"La Compagnie des glaces" tomes 11 et 12 de G. J. Arnaud
L’histoire : Voilà des siècles que la Terre subit une nouvelle glaciation. L’humanité, transie, s’est résignée à vivre sous des dômes, oubliant peu à peu son passé. Pourquoi, de toute façon, se souvenir de l’ancien monde ? Il n’est pas près de revenir...
Mais lorsqu’un groupe de scientifiques se met en tête de faire réapparaître le soleil, Lien Rag, le Kid, Jdrien et tous les autres personnages de la Compagnie des Glaces commencent à comprendre que bientôt, très bientôt, les glaces se mettront à fondre... et provoqueront un bouleversement sans précédent !
La critique de Mr K : Retour dans la fabuleuse saga SF de La Compagnie des glaces de GJ Arnaud avec ce volume réunissant les tomes 11 et 12, tout justes réédités par French Pulp édition début septembre dans le cadre de la rentrée littéraire. Les volumes passent et le plaisir reste, ce n’est pas cette nouvelle lecture qui va me fait mentir entre aventure, ambiance de fin du monde et critique acerbe à travers une métaphore filée certes glacée mais non dénuée d'ardeur.
Nous retrouvons nos héros là où nous les avions laissés. La guerre fait toujours rage entre les compagnies sibériennes et européennes, chacune ne sachant plus vraiment pourquoi le conflit a été déclaré. La trans-américaine elle, continue de prospérer et d’étendre son influence. Jdrien s’est enfui et l’enfant-roux, messie annoncé, commence à développer ses pouvoirs ce qui n’est pas sans attiser les convoitises. Lien Rag a rejoint le Kid et ils travaillent désormais main dans la main. Un événement va bouleverser la donne. En effet, les rénovateurs du soleil, un obscure groupuscule de scientifiques chassés de toute part (la censure est bien en vogue dans ce monde futuriste) ont décidé de faire réapparaître l’astre caché par les poussières de la Lune disparue. L’expérience va fonctionner de manière partielle et provoquer une mini apocalypse. C’est le début de la panique, les compagnies doivent s’unir si elles veulent survivre (du moins certaines) et chacun essaie de sauver ce qu’il peut l'être.
Le tome 11 est l’occasion pour l’auteur de détruire un petit peu tout ce qu’il a élaboré et conçu dans les volumes précédents. En effet, le pire arrive et les compagnies des glaces se retrouvent démunies face à ce changement brusque de climat. