"Le miroir de Satan" de Graham Masterton
L’histoire : Martin Williams, un scénariste, fait l'acquisition d'un miroir ayant appartenu à Boofuls, enfant-star d' Hollywood, assassiné en 1939 dans des circonstances aussi tragiques que mystérieuses. Les miroirs, c'est bien connu, peuvent être des portes sur d'autres mondes. Celui-là est une porte sur l'enfer, sur un "Hollywood à l'envers" où sous ses dehors de petit garçon angélique, Boofuls va se révéler la plus diabolique des créatures...
La critique de Mr K : Un bon plaisir régressif au programme d'aujourd'hui avec un Graham Masterton exhumé de ma PAL, un auteur que j’aime tout particulièrement lire en été, le genre épouvante convenant parfaitement à cette période d’accalmie au niveau taf et au climat surchauffé. Quoi de mieux donc qu’un ouvrage traitant de l’enfer et du Diable avec Le miroir de Satan, une variation très libre autour de l’œuvre de Lewis Carroll. J’y allais avec confiance vu la belle surprise que s’était révélé être Le Portrait du mal qui lui partait sur les pas d’Oscar Wilde. Ce fut ici une lecture très plaisante, addictive et très agréable malgré une fin quelque peu abrupte.
Être scénariste est loin d’être une sinécure. Loin d’être riche, Martin Williams vivote dans un Hollywood où la richesse semble à portée de main. Il ne s’en plaint pas pour autant, il vit pleinement sa vie de célibataire, multiplie les conquêtes et réalise quelques percées dans le marché des séries à succès comme l’Agence tout risque. Il a un projet secret, une marotte : celle de réaliser une comédie musicale sur un enfant-star assassiné violemment par sa grand-mère en 1939. Par un hasard surprenant, il se retrouve avec la possibilité d’acquérir des meubles lui ayant appartenu. Il jette son dévolu (il n’a en fait les moyens que pour ça) sur un grand miroir surmonté d’une figurine grimaçante et l’installe chez lui.
C’est bien connu, les miroirs capturent une partie de votre âme quand vous vous contemplez dedans, certains disent même qu’ils sont un lieu de passage vers d’autres mondes ou dimensions. Martin va l’apprendre très vite à ses dépens. Il commence par y voir des choses qui ne devraient pas y être et bientôt des échanges vont s’avérer possibles. Le simple fait surnaturel et inquiétant va devenir terriblement angoissant avec de premières apparitions glaçantes et des morts violentes qui s’accumulent autour de lui. L’enfant disparu semble avoir survécu et vivre de l’autre côté. Que se passerait-il s’il réussissait à traverser le miroir et à venir dans notre monde ? Le lecteur et le héros prit de panique ne vont pas tarder à le savoir !
Ce qu’il y a de bien avec cet auteur, c’est que ce n’est pas un tâcheron comme on en trouve un peu trop souvent dans le genre. Le style est étudié, fourni et pour autant très accessible et évocateur de scènes délirantes et effrayantes. Masterton s’y entend pour nous mettre les chocottes et il y est arrivé plus d’une fois avec moi avec cette lecture, je peux vous dire que je regardais différemment mon reflet dans le miroir de la salle de bain. On passe dans ce roman de moments calmes à de brusques accélérations narratives qui mettent mal à l’aise, la bienséance n’étant pas dans ces pages bien au contraire. Satan ne fait pas dans la dentelle et dans la morale première, il se déchaîne ici.
L’aspect fantastique est très bien rendu, insidieux et pernicieux, il baigne les pages d’une atmosphère glauque. On n’est pas déçu par cette immersion poisseuse, très progressive et qui voit les certitudes du héros fortement ébranlées. Les faisceaux de présomptions tournent vite aux révélations incroyables. A la moitié de l’ouvrage, on se rend compte que la simple histoire de revenant et d'objet possédé vire en quelque chose de bien plus important et que le sort du monde tel qu’on le connaît est en jeu. Surtout que les esprits finissent par se déchaîner et donnent lieu à des scènes bien gores dont l’auteur a le secret. Ça gicle bien, c’est bien sadique par moment, perso j’adhère et j’adore. Un bon Masterton recèle forcément des passages bien salés, et l’on n’est pas déçu sur ce plan là non plus !
En filigrane, on lit aussi une bonne critique bien senti du système hollywoodien, de la logique de succès et d’échec avec son lot d’âmes perdus et de laissés pour compte capables de tout pour réussir. Le milieu est bien pourri par l’argent, la quête de pouvoir et la volonté de n’en laisser aucune miette. Typiquement le genre d’enfer sur terre idéal pour faire germer un mal plus profond. L’auteur s’en donne donc à cœur joie et la jubilation est là encore totale. Un petit bémol, la résolution arrive tardivement et aurait mérité davantage de développement. Ce n’est pas bâclé pour autant, tout a une explication mais le climax installé aurait mérité d’être détruit de manière moins rapide et plus prolongé. Mais c’est un menu défaut je vous rassure.
Très bonne lecture donc que je ne peux que conseiller à tous les amateurs de frissons, d’ambiance de fin du monde et de paranoïa galopante. C’est efficace, bien mené et l’on n’est pas déçu.
Egalement lus et chroniqués de Masterton au Capharnaüm éclairé :
- Le Portrait du mal
- Magie des neiges
- Apparition
- La Cinquième sorcière
- Le Jour J du jugement
- Le Trône de Satan
- Le Sphinx
- Magie maya
"La Rivière à l’envers" tomes 1 et 2 de Jean-Claude Mourlevat
L’histoire : Ainsi vous avez tout dans votre magasin ? demanda la jeune fille. Vraiment tout ? Tomek se trouva un peu embarrassé : Oui... enfin tout le nécessaire... Alors, dit la petite voix fragile, alors vous aurez peut-être... de l'eau de la rivière Qjar ? Tomek ignorait ce qu'était cette eau, et la jeune fille le vit bien : C'est l'eau qui empêche de mourir, vous ne le saviez pas ?
La critique de Mr K : Chronique d’un très beau diptyque de littérature jeunesse aujourd’hui avec La Rivière à l’envers de Jean-Claude Mourlevat, un ouvrage qui m’a été recommandé par un de mes jeunes élèves, une fois n’est pas coutume. Derrière cette quête de deux adolescents (un tome pour chacun des deux protagonistes avec des chassés croisés savoureux), on a affaire à un magnifique récit initiatique, profondément humaniste, qui nourrit l’imaginaire et la réflexion. J’ai littéralement dévoré ces deux volumes.
