue. On est ici dans le condensé et l’efficace, marque de fabrique des comics US d’épouvante qui avaient un grand succès à l’époque. Delirium déterre des trésors d’inventivités scénaristiques et de styles qui ravissent les papilles et titillent l’amateur forcené de fantastique que je suis. Les auteurs s’amusent à réutiliser de vieux mythes (une très belle variation autour du mythe de Frankenstein notamment, ou encore de belles adaptation de Poe) multipliant les références et les images mentales que tout amateur a forcément au fond de soi. Le procédé est intéressant entre mise en abyme, rajeunissement de figures tutélaires du genre et respect profond pour la matière première. Et puis, il y a de grandes thématiques classiques que l’on retrouve à travers des scripts 100% originaux avec les explorateurs blancs s’avançant dans l’inconnu et irrespectueux des rites ancestraux, l’arroseur arrosé dans des histoires d’escroqueries funèbres, le désir qui nous consume et nous fait faire des choses épouvantables... On n’a vraiment pas le temps de s’ennuyer avec Eerie, présentateur débonnaire de chaque récit qui aime les jeux de mots macabres et les récits aussi vifs que traumatisants.

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Il n’y a vraiment rien à jeter dans ce volume, toutes les histoires valent le détour et même si certaines ont perdu en originalité avec la visibilité plus forte du genre aujourd’hui, on se plaît à ce voyage dans le temps en noir et blanc qui esthétiquement frôle la perfection (deux / trois récits m’ont moins convaincus à ce niveau là). En bonus, la fin d’ouvrage nous livre les couvertures originales de la série de magazine en couleur (ça claque !) et quelques fiches illustrées de monstres célèbres de la franchise. Décidément Delirium continue à faire les choses en grand. Vivement mon prochain achat, ce sera sans doute  le volume consacré au non moins magazine culte Vampirella. Tout un programe, miam miam !

Autres titres du Label Delirium chroniqués au Capharnaüm Éclairé :
- Anthologie Creepy, volumes 1 et 2
- Richard Corben, volume 1
- Richard Corben, volume 2

samedi 11 juin 2016

"20 + 1 short stories" - Ouvrage collectif

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L'histoire : Pour fêter les vingt ans de la collection "Terres d'Amérique", voici réunies 21 nouvelles de ses auteurs les plus emblématiques. 21 écrivains qui dessinent un portrait fort et sensible de la littérature nord-américaine d'aujourd'hui, de la sombre tendresse de Sherman Alexie au souffle narratif de Joseph Boyden, la grâce poétique de Charles d'Ambrosio ou la violence émotionnelle de Craig Davidson en passant par le réalisme magique de Louise Erdrich et l'exubérance de Karen Russell. 21 textes qui prouvent définitivement que la nouvelle est loin d'être un genre mineur. Et c'est pour cela qu'il faut la fêter, la célébrer. Qu'il faut encourager les lecteurs à lire des recueils et à découvrir de jeunes auteurs. Car défendre la nouvelle, c'est défendre la littérature.

La critique de Mr K : Ceux qui nous suivent régulièrement savent que nous sommes rarement déçus par la collection Terres d'Amérique de chez Albin Michel. Entre romans et nouvelles, c'est souvent l'occasion de découvrir une autre Amérique, plus humaine et moins caricaturale que ce que nous sert régulièrement le cinéma hollywoodien, la cohorte de séries qui inondent nos écrans et les écrivains bankable qui pour ma part ne m'ont séduit qu'un temps. Dans ce volume un peu particulier, Francis Geffard (le directeur de cette collection) nous convie à une fête de la littérature et surtout de la nouvelle qu'il défend âprement avec passion depuis maintenant 20 ans. Il convoque pour l'occasion les meilleurs auteurs de son catalogue pour un tour d'horizon aussi riche que passionnant d'une Amérique qui doute, se cherche et se penche sur ses racines. Cerise sur le gâteau, pour l'occasion un inédit se glisse dans ces 21 textes afin de découvrir un auteur prometteur.

