dimanche 7 juin 2015

Craquage de juin, craquage bien vilain!

On s'était dit avec Nelfe qu'on ne retournerait pas à Emaus avant la fin de l'été histoire de faire bien descendre nos PAL respectives. J'entends déjà ricaner nos lecteurs les plus assidus (qui connaissent nos craquages successifs et réguliers...) mais je vous jure que ce n'était pas gagné car en rentrant dans les lieux, nous avons discuté avec le responsable du rayon livre qui nous a dit que quelques bouquinistes rennais étaient passés tôt ce matin et qu'ils avaient fait la razzia sur ce qu'il jugeait être les livres les plus intéressants. C'est donc plutôt confiants que nous avons commencé à explorer les multiples bacs de cet antre de l'Enfer (pardon l'abbé!)... Jugez plutôt le résultat.

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Ben oui... On a bien craqué et pour une fois, pas que moi! Nelfe a eu aussi son lot de coups de coeurs. Voici maintenant la petite liste traditionnelle de nos acquisitions qui vont aller rejoindre nos futures lectures.

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Les acquisitions de Mr K:

 

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- Une Porte sur l'éther de Laurent Généfort: un récit de SF d'un auteur que j'affectionne tout particulièrement, deux planètes reliées par un gigantesque tube de diamant voient leur existence menacée par les haines réciproques que se vouent les habitants des deux mondes. N'ayant jamais été déçu par Génefort, je m'attends à un bon roman d'aventure SF.

- Le Chien de guerre et la douleur du monde de Michael Moorcock. Là encore un auteur que j'aime beaucoup avec une histoire de Dark fantasy se déroulant dans une Allemagne moyen-âgeuse fantasmée où un mercenaire sans âme va signer un pacte avec Lucifer en personne. Tout un programme en perspective! J'ai hâte d'y être!

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- Versus d'Antoine Chainas. La quatrième de couverture m'a fasciné: un personnage principal responsable de la brigade des mineurs coure après un tueur de pédophiles qui les enterre près de leurs victimes. Salué par la critique, ce roman a l'air bien hardboiled dans le genre. Qui lira, verra!

- La Machine de René Belletto. J'ai adoré l'adaptation de ce roman avec Depardieu et Bourdon. Deux hommes (un psychiatre et un dangereux sociopathe) vont échanger leurs esprits pour une expérience flirtant avec les frontières de la morale. Si le roman est aussi réussi ça promet!

- La Femme du monstre de Jacques Expert. Nelfe avait bien aimé sa lecture de Qui? du même auteur et cette histoire de femme ayant vécu avec un homme sans vraiment le connaître m'a interpellé. Wait and see!

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- Mr Vertigo de Paul Auster. Je ne peux pas dire non à cet auteur et cette histoire a tout pour me plaire: un jeune garçon élevé à la dure, l'Amérique de la Grande Dépression, le jazz, les lois raciales et la mafia. Le tout écrit par un maître de l'écriture... il me tarde d'y être!

- Un Léopard sur le garrot de Jean-Christophe Rufin. J'aime beaucoup Rufin et ce livre sera un peu différent de d'habitude car il s'agit d'un livre-témoignage sur trente ans de sa vie. Médecine, voyages, humanitaire, relations internationales sont au coeur de cette vie trépidante que je découvrirai dans les prochains mois.

- Autres chroniques de San Francisco et Bye-bye Barbary Lane d'Armistead Maupin. Il s'agit des épisodes 3 et 6 des fameuses Chroniques de cet auteur à la renommée internationale. J'ai lu les 5 premiers tomes il y a déjà bien longtemps et il parait qu'il y en a 9! N'en ayant aucun à la maison, je décide donc de les acheter d'occasion au petit bonheur la chance. Quand la collection sera complète, je replongerai avec délice dans un univers qui m'avait séduit par son humanité et son aspect délirant.

- Les Accompagnements raisonnables de Jean-Paul Dubois. Encore un auteur qu'on adore au Capharnaüm éclairé et ce roman nous avait échappé jusqu'ici! L'occasion était trop belle et c'est avec une certaine impatience que j'attends de pouvoir me plonger dans cette histoire de couple battant de l'aile et d'un mari perdu qui va rencontrer le sosie de sa femme (avec 30 ans de moins...).

- Au sud de la frontière, à l'ouest du soleil et Danse, danse, danse de Haruki Murakami. Mon chouchou!!! Impossible de dire non et ces deux romans manquent à ma collection. Roooooooooo! Trop bien! Amour, destin, nostalgie... Beau programme en perspective!

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- Corpus Christine de Max Monnehay. Gros coup de poker avec la seule lecture de 12 lignes énigmatiques en dos de livre! Ca a l'air complètement barré et j'adore le titre! Le temps me dira si j'ai eu raison de craquer pour celui-ci!

- La Rêveuse d'Ostende d'Eric-Emmanuel Schmitt. Là encore, impossible de résister à cet auteur ensorcelant et jamais décevant. Il est ici question d'amour, d'exil et de rencontre étonnante. J'en salive d'avance!

- L'Équation africaine de Yasmina Khadra. Je viens juste de finir Les hirondelles de Kaboul que j'ai adoré (chronique à suivre dans les semaines à venir). On peut faire confiance à l'auteur pour mêler suspens, prise de position et regard unique sur notre monde si terrifiant par moment. Ce sera cette fois-ci un voyage en Afrique orientale aux pays des pirates des temps modernes et des islamistes où un occidental va être aux prises avec une violence devenue monnaie courante.

- Saules aveugles, femme endormie de Haruki Murakami. Oui, un fou (ou une folle d'ailleurs!) a lâché ses Murakami dans la nature! Je suis bien content d'être passé par là à ce moment là! Il s'agit ici d'un recueil de nouvelles courtes qui promet-on oscillent entre jubilation, flamboyance et récits hypnotiques! Re-roooooooooooo!