Tomek est un jeune orphelin qui vit dans un village bien tranquille où il tient l’épicerie de ses parents. Il est capable de vous fournir tout ce dont vous avez besoin et sa vie lui convient malgré des débuts difficiles. Lorsque Hannah va pousser la porte de son échoppe et lui demander quelque chose qu’il n’a pas (une eau miraculeuse qui prolonge la vie de la personne qui la boit), il décide de partir à son tour à la recherche de la rivière qui coule à l’envers à l’autre bout du monde connu. C’est le début d’une véritable odyssée où il traversera des lieux tantôt étonnants tantôt inquiétants. Il fera des rencontres marquantes et sera confronté à des épreuves qui le forgeront, le feront mûrir. Ce parcours trouve son miroir avec l’aventure d’Hannah contée dans le tome qui lui est consacrée et qui le complète parfaitement.
On s’attache directement à ses deux personnages touchants par leurs débuts chaotiques dans la vie, dans leur soif de savoir et leur courage à toute épreuve. Leur naïveté, leur foi dans leur quête les portent littéralement malgré leur jeune âge. On grandit avec eux, on frémit avec eux. Le voyage est loin d’être de tout repos avec son lot de fatigue, d’appréhension et de doutes. La parabole est rudement bien menée et l’on ne peut qu’y voir une métaphore de la vie, la construction de soi et les choix que l’on doit faire parfois même s’ils sont difficiles. L’amour, l’amitié, le dépassement de soi, le goût pour le rêve, sont autant de thématiques abordées avec talent et finesse.
On traverse les océans, on accoste sur des îles qui n’existent pas en traversant un arc en ciel, on marche dans une forêt qui provoque l’oubli de nos semblables, on parcourt les déserts arides, on se fraie un chemin dans des villes grouillantes d’activité, on discute au coin du feu, on se réveille d’un sommeil magique dans un village de parfumeurs hédonistes... L’aventure est belle, le dépaysement garanti et les leçons de sagesse universelles omniprésentes et fondatrices. Ici on magnifie l’expérience, le partage, la pondération et la Raison sans tomber dans l’écueil de la morale pesante et indigeste. Chacun y trouvera ce qu’il cherche et bien plus encore, quelque soit son âge d’ailleurs, bien des passages m’ont atteint et émus.
L’écriture est superbe. Très accessible, porteuse de sens toujours, très poétique aussi. On déguste les mots comme on s’abreuve d’un nectar. Ce roman nourrit, affranchit et rend heureux la personne qui le lit. Des qualités rares et ô combien précieuse dans ce monde si effrayant pour nos jeunes pousses. Des livres de choix, des indispensables à faire découvrir au plus grand nombre.
"Les Lumières de septembre" de Carlos Ruiz Zafon
L’histoire : 1937, Normandie. Simone Sauvelle, embauchée par un riche et excentrique créateur de jouets, rejoint la côte normande avec ses enfants Irène et Dorian.
Toute la famille tombe sous le charme de la majestueuse demeure dans laquelle les accueille l’inventeur de génie : Cravenmoore. Mais à la nuit tombée, les automates qui peuplent la maison et le bois alentour semblent plus vivants que jamais. Et qu’en est-il des lumières au large qui se rallument à chaque fin d’été ? On dit que les âmes noyées cherchent toujours à regagner la rive... Irène, accompagnée du jeune marin qu’elle vient de rencontrer, va découvrir ce que la solitude fait aux hommes.
La critique de Mr K : Toutes les bonnes choses ont malheureusement une fin, avec Les Lumières de septembre, Carlos Ruiz Zafon termine avec panache sa trilogie de la brume, œuvre de jeunesse au charme envoûtant. Ce dernier volume a été dévoré comme les précédents avec un plaisir de tous les instants, une addiction terrible et au moment de refermer le volume un sentiment de joie et de satisfaction à nul autre pareil.
À la veille de la Seconde Guerre mondiale, Simone Sauvelle, une veuve ruinée change de vie et part s’installer en Normandie avec ses enfants. Elle a décroché une place chez un créateur de jouets au génie incroyable, à elle de gérer les affaires courantes d’un homme lui aussi esseulé, sa femme souffrant d’une mystérieuse maladie qui la cloître au lit depuis des décennies. Le premier contact est prometteur, l’entente est immédiate et beaucoup de points communs les relient. Les enfants de Simone quant à eux vont apprendre à découvrir les lieux et les environs avec son lot d’endroits atypiques et de légendes tenaces. Très vite l’enchantement va céder à la place au questionnement puis à l’effroi. Une ombre mystérieuse plane, des événements curieux se produisent et la mort finit par frapper. Tout finit par s’accélérer et mène à la résolution d’une malédiction mêlant chagrin et ressentiment.
C’est incroyable comme cet auteur était doué pour planter un décor, une histoire, des personnages charismatique. Ainsi on se prend immédiatement d’affection pour Simone et ses enfants que la vie n’a pas gâtés. La mort subite du mari les laisse sur la paille, à la merci de la pauvreté. La déchéance sociale est terrible, remarquablement décrite en une économie de mots efficace et très évocatrice. Le contraste est donc fort avec les premiers jours à Cravenmoore, un immense domaine s’apparentant à une demeure gothique, peuplée d’automates aussi étranges que fascinants. Je dois avouer qu’il ne m’aurait pas déplu d’y aller moi-même dans la vraie vie, aimant ce style de demeures marquées par le sceau du passé et des légendes (même si je me serai sauvé bien avant que se déchaînent les événements de fin de récit -sic-). Les descriptions sont de toute beauté, aériennes, jamais pesantes et ne ralentissent pas le récit. Bien au contraire, que ce soit le domaine, la forêt, le phare ou une grotte qui aura son importance plus tard, ces lieux sont quasiment des personnages à part entière avec leur apparence et leurs secrets.