Aux USA, la nouvelle n'est pas décriée comme en France, terre de littérature qui a tendance d'ailleurs à se prendre trop au sérieux. Outre-manche, les grands auteurs débutent souvent par des short-stories qu'ils font paraître dans des magazines et des revues universitaires, leur permettant ainsi de se faire un nom, d'obtenir des résidences universitaires et pour certains de percer dans le milieu de l'édition. Cela se traduit par une production de recueils de nouvelles plus importante et de sacrés succès en librairie avec la nécessité pour l'auteur à chaque micro-récit d'allier caractérisation rapide, récit accéléré et recherche de l'efficacité pour ne pas perdre en route un lecteur que l'on doit capter dès les premières pages. À la fin du présent volume, chaque auteur a le droit à sa petite biographie particulière ce qui éclaire le parcours de chacun et donne à voir leurs origines, leurs influences et après lecture de la nouvelle leur style et spécialité. Riche idée qui risque malheureusement de m'appauvrir au niveau du portefeuille tant j'ai rencontré de nouveaux auteurs à approfondir dans de futures lectures.

C'est donc un balayage hétéroclite de l'Amérique qui nous est proposé ici, des entrées multiples dans les mentalités US : les familles et leurs dysfonctionnements (c'est un des thèmes les plus abordés dans ce recueil), l'amitié et l'amour, la notion de foi (et de non-croyance aussi), le progrès et ses limites, la vie citadine et la vie rurale, le retour à la vie normale après un séjour en zone de guerre et toute une série de situations apparemment simples mais qui vont révéler toute la complexité de l'existence humaine. C'est un océan de sentiments, de relations ambiguës qui s'agitent dans ces pages et bouleversent les certitudes que le lecteur se fixe en début de récit. Rien n'est figé et chaque nouvelle apporte son lot de surprise, de retournement de situation et de final alambiqué tout en sachant que le genre reste dans le narratif contemporain, proche du quotidien que chacun de nous peut vivre ou avoir vécu. Décès accidentels et pertes d'êtres chers, paupérisation, rapports tendus au sein des familles, quête d'identité et de son passé, l'amour soumis à la réalité de la vie, instants de fraternisation et d'amitié… autant de moments qui font écho à notre propre vie et l'enrichissent. Belle expérience humaine avec des auteurs qui partagent bien plus que leur œuvre et offrent un beau panel de destins touchants et édifiants.

Je vous mentirai en vous disant que toutes les nouvelles se valent et la subjectivité est exacerbée dans ce genre si particulier. Trois seulement m'ont déçu profondément mais je pense que c'est dû au thème abordé qui ne me touchait pas particulièrement. La majeure partie des récits proposés m'a "chaviré", étonné, questionné et profondément captivé. Chacun je pense y trouvera son compte et passera des moments parfois inoubliables comme avec la nouvelle Les Enfants de Dieu où un homme se voit confier deux handicapés lourdement atteints et qui va devoir affronter les parents indignes qui les rejettent, Pièces détachées où un couple essaie de survivre à l'horrible drame arrivé à leur fille étudiante, l'ensorcelante nouvelle Le Plongeon du guerrier indien où l'on suit le destin d'un amérindien partagé entre deux femmes, ce récit est une valse de l'hésitation d'une grande sensibilité. J'ai aussi adoré la violence à fleur de peau qui habite la nouvelle Un Goût de rouille et d'os et son personnage principal charismatique à souhait (univers autour de la boxe, ça devrait plaire à Nelfe ça !) ou encore le naturalisme puissant de La Femme du chasseur, où quête des grands espaces et amour ne font pas bon ménage. Mais il y a tellement d'autres nouvelles très réussies dans ce recueil que cette chronique n'en finirait pas !