- Les Tendres plaintes de Yoko Ogawa. Une femme bafouée par son mari va se réfugier dans la montagne et va y rencontre quelqu'un qui va changer le cours de sa vie. Ca sent bon le roman contemplatif et zen à la japonaise! Tout ce que j'aime!

- Le Sermon sur la chute de Rome de Jérôme Ferrari. Prix Goncourt 2012, c'est l'occasion de vérifier tous les éloges que j'ai pu entendre sur son compte par certains collègues de travail et sur diverses chroniques de blog. Coup de poker là aussi!

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- Un Vague souvenir de Plantu. Dernier ouvrage chiné pour ma part, ce recueil de dessins de Plantu que je chronique régulièrement au fil des années et de mes trouvailles. Il s'agit ici du crû de 1990 avec un bon trip revival en perspective!

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Les acquisitions de Nelfe:

 

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- Charlotte de David Foenkinos, Le Prix Renaudot 2014 d'occaz, ça ne se refuse pas !

- Les Désarrois de Ned Allen de Douglas Kennedy parce que de l'auteur, je n'ai lu que "Cul de sac" (que j'ai adoré mais complètement différent de ses autres romans). Celui ci me permettra de faire une petite incursion dans sa bibliographie. On verra bien si j'adhère au style du monsieur.

- Le Seigneur de Bombay de Vikram Chandra : Une belle brique en or ! Une quatrième de couverture accrocheuse. J'espère qu'il me plaira parce que j'en ai pour plus de 1000 pages.

- Les Spellman se déchaînent de Lisa Lutz, je continue la saga doucement...

- Paris la nuit de Jérémie Guez parce que j'avais adoré "Balancé dans les cordes" tout simplement.

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Bon je vous l'accorde au final Nelfe est bien plus raisonnable que moi mais vous le saviez déjà avant de découvrir l'ampleur des dégâts! Deux conclusions s'imposent: les bouquinistes n'ont pas forcément bon goûts (ou ils avaient déjà ces livres en réserve) et nos PAL sont définitivement trop remplies! Que de plaisir en perspective en tout cas! D'ailleurs, je m'empresse de vous quitter pour retourner bouquiner!


mardi 21 avril 2015

"La Belgariade" de David Eddings

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L'histoire: Et les dieux créèrent l'homme, et chaque dieu choisit son peuple. Ah! Que le monde était jeune, que les mystères étaient limpides! Mais Torak, le dieu jaloux, vola l'orbe d'Aldur, le joyau vivant façonné par l'aîné des dieux, et ce fut la guerre. Le félon fut châtié; à Cthol Mishrak, la Cité de la Nuit, il dort toujours d'un long sommeil hanté par la souffrance. Le fleuve des siècles a passé sur les royaumes du Ponant. Les livres des présages ne parlent plus qu'aux initiés, mais ils sont formels: Torak va s'éveiller. Et justement l'Orbe disparaît pour la seconde fois. Que le maudit la trouve à son réveil et il établira son empire sur toute choses. Belgarath le sorcier parviendra-t-il à conjurer le sort? Dans cette partie d'échecs cosmique, il a réussi à préserver une pièce maîtresse: le dernier descendant des gardiens de l'Orbe, désigné par les présages, mais qui n'est encore qu'un petit garçon jeté sur les routes par une venteuse nuit d'automne. Un simple pion, et si vulnérable…

La critique de Mr K: Chronique un peu particulière aujourd'hui avec un cycle entier lu durant nos dernières vacances en Thaïlande lors des escales prolongées en aéroports moyen-orientaux ou encore sur le sable de plages paradisiaques du sud-est asiatique. J'avais dégoté à un prix défiant toute concurrence La Belgariade ainsi que sa suite La Mallorée lors d'une énième escapade chineuse. Belle intuition que fut la mienne en achetant cette décalogie tant cette première partie s'est révélée à la fois dense en terme de rebondissements et dotée de qualités scripturales indéniables procurant un bon plaisir de lecture.

La Belgariade compte cinq romans:

- Le Pion blanc des présages
- La Reine des sortilèges
- Le Gambit du magicien
- La Tour des maléfices
- La Fin de partie de l'enchanteur

À la base de cette épopée fabuleuse, une prophétie annonçant le retour d'un dieu fou et mégalomane. Pour l'arrêter, un être innocent issu d'une dynastie disparue depuis fort longtemps. Je vous l'accorde rien de particulièrement innovateur dans le pitch de départ mais n'oublions pas que nous sommes dans le genre fantasy qui n’est pas réputé pour son originalité de manière générale. Le jeune Garion se retrouve très vite plongé dans une aventure à nulle autre pareille pour l'assistant de cuisine qu'il était jusque là. Commence alors le long chemin vers l'âge adulte avec son lot de désillusions et de révélations. Il devra accepter ce qu'il est, dompter les pouvoirs enfouis qui dorment en lui et accomplir sa destinée qui est peu commune.

Pour mener à bien cette quête, il va s'entourer de personnages hauts en couleurs qui vont chacun à leur manière l'aider: sa tante Pol qui cache bien des secrets, le conteur Belgarath qui s'avère être un sorcier pluri-millénaire, un marchand-voyageur à la gouaille inextinguible, une princesse incendiaire au charme fou, un forgeron à l'âme pure comme le cristal, un fanatique passe-muraille, une voix intérieure à la fois impérieuse et bienveillante et bien d'autres encore… dont un homme parlant aux chevaux, une montagne de muscle au cœur d'or, un archer juvénile et niais, ou encore un chevalier sans peur et sans reproche assailli par le doute. Sacré équipe qui aura fort à faire aux forces du Mal.