Les personnages après un début de récit d’exposition naviguent à vue. La mère se rapproche peu à peu du maître des lieux et s’interroge sur les liens qui les unissent. L’évolution est décrite avec une grande sensibilité, ces deux âmes ont souffert, souffrent encore mais l’évidence ne va pas forcément de soi et des obstacles invisibles / psychiques font que cette relation s’avère bien plus complexe qu’elle n’y paraît de prime abord. Dorian, est émerveillé quant à lui face aux créations de l’inventeur, quasiment hypnotisé par ses êtres mécaniques qui semblent pourtant mus d’une vie propre. Il ne tardera pas à devoir faire face à ses plus grandes peurs. Irène vit sa vie de jeune fille, tombant amoureuse du jeune marin ombrageux Ismaël. Elle s’est révélée au final être mon personnage préféré avec Simone. Irène est l’aînée de la tribu, elle a des responsabilités qui jusque là semblaient l’étouffer quelque peu. Ismaël c’est un monde qui s’ouvre, un moment de respiration avec la découverte de la navigation, des légendes locales et du désir. Les pages la mettant en scène sont parmi les plus belles, les plus touchantes.
Le récit gagne peu à peu en intensité, le suspens monte crescendo et l’addiction vous l’avez compris est totale. On oscille constamment pendant cette lecture entre fascination et inquiétude, les émotions nous submergent et les rouages de l’histoire sont implacables. Zafon par sa langue merveilleuse, ses talents de conteur et sa sensibilité offre ici une conclusion magistrale à sa trilogie de la brume. Je ne remercierai jamais assez ma chère Nelfe pour ce cadeau d’anniversaire enchanteur. À découvrir absolument si ce n’est déjà fait.
Egalement lus et chroniqués du même auteur au Capharnaüm éclairé :
- L'Ombre du vent
- Le Jeu de l'ange
- Marina
- Le Prisonnier du ciel
- Le Prince de la brume
- Le Palais de minuit
"Le Palais de minuit" de Carlos Ruiz Zafon
L’histoire : Calcutta, 1932.
Ben et sa soeur jumelle Sheere, séparés depuis leur naissance seize ans plus tôt, se retrouvent enfin. Mais à peine réunis, les voilà traqués par un mystérieux assassin. Aidé par la Chowbar Society, un club secret créé avec six copains de l'orphelinat, Ben devra faire face à Jawahal, un démon maléfique, une âme damnée qui doit tuer l'un de ses enfants pour trouver le salut... Commence alors une course-poursuite, entre palais abandonnés et trains fantômes.
L'odyssée indienne de deux enfants qui vont tout faire pour échapper au spectre de la terreur et mettre un terme à la malédiction...
La critique de Mr K : Aujourd’hui, chronique du deuxième tome de la Trilogie du Cycle de la brume de Carlos Ruiz Zafon, triptyque jeunesse de l’auteur que Nelfe m’a offert pour mon anniversaire. Le Prince de la brume m’avait beaucoup séduit et je dois avouer que Le Palais de minuit m’a enchanté lui-aussi, peut-être même un peu plus que le précédent. Aventure, mystère, magie et focus sensible sur l’enfance et l’isolement sont au rendez-vous d’un court roman qui se lit tout seul et provoque une addiction immédiate.
Tout débute sur un fleuve au milieu de la brume, un homme pourchassé cherche à cacher ses deux jumeaux qui viennent de naître et dont la mère est morte. Avant d’être rattrapé par les assassins lâchés à ses trousses, il confie les bambins à sa belle-mère qui devra se séparer de Ben (le garçon) qui va se retrouver placé dans un orphelinat tandis que sa sœur Sheere restera avec sa grand-mère car la menace est bel et bien là. Elle ne lâchera jamais ces deux enfants. À peine nés, déjà séparés, vous parlez d’un destin...
16 ans plus tard, Ben et ses six compagnons qui ont formé un club très sélect (la Chowbar Society) constituant la famille des sept orphelins vont être confrontés au passé de Ben. Les événements se précipitent la veille du départ de chacun de l’orphelinat (à 16 ans révolus, les enfants sont relâchés dans le monde et doivent apprendre à vivre seuls), les jumeaux se retrouvent, un homme mystérieux vient réclamer son dû auprès du directeur qui paie cash sa discrétion, les esprits se déchaînent, une malédiction semble à l’œuvre et les révélations vont pleuvoir mettant à mal les enfants mais aussi le lecteur qui ne sait plus vraiment à quel saint se vouer tant la trame se révèle bien plus complexe qu’elle n’y paraît de prime abord.
Comme dit un peu plus haut, ce roman se lit tout seul. La langue de Zafon fait une fois de plus merveille. Délicate, ciselée et très poétique par moments, elle excelle à nous faire découvrir les affres de l’enfance abîmée. Volontiers sombre et mélancolique dans le ton, l’ouvrage met en lumière la solitude et la peine qui habitent des orphelins privés de leurs géniteurs et qui ensemble vont se révéler plus forts, plus résistants face au destin. Chacun a ses qualités et ses défauts, les interactions sont souvent décalées, drôles mais aussi parfois plus intimes et tristes. L’univers de l’enfance est donc très bien rendu, se mêlant très bien avec le contenu fantastique qui rajoute une dimension supplémentaire à l’ouvrage.
Il s’en passe des vertes et des pas mûres par la suite. Il va falloir que les jeunes explorent le passé de la ville, des parents de Ben et Sheere et explorer les ruines de la gare de Jheeter, lieu d’un drame ancien qui pourrait expliquer la présence de cette ombre maléfique que rien ne semble pourvoir arrêter. On se plaît donc à enquêter avec ces jeunes gens qui n’ont pas froid aux yeux et qui se révèlent débrouillards et fidèles à leur serment d’amitié. Longue sera leur quête et le dénouement n’épargnera personne, Zafon n’est pas réputé pour faire dans le consensuel et le happy-end . Comme dans l’opus précédent, on ressort heureux avec un arrière goût amer en bouche de cette lecture.
Un roman à découvrir donc, à lire, à déguster comme un conte noir redoutable et distrayant à la fois. Un bonheur de lecture en plus au tableau de Zafon. Quel regret qu’il nous ait quitté si tôt !
Egalement lus et chroniqués du même auteur au Capharnaüm éclairé :
- L'Ombre du vent
- Le Jeu de l'ange
- Marina
- Le Prisonnier du ciel
- Le Prince de la brume
"Le Prince de la brume" de Carlos Ruiz Zafon
L’histoire : 1943, Angleterre. Pour fuir la guerre, la famille Carver s'installe dans un village perdu sur la côte. Mais, à peine franchie la porte de la maison, des événements étranges se produisent...