Au final, j'ai dévoré les plus de 600 pages de ce livre (qui ne coûte que 14 euros en broché, on peut souligner l'effort) en quelques jours et l'amoureux de littérature indépendante US que je suis en est sorti ravi. Univers divers, écritures riches et prometteuses, personnages marquants et histoires fascinantes peuplent un ouvrage cohérent et vraiment poignant par moment. Un recueil à lire absolument si vous êtes amateur de nouvelles et de voyages au coeur des USA.

Critiques d'autres ouvrages d'auteurs présents dans ce volume :
- Cataract city de Craig Davidson
- Toute la lumière que nous ne pouvons voir de Anthony Doerr
- Le Pique nique des orphelins de Louise Erdrich
- La Malédiction des colombes de Louise Erdrich
- Love medecine de Louise Erdrich
- Le Paradis des animaux de David James Poissant

dimanche 3 mai 2015

Récidive quand tu nous tiens !

Non! Emaüs n'a pas encore frappé! J'y suis persona non grata jusqu'à au moins juillet pour éviter les craquages intempestifs... Malheureusement, mauvais temps oblige, nous nous sommes retrouvé à errer Nelfe et moi du côté de la zone commerciale du coin ce samedi et patatra! Troc.com est mon bourreau du jour avec un rayon livre très bien achalandé et qui m'a fait craquer... C'est ma faute, ma très grande faute! C'est terrible d'avoir aussi peu de volonté, je ne suis pas pour autant ruiné, n'ayant déboursé que la modeste somme de 12 euros pour cet ensemble. Il y a des passions bien plus onéreuses! 

Roulement de tambour, voici les nouvelles pièces adoptées!

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 - Pandora d'Anne Rice. Vampire et Rome antique avec cet ouvrage de l'auteur d'Entretien avec un vampire que j'avais adoré lors de ma lecture. Il était temps de replonger dans cette écriture virevoltante et évocatrice à souhait. Bien bien hâte de m'y remettre!

- La Dormeuse en rouge d'Andrea H. Japp. La quatrième de couverture m'a de suite attiré avec cette histoire de tyran domestique faisant vivre un enfer à ses proches et qui risque d'avoir des surprises! L'auteur a très bonne réputation, je vais donc tenter l'aventure!

- Vortex de Clive Cussler. Là, je suis obligé de balancer! C'est Nelfe qui me l'a mis entre les mains, je l'avais zappé dans le rayonnage et elle me l'a montré me confiant qu'il pourrait me plaire. Un aventurier, une antique île engloutie et des navires qui disparaissent... Pas de doute, c'était pour moi! Destinés, on était tous les deux destinés...

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- L'Utopie de Thomas More. Déjà lu dans le cadre de mes études d'Histoire, je ne l'avais pas dans notre bibliothèque. C'est l'occasion de le relire cette fois-ci pour le plaisir et avec mes 16 ans de plus. Je pense que je vais encore plus l'apprécier (et du coup déprimer quand à la conduite de notre monde actuel -sic-).

- Jusqu'à l'aube d'Albrecht Goes. Pendant la Seconde Guerre mondiale, pour sa dernière nuit, un déserteur allemand condamné à mort va parler avec un pasteur de la vie, de l'amour et de la mort. Je m'attends à un roman profond et puissant, il va être mis dans la colonne des ouvrages prioritaires!

Journal d'un corps de Daniel Pennac. J'adore cet auteur et j'ai eu la chance de tomber sur ce livre de 2012 en édition brochée de chez Gallimard! Il s'agit ici d'un journal intime basé sur le corps de celui qui le tient. Les quelques passages que j'ai pu lire m'ont fait grand effet, pas de possibilité donc de résister!

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- Le Chateau cannibale de Laurent Genefort. J'aime beaucoup les deux livres que j'ai pu lire de cet auteur qui s'était révélé charmant lors de notre rencontre lors des Utopiales 2014. Il est ici question d'aventure et de fantasy arabesque qui sentent bon la bonne vieille série B littéraire. Un bon divertissement en perspective! 