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Mais que de circonvolutions scénaristiques avant d'arriver à l'acte final! Une carte est fournie avec chaque volume ce qui n'est pas plus mal, vu le chemin parcouru par les protagonistes. Un peu à, la manière du Seigneur des anneaux ou encore la saga du Trône de fer, le lecteur se plaît à suivre le parcours des héros à travers monts et vallées, marécages spongieux, plaines arides, côtes sauvages et inhospitalières, souterrains secrets, villes tentaculaires… On partage notre temps entre évocation de souvenirs, récit de voyage pur (on en visite des auberges, lieu obligé dans le genre!) et moultes périls affrontés. On croise beaucoup d'êtres humains vivants selon des croyances et des coutumes bien différentes selon le dieu qu'ils servent (Arendais, Marags, Sendariens et consorts). Cela donne lieu à des frictions mais aussi parfois à des rapprochements surprenants symbolisés par la communauté entourant Garion (ça flirte bon avec une certaine communauté de l'Anneau tout cela!). En face d'eux, ils affronteront nombre de périls comme une reine-serpent des plus retorse, des brigands, les Murgos ensorceleurs de Torak, les fanatiques du dieu ne reculant devant rien pour mener à bien la prophétie noire de leur dieu (des passages sont assez rock and roll!) et bien d 'autres choses que je vous laisse découvrir par vous-même.

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La tâche pourrait paraître ardue quand on voit la somme de pages que représente ce premier cycle mais il n'en fut rien. D'un accès aisé et limpide, la lecture coule d'elle-même et la mise en place est immédiate. L'auteur obtient un très bon équilibre entre descriptions et action, le tout donnant une œuvre virevoltante mais aussi parfois introspective pour certains personnages qui bien que basés sur des archétypes se nourrissent les uns les autres, tissant par là même une toile de relations réalistes et qui tiennent la route jusqu'à la fin. D'ailleurs certains passages qui pourraient sembler relever du détail prennent toute leur importance bien après. Il se dégage aussi de ces êtres une profonde humanité pour la simple et bonne raison que l'humour est ici omniprésent. Non pas à la manière d'un Terry Pratchett pratiquant avec talent l'art du pastiche, ici point de cela mais plutôt des discussions et des liens que l'on peut avoir vu et entendu autour de soi. Des remontrances de vos parents aux chicaneries entre amis, rien ne nous est épargné dans cette aventure où les actes de bravoures côtoient un quotidien relaté avec fidélité et tendresse. Drôle de mélange qui rend cette œuvre pourtant classique dans son déroulé et ses aspirations (pas de réelles surprises pour le lecteur, seul gros défaut de cette saga) très attachante et impossible à abandonner tant on est accroché par cette lecture.

Très belle incursion chez Eddings pour ma part qui se continuera cet été avec La Mallorée. Gageons que la deuxième partie soit aussi enchanteresse que la première. Avis à tous les amateurs, cette série est à lire!

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jeudi 19 février 2015

"Séquestrée" de Chevy Stevens

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L'histoire: Annie a été séquestrée.
Elle a passé douze mois en enfer dans une cabane perdue au fond de la forêt.
Annie est libre, enfin, mais les séances chez le psychologue lui font revivre chaque minute. Annie est sauve, le plus dur est derrière elle.
Du moins le croit-elle...

La critique de Mr K: Annie est une jeune agent immobilier à qui la vie semble sourire. Sa carrière professionnelle est lancée, elle s'est achetée la maison de ses rêves et elle file le parfait amour avec Luc. Tout bascule quand elle se fait enlever par un pseudo client venu visiter une maison. C'est le début d'un long calvaire pour la jeune femme qui ne réussira à s'échapper qu'un an plus tard. Le livre est divisé en chapitres correspondant chacun à une consultation chez le psy. Annie y revient sur le déroulé de sa séquestration mais aussi ce qu'elle ressent et vit depuis son retour à la liberté.

On se prend très vite d'affection pour cette jeune femme volontaire qui est loin d'avoir les deux pieds dans le même sabot et semble habitée d'une envie de résister hors du commun. Malheureusement pour elle, elle se retrouve confrontée à un psychopathe d'une rare perversité et obnubilé par sa volonté de créer une famille idéale. La séquestration est ici d'une rare intensité dans la violence (physique mais aussi moralement destructrice au plus haut point): négation de l'individu et son libre arbitre, violence et tension physique sous-jacentes, viol répété, inhumanité latente et effrayante. L'horreur ici ne se jette pas à la gueule du spectateur, elle est larvée et pénétrante au possible. Plus on avance dans le récit plus on assiste à la lente et méthodique descente aux enfers de l'héroïne qui dans un sursaut va réussir l'impossible. Cependant, le retour à la réalité n'est pas facile surtout qu'un secret effroyable lui sera révélé.

Ce livre est un excellent thriller. Je suis resté scotché du début à la fin à ce page-turner d'une redoutable efficacité. Le procédé des consultations est bien trouvé et permet de maintenir les attentes du lecteur entre curiosité et frustration. On alterne régulièrement entre les souvenirs de la détention forcée d'Annie et son ressenti actuel et ses expériences du présent. La révélation m'a cueilli je l'avoue et m'a fait froid dans le dos. Par contre, c'est vrai que l'on reste sur du classique sur le reste avec la relation spéciale qu'Annie entretient avec sa meilleure amie et Luc. Certains développement ne surprendront personne et rentre dans un moule déjà lu ou vu. Pour autant, il se dégage de ce livre une énergie folle et une profondeur psychologique de bon aloi. Les personnages vivent littéralement sous nos yeux et nous n'avons pas affaire à un énième avatar ou caricature de personnage que l'on peut parfois trouver dans ce type de production. La finesse est de mise pour le plus grand plaisir du lecteur happé par ce destin fauché qui tente de reprendre le contrôle de sa vie.

La lecture s'est donc révélée plaisante à souhait. L'écriture ne révolutionne pas le genre mais suffit à appuyer une histoire forte et prenante. On ressort ainsi assez éberlué de cette lecture à la conclusion terrible qui ne vous redonnera pas vraiment l'envie de croire au genre humain! Un petit bijou dans le genre que je vous conseille fortement.