Avec leur nouvel ami Roland, Alicia et Max Carver vont peu à peu percer les secrets de la vieille demeure et apprendre l'existence d'un certain Caïn, surnommé le Prince de la Brume. Un personnage diabolique revenu s'acquitter d'une dette très ancienne...
Voilà les trois enfants lancés à la découverte d'épaves mystérieuses, de statuettes enchantées, de gamins ensorcelés... Une aventure extraordinaire qui changera leur vie à jamais.
La critique de Mr K : Chronique d’un beau cadeau d’anniversaire offert par ma douce aujourd’hui avec le premier tome de la trilogie jeunesse écrite par Carlos Ruiz Zafon, un de mes auteurs favoris. Le Prince de la brume est un beau conte noir qui oscille entre policier, fantastique et récit initiatique. Il ne m’a fallu guère plus qu’une journée pour le dévorer et l’apprécier.
L’action se déroule durant la seconde Guerre mondiale. La famille Carver, sous l’impulsion du père, déménage de la ville pour s’installer dans une cité de bord de mer pour échapper au conflit, les villes étant des cibles privilégiées. Du jour au lendemain, les voila partis. Ils emménagent dans une vieille maison donnant sur la mer, le père a déjà des pistes pour poursuivre son activité d’horloger. Les enfants découvrent les lieux. Très vite, un mystère semble planer sur cette maison dont l’Histoire a été marquée par un drame : la mort tragique par noyade du fils unique de la famille qui habitait précédemment là.
Max découvre ainsi à proximité un étrange jardin funéraire peuplé de statues de pierres qui changent de position au fil du temps qui passe. Un chat énigmatique s’attache dès leur arrivée à sa jeune sœur Alicia et Irina (l’aînée) traverse ce qui ressemble à une crise d’adolescence larvée. Ils font vite la connaissance de Roland, le petit-fils du gardien de phare de la localité qui cache un lourd secret qui serait lié à l’épave reposant dans la baie et qu’ils vont explorer lors de plongées dans les premiers après-midi qui suivent leur installation. Les choses vont s’accélérer suite à un accident plongeant Alicia dans le coma. Les parents restent à son chevet et les événements vont se précipiter.
Ce roman jeunesse s’attarde beaucoup sur les enfants et leur ressenti. On suit plus particulièrement Max, plutôt effacé et rêveur, il aime lire et observer. On s’attache très vite à lui et à sa petite famille. Il y a de la bienveillance et de la douceur dans ce foyer qui ne sera par épargné par les épreuves. Tous vont être confrontés à quelque chose qui les dépasse, quelque chose de terrifiant lié à une malédiction que le temps n’a pas fait disparaître. La tension monte vite, les esprits s’échauffent parfois, doivent se confronter à l’inconnu. Les liens vont se raffermir et l’enquête nécessaire va prendre de l’ampleur. Les révélations vont bientôt pleuvoir et mettre en lumière un pacte délétère dont les conséquences se font encore sentir.
La finesse psychologique donne lieu à une métaphore filée sur l’enfance, l’adolescence, la parentalité. La famille est au cœur d’un récit qui nous procure des émotions fortes, on est bien souvent touché en plein cœur et le roman remue bien les tripes. Zafon connaît son métier et une fois de plus distille une ambiance bien particulière, diffuse entre poésie et ambiance gothique qui marque le lecteur en profondeur. Les descriptions de la brume, des tempêtes successives qui s’abattent sur le village créent un climat idéal pour l’apparition du fantastique.
Cet aspect est très bien emmené d’ailleurs, plutôt diffus au départ, il explose à partir de la deuxième partie de l’histoire qui prend une toute autre dimension. Une fois le danger identifié, il se déchaîne et ne laissera personne indemne. Remarquablement écrit comme d’habitude avec cet auteur, l’histoire regorge de références, de zones d’ombres et favorise l’imagination du lecteur prisonnier de ces pages. On ressort heureux et comblé avec l’envie irrépressible de lire les deux tomes suivants dont je vous parlerai un peu plus tard... car Nelfe a bien fait les choses et les deux autres volumes faisaient aussi partie du cadeau !
Egalement lus et chroniqués du même auteur au Capharnaüm éclairé:
- L'Ombre du vent
- Le Jeu de l'ange
- Marina
- Le Prisonnier du ciel
"La Trilogie des périls" de David Eddings
L’histoire : Je le savais, j'étais rentré à Cimmura avec le sentiment du devoir accompli, heureux d'avoir sauvé la vie d'Ehlana et tout remis en place : le Bhelliom au fond de la plus profonde fosse de l'Océan, Dolmant à la tête de l'Eglise d'Elénie. Azash, Annais et même Otha, le roi-limace, étaient morts. Mais, foi d'Emouchet, j'avais un mauvais pressentiment. Les nouvelles que m'apportaient Ulath, Tynian et Bévier n'étaient pas bonnes. Il n'était question que de disettes, d'épidémies, de troubles. Mes pires craintes se confirment : dans tous les Etats du continent, des héros de l'antiquité soulèvent le peuple. De prétendus justiciers incitent les nobles à se révolter contre l'Empire de Tamoulie. Et il y a pire : les Trolls ont quitté leur foyer natal et envahi le nord de la Dalésie. Des guerriers reviennent d'entre les morts. Un nécromancien - homme ou Dieu - ramène des armées du plus lointain passé, fouille dans le folklore et donne vie à des monstres redoutables : des vampires, des goules, des hommes de l'aube et même ceux-qui-brillent. Je savais qu'il nous faudrait subir un interminable hiver jusqu'au retour des Dieux. Je n'avais pas prévu que nous devrions affronter un nouvel ennemi auprès de qui les Dieux des Trolls étaient de joyeux drilles.