- Simulacres de Philip K. Dick. Un livre de mon auteur de SF favori que je n'ai pas encore lu! Je n'hésitai pas une seconde pour acquérir cette histoire de monde futuriste en pleine décadence où la réalité et l'illusion se mêlent sans distinction possible. On peut compter sur la logique paranoïaque de K. Dick pour nous livrer un grand moment de littérature! Bien hâte de lire celui-ci aussi!

- Le Pistolero de Stephen King. On peut dire que j'ai écumé le King étant ado et je m'en suis lassé. Bizarrement, je suis toujours passé à côté de son oeuvre plus fantasy. Il était temps de régler ce problème et ce premier volume de la saga mettant en scène Roland Pistolero me tendait ses petites pages... Verdict dans les mois à venir!

- En remorquant Jehovah de James Morrow. Coup de poker de ma sélection, l'histoire est complètement barrée comme je les aime. Dieu est mort et ses anges chargent un capitaine de navire de remorquer son corps de 3 km de long jusqu'en Arctique pour qu'il repose dans un tombeau construit à sa mesure. Mais voila, écologistes, féministes et même le Vatican ne voient pas les choses de la même manière... Étrange, vous avez dit étrange? Wait and see...

- Le Futur a déjà commencé, anthologie. Ce livre est une émanation du festival Étonnant voyageur de Saint Malo (que l'on loupe cette année par manque de préparation! Grrr!), on y retrouve de grands noms de la SF dont Norman Spinrad et Ayerdhal notamment qui à travers des nouvelles de SF qui parlent de nous, du monde autour de nous qui change et qui nous change. Tout un programme!

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- T'ien keou de Genfort et Ponzio. Et de deux pour Genefort dans ma sélection avec cette BD de SF aux dessins bien léchés dont l'action se déroule dans un futur lointain où l'homme a débuté son exploration de l'espace. Je ne suis pas forcément fan des éditions Soleil mais la présence de cet auteur de talent au scénario m'a fait franchir le rubicon. Gageons que je ne me sois pas trompé! 

- Wolff et Byrd, avocats du macabre de Batton Lash. Pour les habitués du blog, vous savez que je suis un grand fan de BD d'horreur type 60' et 70' comme les anthologies Creepy, le dessinateur Richard Corben ou encore récemment le recueil consacré à Lovecraft par Horacio lalia. On retrouve dans cette BD le même style de dessin et un postulat plutôt fun: un cabinet d'avocats se spécialise dans la défense de monstres et d'entitées, le ton navigue entre humour et effets macabres. Ca promet!

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Voila, voila! Y'a plus qu'à! Ma PAL qui avait quelque peu baissé retrouve son niveau d'il y a un mois. La tentation était trop forte... Reste beaucoup d'heures de plaisir multiforme en perspective qui me font saliver d'avance! Quant à Nelfe, elle est la Raison incarnée puisqu'elle n'a pas craqué du tout cette fois ci. Bravo!

dimanche 12 janvier 2014

Anthologie Creepy, volumes 1 et 2 - Collectif

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L'histoire: Le magazine Creepy, créé par Jim Warren au début des années 1960, a révolutionné le monde de la bande dessinée. Servi par une équipe d'artistes exceptionnels dont Frank Frazetta, Gene Colan, Steve Ditko, Wallace Wood, Alex Toth, Neal Adams ou Reed Crandall, il a atteint des sommets artistiques inégalés, redéfinissant les codes de la BD fantastique et d'épouvante.
Pendant plus de vingt ans, aucune autre publication n'est allée aussi loin dans la création et l'exploration d'univers imaginaires. Dans l'esprit des classiques littéraires d'Edgar Allan Poe ou de Bram Stoker, et dans la mouvance des fleurons du cinéma fantastique produits par les studios Universal ou par la Hammer, l'oeuvre des artistes ayant signé les pages de ce magazine culte est restée résolument moderne.