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lundi 16 février 2015

"La Chambre des officiers" de Marc Dugain

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L'histoire: En 1914, tout sourit à Adrien, ingénieur officier. Mais, au début de la guerre, lors d'une reconnaissance sur les bords de la Meuse, un éclat d'obus le défigure. En un instant, il est devenu un monstre, une "gueule cassée".
Adrien ne connaîtra ni l'horreur des tranchées ni la boue, le froid, la peur ou les rats. Transféré au Val-de-Grâce, il rejoint une chambre réservée aux officiers. Une pièce sans miroir où l'on ne se voit que dans le regard des autres. Il y restera cinq ans. Cinq ans entre parenthèses. Cinq ans pour penser à l'avenir, à l'après-guerre, à Clémence qui l'a connu avec son visage d'ange. Cinq ans à nouer des amitiés déterminantes pour le reste de son existence...

La critique de Mr K: Retour au temps de la Grande Guerre avec La chambre des officiers de Marc Dugain trouvé par hasard dans une brocante. Il s'agit d'un premier roman qui a tout de même reçu le Prix des Libraires lors de sa sortie. De très bonne augure, avec en prime un sujet qui me passionne. À noter que je n'ai pas vu l'adaptation faite au cinéma et qui paraît-il est excellente. Si l'occasion se présente, j'y jetterai un œil même si je dois avouer qu'après ma lecture enthousiaste j'ai peur d'être déçu.

Adrien est un jeune de son temps à qui tout réussit. Il est beau, a bon caractère et a reçu une excellente éducation dans son Périgord natal. Il y a d'ailleurs de très belles pages sur ses souvenirs de cueillettes de champignons qui m'ont fait penser aux propres souvenirs de Nelfe qui comme chacun sait est pétrocorienne. Jeune officier, Adrien a terminé ses études d'ingénieur et a trouvé un travail où il exerce ses talents depuis deux mois. Mais le destin cruel va le détourner de cette réussite toute tracée. La guerre éclate et il tombe sous un éclat d'obus sans même avoir vu le moindre soldat allemand. Il est défiguré et va passer cinq années dans un hôpital, opération après opération les médecins vont essayer de lui redonner visage humain. Ce traumatisme va le changer à jamais.

Ce livre est d'une grande sensibilité et d'une grande beauté, c'est encore plus impressionnant quand on sait que c'est le tout premier de son auteur. Cette histoire lui a été inspiré par son grand-père qu'il accompagnait au château des "Gueules cassées", le domaine de Moussy-le-vieux situé à 35km au nord de Paris où les grands mutilés de la face de 14-18 venaient en convalescence entre chacune des multiples interventions chirurgicales qu'ils avaient à subir pour retrouver un semblant de visage. Adrien et l'histoire qu'il a vécu résume à lui seul le cas de ces milliers soldats mutilés qui projetaient à la face du monde l'horreur de la grande boucherie que fut la Première Guerre mondiale.

Ce livre est écrit à la première personne pendant la majeure partie du récit. Seule la dernière partie, plutôt dispensable d'ailleurs car elle raconte ce que sont advenus les différents protagonistes, est écrite à la troisième personne du singulier. Après l'accident, on émerge du noir avec Adrien et on suit ses premières sensations et sa redécouverte de son corps. Au soulagement de vérifier le bon fonctionnement de son corps, suit l'horreur et la nécessaire acceptation de son nouvel état. Il passe par une phase de dépression mais grâce à la chaleur de l'amitié naissante avec Weil, Penanster et Marguerite, il va dépasser cet état et essayer de réapprendre à vivre.

On alterne alors petites joies du quotidien, soutien mutuel, une première sortie ratée, des opérations douloureuses et pas forcément concluantes, la redécouverte de l'amour charnel, les petits plaisirs de la vie comme boire ou fumer... autant de petites étapes dans la reconstruction de l'individu. Car ces quatre là refusent de se laisser mourir et de céder au désarroi, ils veulent vivre et continuer d'exister. Et pourtant, ils auraient dix fois plus de raisons que n'importe qui de s'arrêter, de mettre fin à leur jour (on assiste à quelques suicides dans le livre)... Le ton est à la fois pesant mais optimiste. Le mélange est détonnant et rafraîchissant.

Très bien écrit, le style est simple et accessible. Il est à la portée de tous et porte un message universel, profondément humaniste qui contraste avec la douleur et l'atrocité du background. Très beau roman donc à mettre aux côtés des excellents Au revoir là-haut et Les Croix de bois. Allez-y, vous ne le regretterez pas!

lundi 12 janvier 2015

"Dark Water" de Koji Suzuki

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L'histoire: Sur le point de divorcer, Yoshimi Matsubara essaie d'obtenir la garde de sa petite fille de cinq ans. Elles vivent toutes les deux dans un vieil immeuble sombre et humide. Déjà inquiète pour son avenir, Yoshimi est hantée par d'étranges ruissellements, qui semblent presque vivants, sur les murs comme au plafond et par des apparitions obsédantes et répétées d'un petit sac rouge ayant appartenu à une fillette disparue deux ans plus tôt...

La critique de Mr K: C'est ma première incursion chez Koji Suzuki, auteur mondialement connu désormais depuis que Hideo Nakata a adapté au cinéma Ring et Dark Water, deux excellents films pour se mettre les j'tons sous la couette! Cet écrivain est comparé très souvent à Stephen King dans son pays et peut vendre ses livres au delà du million d'exemplaire! C'est dire l'ampleur du phénomène! Je suis tombé par hasard sur cet ouvrage et je m'attendais en lisant la quatrième de couverture à un roman. Il n'en est rien car il s'agit en fait d'un recueil de nouvelles!

Dans un prologue court, on suit une grand-mère qui se balade au bord de la baie de Tokyo en compagnie de sa petite fille. Cette dernière est friande d'histoires d'épouvantes et mamie en connaît beaucoup! L'auteur en relate quelques unes ici à travers 7 courts textes. Point commun entre-eux, ils ont tous un rapport avec l'eau. Le lecteur est donc parti pour une exploration des peurs les plus profondes de l'esprit japonais.