La critique de Mr K : Très bon voyage en fantasy avec cette lecture fleuve qui m’a transporté bien loin des réalités terrestres lors des dernières vacances de la Toussaint. J’adore David Eddings. Même s’il se situe un cran en dessous à mes yeux que des auteurs classiques du genre comme Tolkien, Martin ou encore Howard et Moorcock, il apporte une fraîcheur et un vent de folie dans un genre parfois un peu ampoulé. Après la très réussie Trilogie des joyaux, c’est avec une joie non feinte que je retrouvais Emouchet et ses joyeux compagnons pour cette Trilogie des périls qui promettait beaucoup après avoir lu la quatrième de couverture du premier volume. Plus de 1500 pages en prévision et même pas peur ! Au final, ce fut un grand bonheur de lecture, une addiction de tous les moments et un voyage vraiment mouvementé !
Émouchet pensait avoir fait le plus dur en se débarrassant du Bhelliom et en sauvant la vie d’Ehlanna, on pouvait d’ailleurs décemment penser qu’ils pourraient tranquillement couler des jours heureux et profiter pleinement de leur vie maritale. Six ans ont passé depuis les derniers événements, une petite fille est née de leur union. Mais voila, une certaine agitation secoue l’Éosie et le continent voisin, des héros et personnalités du passé semblent ressurgir d’on ne sait où et fomenter une révolte contre l’ordre central. Rajoutez à cela de mystérieuses troupes semant le chaos qui semblent venir d’époques elles aussi révolues et la menace devient clairement inquiétante. La trilogie débute avec la nécessaire enquête de notre héros et de sa cohorte d’amis hauts en couleur sur ses mystérieux agissements qui mettent à mal l’unité des royaumes.
Comme souvent dans les sagas de David Eddings, le récit fait la part belle au voyage. Il s’amuse gaiement à fait traverser les cartes présentes dans les livres par ses héros du Nord au Sud, de l’Ouest à l’Est. Dépaysement garanti avec de longues traversées de déserts, de montagnes, de forêts impénétrables, de flots impétueux et autres lieux propices à l’aventure. De palais en tavernes, en passant par des souterrains ténébreux, on en voit des vertes et des pas mûres. On retrouve aussi le goût de l’auteur pour l’intrigue politique avec des complots ourdis de longues dates, des actes lourds de sens et des lignes de forces qui s’étiolent et se renforcent au gré des alliances et des révélations. Question scénario on en a pour son argent, c’est dense et l’on ne s’ennuie pas une seconde.
Les personnages sont toujours aussi savoureux avec cet humour omniprésent caractéristique de l’auteur de La Belgariade et de La Mallorée. Les dialogues sont parfois à se pisser dessus, on lorgne clairement vers Kaamelott avec des personnages de hautes extractions qui n’hésitent pas à se dire leurs quatre vérités et qui possèdent un sens de la répartie parfois cinglant. C’est frais, c’est fun et ça dépoussière la fantasy tout en gardant parfois un ton épique de bon aloi. Car ici les dieux agissent, parlent et suivent leur propres intérêts. Ils n’ont pas la langue dans leur poche eux non plus, ce qui donne un ton léger avec tout de même son lot de scènes dantesques et de la magie en veux-tu en voila.
On peut reprocher à l’ensemble de manquer d’originalité dans le développement de l’intrigue principale (je n’ai jamais vraiment été surpris) et certains passages sont redondants car tel personnage répète ce qu’il a appris au chapitre précédent à un autre personnage. Rien de bien méchant pour autant avec ces trois ouvrages qui se lisent d’une traite et avec grand plaisir quand on veut s’échapper et plonger dans un monde de fantasy. Avis aux amateurs !
Lus et chroniqués du même auteur au Capharnaüm Éclairé :
- La Belgariade
- La Mallorée
- La Trilogie des joyaux
Petites acquisitions d'été
Voila... il fallait bien que ça arrive ! Nous sommes retournés à notre Emmaüs et nous avons craqué ! Cela faisait pratiquement deux ans que nous n'y avions pas mis les pieds : l'arrivée de Little K, la COVID, la Raison pour ma part sont autant d'éléments qui nous ont tenu éloignés de ce lieu de perdition toujours aussi bien achalandé en terme de livres.
Voila le butin ! De belles prises au milieu d'un océan de tentations. De mon côté, j'ai évité les bacs de littérature dite contemporaine pour me concentrer sur la SF et le policier, deux genres sous représentés dans ma PAL. Nelfe est quant à elle tombée sur des ouvrages qu'elle avait repéré au fil du temps sur les réseaux et les sites d'actualité littéraire.
Et c'est parti pour une présentation en bonne et due forme de tous les petits nouveaux.
(mes trouvailles !)
- Histoires écologiques, collectif. Un recueil de nouvelles de science-fiction consacré à l'écologie, thème majeur du genre et sujet ô combien central dans l'évolution de notre monde actuel. Il est bon de revenir vers des auteurs classiques pour nourrir sa réflexion : Poul Anderson, Brian Aldiss, Philip Jose Farmer entre autres se penchent sur les désastres mais aussi les solutions possibles dans cette anthologie qui promet beaucoup et qui appartient à une collection qui m'a toujours donné beaucoup de plaisir de lecture.
- Le Miroir de Satan de Graham Masterton. Un auteur chouchou dont je n'avais pas encore lu ce titre, variation horrifique très librement inspirée de Lewis Carroll et de son oeuvre culte. Graham Masterton avait déjà fait le coup avec le très bon Le Portrait du Mal en s'inspirant d'Oscar Wilde. Le héros acquiert un miroir ayant appartenu à un enfant-star d'Hollywood assassiné dans de mystérieuses circonstances en 1939. Il va s'avérer très vite qu'il s'agit d'une porte vers l'Enfer et que son ancien propriétaire décédé ne l'est pas tout à fait complètement... Cet ouvrage ne passera pas l'été, c'est typiquement le genre de lecture détente que j'aime pratiquer en vacances.
- Les Quatre vents du désir d'Ursula Le Guin. Un autre recueil de nouvelles avec 20 récits à la confluence des genres SF et fantastique d'une auteure atypique et géniale à la fois : Ursula Le Guin. Son écriture est accessible, précise, poétique et très addictive. Il me tarde de me plonger à nouveau dans un de ses ouvrages. Celui-ci, je voulais l'acheter depuis un certain temps, c'est donc un très bon cas de hasard heureux que cette trouvaille. Yes !