La critique de Mr K: C'est avec une joie sans borne qu'il y a quelques mois j'ai fait la découverte par hasard de la maison d'édition Delirium. Grand amateur des Tales from the crypt en BD et en série télévisée, ils rééditent enfin le magazine Creepy (ou du moins les meilleurs récits) et ce mensuel culte a enfin sa place au rayon des librairies françaises. Je n'en avais pour l'instant qu'un seul exemplaire, acheté en version espagnole il y a déjà un petit bout de temps dans les Asturies lors d'un voyage scolaire au lycée! J'ai donc craqué et acheté les deux premiers volumes sortis en France. De biens beaux objets qui témoignent du soucis de proposer une réédition à la hauteur de la qualité des originaux.

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(clic sur les planches pour voir en plus grand)

J'adore le genre fantastique et encore plus sous la forme de nouvelles ou d'historiettes en BD. Dans ces deux volumes, on croise nombre de créatures du panthéon classique: vampires, momies, zombies, sorciers vaudous, hommes bêtes de tout poil (héhé!)... Mais c'est ici aussi l'occasion de croiser des êtres humains sans scrupules qui nous jouent là des scènes terribles et quotidiennes: les amants lassés, la quête d'un héritage par tous les moyens, l'appât du gain au détriment de la morale, le culte de l'apparence, l'orgueil mis à l'épreuve et tout un panel de situations types merveilleusement détournées et griffées de la marque de l'oncle Creepy, narrateur régulier des effroyables histoires qui nous sont livrées ici. Les récits et les twist finaux s'enchainent et ne laissent aucun répit au lecteur. On côtoie aussi à l'occasion la SF ou encore le roman noir, montrant par là-même la diversité des inspirations et la grande ouverture d'esprit qui soufflait au sein de la rédaction.

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Pour l'aspect visuel, le noir et blanc est ici de rigueur et colle remarquablement aux thèmes abordés. On passe de récit en récit, tout en changeant de scénariste et de dessinateur d'où une impression de voyage et de changement. Bien qu'assez éloignés les uns des autres parfois, les dessinateurs font mouche à chaque fois, suspens et noirceur extrêmes sont au rendez-vous et la mise en image des classiques de Poe et consorts sont à la hauteur des textes originaux. Rajoutez à cela quelques Lugubres légendes de Creepy consacrées aux grands monstres du fantastique mis en image par Frazetta et l'on frôle l'extase!

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(ici en VO)

En plus des récits compilés, des pages supplémentaires sont consacrées à l'histoire du magazine, aux auteurs et dessinateurs, les tensions et pressions autour de la parution d'une revue ne faisant pas l'unanimité. Autre temps, autres mœurs... Le tout est remarquablement documenté et agencé. Cela permet une douce plongée dans les arrières cuisines de l'édition et de la création de l'époque. Tout ne se fit pas sans heurts mais le résultat est là et intemporel. Aujourd'hui, de jeunes passionnés pourront se plonger avec délice dans ces histoires qui ont traversé les décennies mais n'ont pas du tout pris de rides.

Une bien belle lecture que tous les amateurs du genre se doivent d'avoir effectuée. Vous voilà prévenus!

jeudi 5 décembre 2013

"Vies tranchées: Les soldats fous de la Grande Guerre" - Oeuvres collective

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L'histoire: La guerre est-elle cause de folie chez les soldats? Qui aujourd'hui ne répondrait pas oui à cette question? Mais lors de la Première Guerre mondiale, il en allait tout autrement.

Grâce à des documents d'époque inédits, redécouverts à Ville-Évrard par Hubert Bieser (historien en santé mentale), Vies tranchées retrace le parcours d'une quinzaine d'hommes, oscillant entre champs de bataille et asile psychiatrique. Dans ces pages d'un réalisme saisissant, vous vivrez les cauchemars de Jean Marie G., les hallucinations de Baptistin B., la dépression et la mutilation de Gabriel C., ou encore l'étrange destin de Louis N. que l'on hospitalise pour confusion mentale, et que l'on finit par condamner comme anarchiste...