L'ouvrage commence avec la nouvelle éponyme bien connue des cinéphiles. Dans Dark Water, une mère célibataire peu sûre d'elle quant à l'éducation de sa fille fait face à des phénomènes inexpliqués des plus effrayants. Peu à peu une ambiance glauque s'installe et la menace se ressert. Qui est cette mystérieuse jeune fille qui semble hanter les lieux? Diablement efficace, cette nouvelle plante un décor très inquiétant dès les premières pages et fournit une caractérisation bien complexe des rapports mère-fille tout en se ménageant une fin plus ouverte que dans la version cinématographique. Une belle réussite!

Suit la nouvelle L'île déserte qui se déroule en deux temps. La première partie raconte une soirée entre deux amis où le narrateur rencontre la petite amie de son meilleur copain. Quelques jours plus tard, ce dernier dit l'avoir abandonnée nue et enceinte (ils sont fous ces japonais!) sur l'îlot artificiel Daiba VI situé en pleine baie de Tokyo. 15 ans plus tard, le narrateur a l'occasion d'aller l'explorer. Il va y faire une étrange rencontre... Plus classique dans son format, "à l'américaine" diront les mauvaises langues, cette nouvelle est juste efficace à défaut d'être originale, on passe tout de même un bon moment.

À fond de cale nous présente Hiroyuki un pêcheur colérique dont la femme a disparu depuis la veille. Il la recherche partout et essaie de refaire le chemin inverse de la soirée arrosée du soir précédent. La tension est prenante dès le départ et se maintient jusqu'au bout même si pour ma part j'ai deviné très vite où l'auteur voulait nous emmener. Dans Une croisière de rêve, le héros se voit proposer une petite balade en baie de Tokyo sur le yacht d'une rencontre de fortune qui lui propose une affaire. Les tractations vont vite échouer et sur le chemin du retour, le bateau s'immobilise mystérieusement. L'inquiétude fait place à la peur quand le propriétaire revenant d'une plongée sous la coque raconte ce qu'il a vu... Pas trop mal, le récit s'embourbe tout de même dans des descriptions sans réel intérêt pour le déroulé de la trame, la fin est abrupte et laisse un goût d'inachevé.

À la dérive s'apparente lui à un récit classique de vaisseau fantôme, bien ficelé, il ne réserve pas vraiment de surprise mais la tension permanente est très bien rendue et l'on passe un bon moment. Couleurs d'eau est lui un des récit les plus forts de ce recueil. Il raconte la mise en place d'une pièce de théâtre dans une ancienne discothèque désaffectée sous la férule d'un metteur en scène quelque peu excessif. Un étrange ruissellement lors de la Première du spectacle risque de tout mettre en péril... Fantastique larvé, histoire dans l'histoire, incompréhension face aux événements, cette histoire dérange, déroute et finalement ravit par un final inattendu et très fort. Une belle expérience pour ma part! La dernière nouvelle intitulée Des forêts sous la mer, raconte la mésaventure de deux spéléologues amateurs qui se retrouvent coincés sous terre suite à une prise de risque de trop... Bon récit claustrophobique qui fait écho à nos peurs enfantines du noir et de l'enfermement. Pari réussi pour l'auteur qui a réussi à me faire stresser durant une trentaine de pages de haute volée!

L'ouvrage se termine sur un épilogue où la grand mère nous livre quelques clefs des histoires qu'elle a raconté auparavant, la boucle est bouclée et le spectateur ressort un peu chamboulé de cette lecture.

Le style est différent de toutes les autres lectures nippones que j'ai pu pratiquer auparavant. Moins poétique en tout cas et beaucoup plus occidentale dans la syntaxe et la façon d'amener les éléments des récits. Reste cependant des références et des réactions typiquement asiatiques qui raviront les amateurs. Pour ma part, j'ai lu ce recueil très vite et avec plaisir sans pour autant pouvoir crier au génie tant j'ai pu lire dans le genre des auteurs virtuoses.

Reste cependant un recueil à découvrir pour se faire quelques frayeurs aux senteurs d'ailleurs!


mardi 6 janvier 2015

Premier craquage de 2015

Sous couvert d'accompagner Nelfe dans la découverte d'un magasin de tissu (le papa Noël lui a offert une machine à coudre dont elle vous parlera dans un futur post), j'avais en fait ourdi un plan lourd de conséquence pour ma PAL. Pourquoi ne pas profiter de la nouvelle année pour aller chiner quelque peu dans des brocantes de la région? Ce qui devait arriver arriva! J'ai une fois de plus cédé à la tentation, Nelfe dans une bien moindre mesure...

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- Étoiles, Garde à vous de Robert A. Heinlein. J'ai adoré le film de Verhoeren Starship Trooper qui est tiré de ce roman, je m'attends à une belle dénonciation de l'autoritarisme militaire. Je suis en plein dedans et je ne suis pas du tout déçu. Chronique à suivre dans le mois (j'en ai dix autres déjà prêtes à poster!).

- Le Survivant de James Herbert. Le pitch est vraiment intrigant avec cet ultime rescapé d'un crash aérien cherchant à savoir pourquoi lui s'en est sorti et pas les autres... J'avais aimé La Trilogie des Rats du même auteur, gageons que celui-ci soit aussi réussi en terme de suspens.

- L'armure de vengeance de Serge Brussolo. Mon amour pour Brussolo n'est plus à prouver, il retourne ici au Moyen-âge avec une étrange armure mue par une volonté propre! Polar, fantastique, le tout mâtiné d'un background médiéval, la recette semble bonne!

- Cette nuit-là de Linwood Barclay. Recommandé par Michaël Connelly lui-même, à priori il s'agit d'un thriller page-turner efficace où il est question de la disparition de la famille d'une jeune fille partie fait le mur pour une soirée. À voir!

- Le Rocher de Tanios d'Amin Maalouf, prix Goncourt 1993 de mémoire. À priori un excellent livre entre aventure et intimisme. J'ai hâte de le lire!