- Yeruldelgger d'Ian Manook. Belle pioche aussi avec cet ouvrage d'Ian Manook dont j'ai aimé mes deux précédentes lectures qui se déroulaient en Islande. Ce titre est le plus connu de lui et il m'avait échappé jusque là. L'action se déroule en Mongolie et met le héros éponyme aux prises avec des crimes particulièrement épouvantables. Vu les avis lus ici ou là, ça promet. Vive le chinage !
- 2084 de Boualem Sansal. Un roman dystopique qui a fait beaucoup parler de lui à sa sortie et qui a divisé ses lecteurs, beaucoup l'ayant comparé au 1984 de George Orwell soit en positif soit en négatif. N'ayant que peu lu les critiques ou alors de manière superficielle, j'aborderai cette lecture de manière neutre. Un homme va se révolter contre un système fondé sur l’amnésie et la soumission au Dieu unique où la moindre pensée personnelle est proscrite et où la surveillance est généralisée. Perso, ça me donne envie !
- Dîner de têtes de Kââ. Un ouvrage au charme particulier car écrit par mon ex professeur de philosophie de Terminale littéraire aujourd'hui disparu, l'inénarrable Kââ à la prose plus que particulière... Un serial killer de la France profonde, de jeunes femmes victimes innocentes dans un thriller bien sanglant sont promis sur la quatrième de couverture. Wait and read !
(Les trouvailles de Nelfe !)
- Kinderzimmer de Valentine Goby. En 1944, le camp de concentration de Ravensbrück compte plus de quarante mille femmes. Sur ce lieu de destruction se trouve comme une anomalie, une impossibilité : la Kinderzimmer, une pièce dévolue aux nourrissons, un point de lumière dans les ténèbres. Un ouvrage fait pour Nelfe qui est passionnée par la seconde guerre mondiale et va découvrir par la même occasion l'écriture limpide et hautement séduisante de Valentine Goby qui m'avait bien plu lors de mes trois lectures de romans jeunesse sur l'immigration.
- Leurs enfants après eux de Nicolas Mathieu. Autre thématique appréciée par ma douce, l'adolescence et ses affres. Ici, l'auteur nous raconte l'histoire d'Anthony 14 ans qui le temps de quatre étés va expérimenter la vie dans un monde qui se meurt avec notamment un premier amour qui se révélera douloureux comme bien souvent. Un roman qui a beaucoup plu et dont on a beaucoup parlé à sa sortie. Au tour de Nelfe de se faire son propre avis...
- My absolute darling de Gabriel Tallent. Adolescence encore et mal de vivre social au programme de ce roman noir qui bascule lors d'une rencontre qui va changer la vie de Turtle, la jeune protagoniste principale asociale de ce roman prometteur. M'est avis que je le piquerai à Nelfe si un jour j'en ai le temps ! Et puis Gallmeister hein...
De bien belles acquisitions une fois de plus et dont nous vous parlerons ici même au fil de nos lectures. Pour le coup, je trouve qu'on a été raisonnables, du moins... jusqu'à la prochaine fois !
Acquisitions sous confinement
L'envie m'a pris de passer commande de quelques ouvrages d'occasion en ce début du mois auprès d'une librairie parisienne spécialisée dans les livres de seconde main. Nelfe m'avait dit qu'elle avait lu sur le net que ce haut lieu de la tentation que je fréquentais assidûment lorsque j'habitais en région parisienne rencontrait des difficultés... alors si je peux à la fois les aider en apportant ma pierre à l'édifice et succomber par la même occasion à une tentation qui me démangeait depuis quelques temps (NOUVEAUUUUUX LIIIIIIIIIIIIIIIIVRES !), je n'allais pas me gêner ! Ma PAL est déjà fournie mais pas de culpabilité pour autant, côté SF c'est tout de même réduit, il était donc temps de l'achalander à nouveau.
C'est donc un très beau butin que je vous présente aujourd'hui avec trois auteurs que j'aime tout particulièrement. D'ailleurs, si vous nous lisez depuis un certain temps, vous les avez sans doute déjà croisés plusieurs fois et souvent avec une chronique plus que positive voire dithyrambique. Entre Dan Simmons auteur US surdoué, le pape de la SF française Pierre Bordage et les récits de haute volée entre aventure et SF de Jack Vance, je pense que je vais me régaler. Voici une brève présentation de mes nouvelles acquisitions qui s'annoncent plus que prometteuses !
- Le Styx coule à l'envers de Dan Simmons. On commence avec ce recueil de douze nouvelles qui se propose de nous faire voyager jusqu'au bout de l'Enfer entre SF et fantastique. Je n'ai jusqu'à maintenant jamais lu cet auteur dans le format nouvelles. J'en ai entendu le plus grand bien et avec la quatrième de couverture bien barrée présentant des textes au contenu délirant (un parc d'attraction pour se rejouer la guerre du Vietnam, une nouvelle technologie qui a permis de vaincre la mort, la reconstitution de l'Enfer de Dante...), voila un recueil qui fait saliver.
- L'Abominable de Dan Simmons. Même auteur mais en version roman cette fois-ci avec ce titre qui me fait de l’œil depuis que j'ai lu des avis enthousiastes publiés sur IG, notamment celui de ma copinaute blogueuse Walpurgis. On se lance ici sur les traces du Yéti ni plus ni moins dans un thriller fantastique à priori très documenté et haletant. L'ambiance décrite entre folie humaine et expédition vouée à l'échec m'ont directement fait penser au très bon Terreur du même auteur et que j'avais dévoré. M'est avis que celui-ci ne fera pas long feu dans ma PAL !
- Résonances de Pierre Bordage. Cela faisait trop longtemps que je n'avais pas lu de roman de cet auteur que j'adore. Dans ce roman, Bordage revient au space opera, un sous-genre de la SF qu'il maîtrise sur le bout des doigts. Amour et aventure promettent d'être au RDV avec cette histoire de deux êtres que tout sépare et qui vont devoir s'associer. Trame classique chez l'auteur avec sans doute pour moi un grand plaisir de lecture entre voyage spatial, complot, capacités spéciales et religion. J'en m'en délecte d'avance.
- Mission M'Other de Pierre Bordage et Melanÿn. Même auteur mais en association cette fois-ci avec un scénariste bien connu du monde de la BD. Une jeune femme suite à une avarie sur son vaisseau spatial va se retrouver sur Terre, une planète désormais en ruine où personne ne semble avoir subsisté. Elle commence un terrible périple afin de retrouver d'éventuels survivants... J'imagine que les auteurs vont nous livrer un récit initiatique mitonné à la sauce post-apocalyptique. Avec le talent de conteur des deux hommes, ça promet !