Enfin se lèvela chape de plomb qui s'est abattue, durant leur vie et bien au-delà, sur ces victimes méconnues.

La critique de Mr K: Voici un ouvrage très précieux pour la mémoire collective. On a beaucoup parlé de la Grande Guerre en focalisant sur les tenants et les aboutissants, sur la guerre de tranchées en elle-même, sur les généraux qui l'ont mené et qui ont donné leurs noms à nombre de rues de nos villes. Mais jusqu'à maintenant, jamais on avait traité le cas des soldats que la guerre a fait basculer dans la folie et la psychose. Certes, on avait pu les apercevoir dans certaines œuvres comme l'excellent Croix de bois de Roland Dorgelès ou encore le classique de Kubrick Les sentiers de la Gloire (et encore, là les allusions sont très légères). Mais jamais finalement, un ouvrage n'avait été consacré à ces hommes revenus fous du front. C'est aujourd'hui chose faite depuis fin 2010 avec la parution de cette BD chez Delcourt, fruit du travail acharné d'Hubert Bieser (historien) et de sa collaboration avec une pléthore de dessinateurs et scénaristes. Désolé, ce serait trop long de tous les citer!

Le principe de cet ouvrage est très simple. A travers de micro-récits, on suit le parcours d'une quinzaine de soldats traumatisés par la guerre. A chaque fois ou presque, le dessinateur change, ce qui donne une certaine variété dans l'esthétique de cette BD. Le fil conducteur reste le même mais l'évocation de l'horreur de la guerre suit la sensibilité des différents artistes qui se succèdent tout au long des pages. S'intercale entre ces cas particuliers, un récit concernant l'histoire de l'asile qui permet de se faire une idée plus précise des conditions de placements des aliénés et l'idéologie dominante de l'époque en matière de psychiatrie. Très vite, on se rend compte qu'une grande suspicion entoure ces malades d'un genre nouveau que l'on prend bien souvent pour des simulateurs qui cherchent à déserter.

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(cliquer sur l'image pour l'agrandir)

La plupart des cas évoqués dans ces pages sont des hommes simples, issus de milieux modestes, cela rend d'autant plus ces récits poignants tant il semble que l'innocence semble profanée. Partis la fleur au fusil, ils reviennent choqués et à jamais transfigurés du front. Le vacarme assourdissant des obus, les cadavres pourrissants de leurs copains à leurs pieds, les épidémies et les infections, les mutilations, le froid, la faim... de ce chaos indescriptible (ou presque...) nait la folie et le dégoût. Arrivés à l'hôpital psychiatrique commence la lente reconstruction (si elle est encore possible) et la confrontation avec des administratifs bien souvent septiques et incompétents, qui ne mesurent aucunement le degré d'horreur et d'épouvante que pouvait atteindre l'existence du poilu, dans cette guerre d'un genre nouveau s'apparentant à une boucherie sans précédent en matière historique.

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(cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Cela donne une oeuvre âpre, uniquement basée sur le témoignage et la vérité. Les images et les mots cinglent le lecteur comme autant de coups de fouets qui transpercent l'âme tant le voyage est éprouvant. La mort côtoie bien souvent la folie, et ses êtres semblent errer dans les limbes d'un inconscient peuplé de monstres et d'images indélébiles. Incapables bien souvent d'expliquer leur glissement dans la folie, réduits à l'état de loque humaine, ces êtres n'ont plus d'humains que leur nature physique tant leur esprit est irrémédiablement marqué au fer rouge de la violence et de l'absurdité. Je dois avouer que je suis ressorti tout chamboulé de cette lecture, étant moi-même féru de cette guerre méconnue et devant chaque année transmettre un petit bout d'histoire aux jeunes pousses qui me sont confiées.

Très belle découverte donc pour moi, à la fois dure et nécessaire, une pierre angulaire en tout cas dans le devoir de mémoire qui doit être consacré à cette période sombre de notre Histoire commune.

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