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- La Pentalogie de la Belgariade de David Eddings. À 50 centimes la pièce, difficile de résister surtout qu'il est précédé d'éloges très flatteurs chez tous les amateurs du genre fantasy peu représenté dans ma PAL (bon, on cherche les excuses qu'on peut!). Je pense les amener tous les cinq en Asie du sud-est d'ici peu, on aura une longue escale de 14h à Abu Dhabi sur le retour et des moments de farniente en prévision. À raison de 1kg au total, ça ne pèse pas trop lourd dans les bagages!

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- La Pentalogie de la Mallorée de David Eddings. Vous l'avez compris, il y a un ou une grande fan d'Eddings qui a lâché son stock dans la région. Ce deuxième cycle fait suite à celui précédemment évoqué, vu le prix je décidai de doubler la mise. On est des oufs et on n'a peur de rien!

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- Le DVD de Enter the Voïd de Gaspard Noë. Mon grand regret de 2010 en matière de cinéma: ne pas avoir pu aller le voir! Il parait qu'il est cultissime, j'aime le bonhomme, sa filmographie, sa technique et son esprit frondeur. Visionnage prévu ce vendredi avec Nelfe et mon plus vieil ami. Ca va dépoter!

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- Mémé de Philippe Torreton. Vous vous rappelez? Nelfe m'accompagnait et elle aussi a craqué... Ce livre lui a fait de l'oeil dès sa sortie en librairie, le hasard lui a permis de l'acquérir à prix modique! Elle s'attend à beaucoup pleurer, rassurez-vous je serai là pour la consoler!

Bonne pioche donc que cette expédition de début d'année qui s'est avérée fructueuse en terme d'acquisitions et riche en promesses d'évasion. Y'a plus qu'à!

mercredi 10 décembre 2014

"Tout ce qui meurt" de John Connolly

Tt ce qui meurtL'histoire : Charlie Parker, un flic new-yorkais qu'on surnomme Bird, est parti se souler après une dispute avec sa femme, un soir de décembre. En rentrant chez lui, titubant, Bird ne sait pas encore qu'il vient de franchir pour longtemps la porte de l'enfer : dans la cuisine, maculée de sang, gisent les corps atrocement mutilés de sa femme Susan et de sa fille Jennifer. Rongé par la culpabilité, Bird démissionne de la police et part sur les traces du monstrueux assassin.
De New York à La Nouvelle-Orléans, il suit celui qu'on appelle le Voyageur, fin stratège et amateur de poésie macabre qui sème derrière lui des cadavres, comme autant d'appâts. La traque mène alors les deux hommes dans les bayous de Louisiane, qui digèrent lentement les victimes écorchées du Voyageur...

La critique Nelfesque : Je connaissais John Connolly (à ne pas confondre avec Michael Connelly) pour son excellent livre jeunesse "Le Livre des Choses Perdues". Pourtant adepte de littérature policière, je ne savais même pas que ce même auteur avaient écrit des dizaines de romans dans ce genre là. Honte à moi ! C'est lors d'une discussion avec Xavier Mauméjean à la dernière édition des Utopiales que je décidais de découvrir cette autre facette de l'auteur. Il m'a tellement vanté cette saga "Charlie Parker", dont "Tout ce qui meurt" est le premier d'une longue série, que je n'ai pas pu résister longtemps.

A la lecture de ce tout premier roman je me dis que j'aurai peut être dû... L'histoire a pourtant tout pour me plaire : une découverte traumatisante et gore à souhait, un serial killer affublé d'un petit nom qui sème la peur et la désolation partout où il passe, un héros ancien flic cassé, une enquête à la Nouvelle-Orléans qui fleure bon le vaudou. On est pile poil dans le stéréotype du thriller page turner que j'adore lire pour passer un bon moment. Je suis comme ça moi, je passe des bons moments avec des personnages littéraires peu recommandables! S'il vous plaît, n'appellez pas les urgences psychiatriques tout de suite...

"Tout ce qui meurt" commence plutôt bien. On rentre très vite dans le vif du sujet avec la découverte des corps de Susan et Jennifer dès les premières pages. Connolly ne s'encombre pas de détails et ne tourne pas autour du pot. C'est efficace et j'aime ça ! Malheureusement assez vite, je comprends que je vais compter les heures avec ce roman qui sera sans doute beaucoup plus fastidieux à lire que ce que j'avais pressenti au départ.

L'auteur nous présente un nouveau personnage, puis un autre, puis un autre, encore un autre, 3 ou 4 par ci, une bande de malfrats par là... Et peu à peu on se noie dans une kyrielle de personnages et on en oublie presque qui est qui. Mieux vaut être concentré lors de sa lecture car Connolly nous présente au détour des pages des policiers de plusieurs états mais aussi deux familles adeptes du grand banditisme. Perso, j'en ai perdu mon latin... Rajoutant à cela que peu enthousiaste avec ma lecture j'ai passé plusieurs jours dessus, j'ai sorti les rames et j'ai failli prendre l'eau.

Ce roman date de 1998 et peut-être qu'en son temps il a eu un bel accueil mais aujourd'hui tant de bons bouquins sont sortis dans ce genre de littérature et sur des thèmes similaires (je vous laisse piocher dans la rubrique thriller du blog), que si je notais mes lectures je ne mettrais à "Tout ce qui meurt" qu'une petite moyenne. De facture classique, je n'ai pas eu de réelles surprises à la lecture de ce roman. Les personnages sont caricaturaux, l'histoire est cousue de fil blanc et la fin bien que sympathique aurait pour le coup méritée d'être plus longue.

Loin de moi l'idée de dire que cet ouvrage est mauvais, il est "sympathique" mais dans le genre j'ai lu 1.000 fois mieux. Dommage... Je vais tout de même continuer cette saga à l'occasion. Non pas que je sois maso mais vu ce que m'en a dit Mauméjean, son enthousiasme pour cette série et le fil conducteur sous-jacent, j'ai fortement envie de voir où tout cela va mener le lecteur. Même si pour cela il faut passer par quelques déconvenues...

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dimanche 19 octobre 2014

"Le Jeu du jugement" de Bernard Taylor

le jeu du jugement

L'histoire: Pourquoi maman et papa ne s'aiment-ils plus? Pourquoi faut-il qu'on vive avec papa? Il est super-gentil, mais vraiment on ne peut pas sentir Netta.
Et qu'est-ce qu'on s'ennuie à la campagne! Papa nous y a emmenés parce qu'il voudrait qu'on aime notre nouvelle maman, cette horreur de Netta.
Aujourd'hui papa est parti voir grand-mère et, dans la maison, il n'y a plus que Netta et nous quatre les enfants.
Netta va être tellement surprise quand on va lui parler du jeu qu'on a imaginé. Qu'est-ce qu'ils sont mignons, va-t-elle penser. Mais c'est pas du tout un jeu, c'est sérieux...

La critique de Mr K: Fruit d'un craquage récent, Le Jeu du jugement m'avait interpelé par sa quatrième de couverture intrigante, diffusant un malaise profond et lourd en promesses cauchemardesques. J'étais loin de la vérité tant on s'abime ici dans les tréfonds d'âmes torturés de personnages plus branques les uns que les autres et les méfaits de dysfonctionnements familiaux chroniques. Prenez votre respiration, on plonge en Enfer!

Robert vit désormais seul avec ses quatre enfants (Kester, Michaël, Ben et Daisy) dont il a obtenu la garde suite aux déficiences criantes de son ex épouse dans l'éducation de sa progéniture (la maman est vraiment barrée et a lâché sa famille du jour au lendemain pour partir s'éclater!). Pour autant, il ne veut pas les priver de leur mère et régulièrement, essentiellement les deux aînés, les enfants passent du temps avec elle. Il ne sait pas que cette dernière vit le rêve de pouvoir réunir la famille comme avant et manipule les esprits de Kester et Michaël. Le père de famille, prof d'anglais vit une nouvelle histoire d'amour avec Netta une collègue du lycée où il travaille. Il ne rêve que d'une chose: créer une nouvelle famille où sa nouvelle fiancée soit acceptée par ses mômes. Il est loin de se douter de la tournure que les événements vont prendre!

Tout commence par un premier chapitre où les deux aînés s'amusent à torturer une colonie de chenilles. Effet garanti, on se dit de suite qu'ils ne sont pas nets! Puis, la pression monte peu à peu, très lentement. L'auteur nous décrit le quotidien de Robert et de ses enfants. Rien de vraiment extraordinaire, simplement une nouvelle vie difficile à accepter pour Kester et Michaël. C'est lors de leur séjour chez leur mère que le lecteur commence à être secoué. Malsaine et manipulatrice, sa relation avec ses enfants m'a mis vraiment mal à l'aise, elle dérape quasiment constamment et beaucoup de tabous sont levés. L'horreur est profondément humaine dans ce livre, pas d'effets de manche mais simplement des codes sociaux complètement bouleversés et amoraux. La haine est de mise, les pulsions de morts sont exacerbées.

A la mi-livre, l'auteur passe à la vitesse supérieur. On s'attend désormais au pire tant ces deux gamins sont dérangés. Aveuglé par son nouvel amour et l'attention constante que lui réclame ses deux plus jeunes enfants, Robert ne voit rien et ceci malgré les remarques de plus en plus insistantes de sa nouvelle compagne. La colère et la frustration vont frapper lorsqu'il sera parti au chevet de sa mère malade. Kester et son bras droit Michaël vont perdre tout sens commun et exprimer leur haine. Préparez-vous à des moments de pure cruauté, savamment orchestrés, jamais dans la démesure plutôt dans l'analyse clinique et froide d'actes guidés par des pulsions irrépressibles. C'est bien pire que n'importe quel livre gore lambda! Franchement, rien que d'y penser me fait frémir!

Le côté remarquable de cet ouvrage réside dans le traitement des personnages. Bernard Taylor est un fin tacticien. Il ne révèle les éléments de psyché de chacun que par petites touches intelligentes et emboîtées les unes dans les autres. Cette famille qui peut paraître banale au premier abord est très bien décrite et les rapports qu'entretiennent les quatre gamins entre eux sont d'une rare finesse. Cela a une importance cruciale pour le dernier acte qui m'aura marqué comme rarement. Jalousie, envie, désir de reconnaissance, confiance en soi... autant de sentiments exacerbés par la puberté qui sont ici au cœur d'une trame dramatique. On ressort de cette lecture littéralement rincé mais assez épaté par cet opéra sanglant intimiste.

L'écriture en elle-même n'est pas phénoménale, pas de quoi sauter au plafond, c'est plutôt dans la structuration du récit que Bernard Taylor sort son épine du jeu. Rien n'est laissé au hasard et le dénouement est imparable. Les amateurs de terreur intimiste seront ici conquis et bien des fois j'ai pensé à l'excellent et dérangeant film Eden Lake. À vous de voir si vous voulez tenter l'expérience!

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samedi 9 août 2014

"L'attrape-coeurs" de J.D. Salinger

Salinger

L'histoire: C'est l'histoire d'un garçon perdu et à la dérive, qui cherche des raisons pour continuer à vivre dans un monde devenu hostile et corrompu.

La critique de Mr K: Il s'agit d'un compte rendu de relecture aujourd'hui avec ce classique de Salinger, "L'Attrape-coeurs", que j'avais lu lors de mon adolescence et que j'avais beaucoup aimé. Une fois de plus, c'est le hasard du chinage qui mettait ce volume sur mon chemin, n'ayant pas ce titre dans notre bibliothèque, il me semblait criminel de ne pas l'acquérir...

Holden Caulfield est un adolescent américain de 16 ans issu d'un milieu favorisé. Il vient de se faire renvoyer de son collège et hésite à rentrer directement chez lui. Il prend le train pour New York. Ces trois jours de fugue sont l'occasion de petites aventures, de rencontres, et finalement révèlent un profond désarroi.