- La Mémoire des étoiles de Jack Vance. À l'heure où j'écris ces lignes, j'ai terminé l'intégrale des Chroniques de Durdane du même auteur (chronique à venir). Je me suis tellement régalé une fois de plus que j'ai commandé celui-ci pour avoir toujours un Jack Vance d'avance -sic-. Lors d'une expédition ethnologique, un couple sauve un garçonnet de six ans d'une mort certaine et l'adoptent. Mais qui est ce petit garçon qui régulièrement semble habité par des visions et qui reçoit des messages télépathiques ? Un long voyage plein de révélations débute. Cet ouvrage est excellemment noté par mes collègues blogueurs, je n'ai donc pas hésité une seconde pour l'acquérir.
Beau programme, n'est-ce pas ? J'ai hâte de les découvrir, ce sera pour la fin du mois avec pour le moment deux titres qui se battent en duel pour avoir la primauté de la lecture. Et vous, par lequel me conseilleriez-vous de débuter ? Il n'y a rien à gagner si ce n'est la mention de votre nom dans la future chronique de l'ouvrage concerné. Hé hé !
"Vongozero" de Yana Vagner
L’histoire : Anna vit avec son mari et son fils dans une belle maison près de Moscou. Un virus inconnu a commencé à décimer la population. Dans la capitale en quarantaine, la plupart des habitants sont morts et les survivants – porteurs de la maladie ou pillards – risquent de déferler à tout instant. Anna et les siens décident de s’enfuir vers le nord, pour atteindre un refuge de chasse sur un lac à la frontière finlandaise : Vongozero. Bientôt vont s’agréger à leur petit groupe des voisins, un couple d’amis, l’ex-femme de Sergueï, un médecin... Le voyage sera long, le froid glacial, chaque village traversé source d’angoisse, l’approvisionnement en carburant une préoccupation constante.
La critique de Mr K : Cet ouvrage m’avait échappé lorsqu’il était paru aux éditions Miroboles en 2014. Et pourtant, Vongozero de Yana Vagner avait tout pour me plaire et il a fallu que je retombe dessus à la faveur d’une critique élogieuse sur un blogami pour que je repense à lui et que je me décide enfin à l’acquérir mais dans le format poche pour le coup. Oh que j’ai bien fait ! Voilà un ouvrage qui m’a bien scotché avec son ambiance post apocalyptique crépusculaire hyper réaliste et son traitement psychologique d’orfèvre. Accrochez vous, ça va chauffer au pays du grand froid !
Une épidémie sévit dans le monde entier, les morts se comptent en millions. Le virus (qui à certains égards rappelle le COVID19) s’étend inexorablement et les villes dont celle de Moscou sont mises en quarantaine. Anna vit en proche banlieue et voit un jour son beau père arriver à l’improviste pour prévenir son fils qu’il faut partir au plus vite, les gens paniquent et les pillards ne sont plus loin. La seule solution ? Fuir ailleurs, loin, très loin des hordes qui risquent de déferler. Avec son mari, son enfant, les voisins puis l’ex-femme et le premier enfant de son mari, les voila partis sur les routes vers un refuge possible, une cabane au bord du lac Vongozero situé dans la région nord du pays à la limite de la frontière finlandaise. On se doute bien que la folle équipée ne sera pas de tout repos...
Dans ce récit de survie qui décrit une fin du monde basée sur une crise sanitaire sans précédent, l’auteure prend son temps. Ne vous attendez donc pas à un rythme trépidant, à une accumulation de scènes chocs ou d’exploits individuels phénoménaux. C’est plus la description du voyage et des rapports psychologiques qui s’instaurent entre les protagonistes qui sont au centre de ce récit. Tous les personnages sont fouillés à commencer par Anna qui raconte l’histoire de son point de vue et n’hésite pas à nous faire partager ses pensées les plus profondes. Loin d’être lisse, cette héroïne doit accuser le coup : perdre du jour au lendemain sa maison, partager son intimité avec des étrangers et même l’ex de son mari. Les tensions apparaissent très vite, les caractères s’affirment, l’atmosphère devient lourde accentuée par les tiraillements de la faim, les dangers qui peuvent surgir à n’importe quel moment et la quête constante de carburant pour pouvoir avancer toujours plus loin et peut-être atteindre leur but.
On suit avec appréhension ce périple en voiture long de plusieurs centaines de kilomètres dans des conditions climatiques très difficiles (c’est l’hiver en Russie, il fait très froid vous imaginez !), les paysages semblent désertés, des villages et des villes sont livrées à elles-mêmes et au pillage. On se méfie de tout et de chacun, la contamination est toujours possible faisant monter d’autant plus un sentiment de crainte voire de paranoïa. Les obstacles sont nombreux et l’on s’y croirait, la narratrice racontant le moindre détail de ce voyage éprouvant, du quotidien de ses infortunés compagnons de voyage, quasiment aucune ellipse n’est employée ici, on suit donc l’action et le temps qui passe sans jamais rien rater. Certains trouveront cette lecture monotone, ennuyante (je l’ai aussi lu sur le net), j’ai trouvé cela hypnotique, assez novateur et proche dans l’esprit d’un La Route de McCarthy (un ton en dessous tout de même).
Vongozero se lit très facilement, j’ai aimé la souplesse et l’accessibilité de cette écriture très incisive et immersive comme jamais. Les 540 pages se parcourent à vitesse grand V et on en redemande. Ça tombe bien, il y a une suite, Le lac, qui s’annonce comme un huis clos sous haute pression. Je n’attendrai pas aussi longtemps que pour celui-ci pour le lire !
"La Trilogie des magiciens" de Katherine Kurtz
L’histoire : Tout commence lors d'une partie de chasse, quand Brion Haldane, le roi de Gwynedd, meurt d'une crise cardiaque, provoquée par une puissante magicienne derynie. Kelson, encore adolescent, succède à son père. Alaric Morgan, l'un des rares Derynis de Gwynedd qui ose afficher ses origines et ses pouvoirs, sait comment transmettre à Kelson les pouvoirs magiques inhérents à la charge royale dans la dynastie des Haldanes. Kelson en aura grand besoin : révoltes localisées, complots de certains nobles, emprise croissante de la hiérarchie religieuse... Mais au Conseil de Régence, Jehana, la veuve de Brion veut faire condamner Morgan comme traître et hérétique, afin que son fils ne perde pas son âme en étant corrompu par la magie derynie... Situé dans un Moyen Age alternatif, le monde est l'enjeu d'une lutte entre les humains et les Derynis race d'apparence humaine aux pouvoirs psi innés.