Ce livre n'a pas pris une ride depuis son écriture en 1945. Il faut dire que sa thématique est intemporelle, il est question ici du passage à l'âge adulte ou du moins de sa prise de conscience par un jeune en pleine rupture avec le monde qui l'entoure. Il déteste l'école, Holden a du mal à se situer et il a déjà connu des drames dont la perte de son jeune frère qu'il aimait plus que tout. Le lecteur est partagé entre sa rébellion légitime et son immaturité latente.

Holden m'a tout de même profondément touché par le caractère d'urgence qui souffle sur le roman car il a fugué de son école et va devoir l'annoncer à ses géniteurs trois jours après. Il va se passer énormément de choses pendant cette parenthèse de liberté et l'on tend alors vers la parabole initiatique avec des passages tantôt drôles (les moments où Holden râle sur le cinéma, ses idées étranges, ses mensonges notamment), tantôt plus dramatiques. Avec l'âge, ce sont les chapitres consacrés à son rapport aux filles (le RDV avec Sally est assez croustillant dans son genre!) et aux femmes qui m'ont le plus marqué notamment celui avec la prostitué où il se rend compte qu'il lui reste bien du chemin à parcourir avant de s'accepter en tant qu'homme.

Vous me direz, rien de vraiment neuf dans l'histoire. Là où ce livre rentre dans le club très sélect des classiques, c'est dans son traitement. Il est écrit à la première personne du singulier et dans un style familier qui nous immerge immédiatement dans la psyché de Holden qui capte la vie avec la spontanéité propre à son âge. Il faut s'y faire au départ car c'est peu commun mais une fois emporté pas son flot de mots et d'expressions, il est difficile de relâcher cet ouvrage qui est une merveille de rythme, d'intelligence et de profondeur. Je suis passé comme dit précédemment par tous les états et c'est un peu sonné mais heureux de cette redécouverte que je suis ressorti de cette lecture.

L'Attrape-coeurs est un classique qu'il faut je pense absolument avoir lu tant il n'a rien perdu en vérité et fraîcheur. Un bijou entre les bijoux!

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mardi 17 juin 2014

"La Lance" de James Herbert

James-Herbert-La-lanceL'histoire: Pour venger son associée sauvagement assassinée, le détective privé Harry Steadman se fait passer pour un acheteur potentiel auprès d'Edward Gant, un marchand d'armes qui semble impliqué dans une organisation terroriste internationale.
Mais Gant ne se contente apparemment pas d'encourager de sanglants attentats ou de favoriser l'éclosion de conflits localisés, il se considère investi d'une mission sacrée: assurer le triomphe des puissances des ténèbres.
Et, de toutes les armes qu'il a à sa disposition, la plus redoutable reste la nécromancie...

La critique de Mr K: Ne vous laissez pas abuser par l'hideuse couverture du présent ouvrage, James Herbert vaut bien mieux que cela! Auteur ultra-connu pour sa trilogie des Rats, il n'a peu d'équivalents pour fournir du suspens et des passages bien gratinés en terme de gore. Le quatrième de couverture de La lance m'intriguait car la dimension ésotérique semblait importante dans une histoire qui semblait tendre au prime abord vers le roman policier-espionnage. Je n'ai pas été déçu!

Ex membre du Mossad qu'il a quitté écœuré par la violence et les vendettas, Harry Steadman s'est réfugié au royaume-Uni où il coulait une vie tranquille de détective privé entre histoires d'espionnages industriels et relations adultères à démasquer. Co-propriétaire de la société avec une amie, sa situation est confortable et sans accroc; mais voilà que ses anciennes relations de travail refont surface pour lui confier une affaire délicate, un agent du Mossad a disparu lors d'une infiltration qu'il effectuait au sein de l'entreprise d'un certain Edward Gant, richissime marchand d'arme connu pour ses accointances avec certains groupuscules extrémistes. Il refuse dans un premier temps mais son associée ne veut pas laisser passer une telle occasion pouvant apporter notoriété et fortune à leur agence. Quelques jours plus tard, elle est assassinée sauvagement devant le domicile de Harry. Le sang de ce dernier ne fait qu'un tour et le voilà parti pour une infiltration à haut risque qui va l'emmener sur des voies insoupçonnées et des plus ténébreuses.

Ce roman est de facture classique. On retrouve la figure centrale du héros torturé par un passé qu'il voulait oublier et qui refait surface. On est loin tout de même d'être face à un héros monolithique et sa psyché va bien évoluer au fil de l'intrigue. Très vite, on se rend compte que derrière cette histoire se cache quelque chose de plus gros et les théoriciens du complot seront ravis devant la tournure des événements. Tous les ingrédients sont là pour fournir une excellent page-turner: Mossad, CIA, MI6, Secte Néo-nazie et références multiples à Hitler et Himmler (toutes véridiques et mises en parallèle avec l'évolution de l'intrigue), spiritisme et ésotérisme diabolique, références bibliques, ambiance glauque à souhait, un début d'histoire d'amour... Bref, vous mixez l'ensemble et cela vous donne le présent ouvrage. L'intrigue est très bien menée, les surprises sont certes peu nombreuses mais le final est haletant à souhait. On pourrait même dire que le roman est trop court (280 pages) tant on aimerait en lire encore davantage.

Au niveau formel, on retrouve ici les qualités de Herbert: concision des descriptions, personnages plantés en quelques lignes et développés tout au long de l'ouvrage, un suspens et un caractère d'urgence présent du début à la fin de l'histoire, des passages bien gores mais jamais gratuits et une exploration en profondeur des abysses psychologiques humains. Et oui, il aime notre côté sombre et dans ce livre on peut dire qu'on est servi! L'écriture est égale à celle qu'on lui connaît: accessible mais ne cédant pas à la facilité, les pages se tournent toutes seules. Le plaisir de lecture est total et même si on ne peut pas dire que ce roman soit un classique (il lui manque ce petit supplément d'âme qui sépare l'excellence du très bon), on passe un très bon moment.

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