La critique de Mr K : Chronique mitigée aujourd’hui pour La Trilogie des magiciens de Katherine Kurtz, première intégrale d’une série de quatre du cycle des Derynis, nom d’une caste de magiciens aux pouvoirs étendus. Cet ouvrage était dans ma wishlist depuis bien longtemps, plus précisément depuis une conférence très intéressante sur les univers de la fantasy qui m’avait enthousiasmé lors de nos premières Utopiales. Malgré une lecture très rapide (4 jours pour 1054 pages), mon bilan est mi-figue mi-raisin avec un ouvrage vraiment prenant, un background bien fouillé mais finalement bien classique et même parfois ringard...
Tout commence comme dans la saga du Trône de Fer de George R. R. Martin avec un accident de chasse pas si fortuit que cela et un royaume qui se retrouve fragilisé. Le jeune prince Kelson va devoir asseoir son autorité avec l’aide de quelques compagnons de confiance, lutter contre des intrigants retors, le fanatisme religieux et la bêtise humaine. Ces trois volumes réunis en un font donc la part belle aux complots de toutes sortes avec en fond thématique l’éternelle quête du pouvoir qu’il soit temporel (le trône du royaume de Gwynedd) ou spirituel avec une lutte d’influence entre une église chrétienne expansionniste (si si !) et les Derynis pourchassés à cause de leur nature propre considérée comme déviante et dangereuse. Les rebondissements sont nombreux, chaque chapitre se dévore facilement et se termine toujours par une punchline ou une situation inextricable (ou du moins qui semble l’être) qui titille la curiosité du lecteur l’incitant fortement à poursuivre sa lecture.
Le récit se déroule dans un moyen âge parallèle. On retrouve les mêmes caractéristiques sociétales : la religion chrétienne et son clergé ; la noblesse, sa hiérarchie complexe et ses obligations morales et militaires. Le bon peuple lui ne semble être qu’un ramassis de moutons auxquels d’ailleurs l’auteure ne prête pas vraiment attention sauf pour souligner leur crédulité voire leur intransigeance envers les Derynis, fanatisés qu’ils sont par la religion dominante et les rites qui règlent leur existence. Les Derynis sont l’élément de fantasy central de cette trilogie. Ressemblant à s’y méprendre à des humains, ils possèdent des pouvoirs qui dépassent l’imagination à condition de savoir les utiliser (contrôle et exploration de l’esprit, guérisons, sorts d’attaques, convocation d’esprits et de créatures...). Ces capacités font peur, attisent la jalousie et a provoqué quelques décennies avant ce récit une véritable chasse aux sorcières marquée par de nombreux massacres et actes immondes commis par des humains se sentant menacés et totalement manipulés par les détenteurs de la sainte morale. Depuis, les Derynis vivent en fugitifs, soit cachés soit ignorants de leur condition, de leur don. La question de leur coexistence avec les humains, la notion de respect et de reconnaissance de l’autre rajoutent une dimension sympathique à l’ensemble même si on reste avant tout dans un ouvrage purement récréatif.
Durant la lecture, on constate qu’il y a peu de descriptions des grands espaces traversés par les personnages (il y a par contre une carte des lieux en début d’ouvrage, yes !). Ici, on évolue plutôt dans les palais, les villes et les forteresses où se jouent alliances et complots. Cela m’a désarçonné et un peu déçu, l’univers entraperçu est foisonnant et j’aurai apprécié avoir plus de détails sur la nature environnante, un aspect plus naturaliste qui aurait complété à merveille le reste. J’ai déploré aussi le fait qu’il n'y ait qu’une seule scène de taverne sur plus de mille pages ! Une vraie hérésie à mes yeux pour un ouvrage de fantasy ! Bon, l’ensemble est tout de même pas mal réussi à commencer par les personnages qui sont plutôt attachants et l’on tremble bien souvent pour eux (faut dire qu’ils cumulent les ennuis tout de même!). Morgan et Duncan sont mes préférés, ces deux êtres entre deux mondes sont des victimes de choix pour tous les fanatiques, les épreuves seront bien nombreuses. Ça bastonne aussi sévère par moment (à la mode Moorcock ou Howard) et la magie a toute sa place avec effets sons et lumières garantis et des invocations rimées du plus bel effet. Franchement, on passe plutôt un bon moment.
Malheureusement, l’ouvrage a des défauts qui l’empêchent de côtoyer les cieux littéraires où résident les meilleurs auteurs du genre comme Tolkien, Martin, Moorcock, Howard ou encore Sapowski. D’abord, l’auteure se complaît à décrire la moindre tenue portée par tous ses personnages, ce n’est pas inintéressant en soi mais quand ça devient systématique, cela n’apporte pas grand-chose à l’ensemble et relève plus du remplissage roboratif. Plus grave, par moment l’auteur verse dans le mélo type Harlequin (genre littéraire que je ne goutte guère) avec des personnages secondaires ampoulés et niaiseux qui ridiculisent quelque peu le récit, ainsi la sœur de Morgan est un bel exemple de personnage plus qu’agaçant qu’on a envie de dessouder au plus vite. Et puis surtout l’ensemble est très classique, sans réelle surprise et les fins abruptes laissent un sentiment d‘inachevé légèrement frustrant.
Reste cependant un bon moment de lecture-détente, La Trilogie des magiciens n’est pas un classique ou alors elle est à réserver à de jeunes lecteurs qui désirent commencer à découvrir ce genre. Ce n’est pas prise de tête, ça se lit vite et on prend tout de même plaisir à explorer ce monde pas si éloigné du nôtre dans les thématiques qu’il développe. Je reste réservé quant à mon envie de poursuivre avec les trois autres volumes du cycle... Dans le genre, il me reste nombre de classiques que je n’ai pas encore lu et qu’ils n’attendent que moi. Wait and see !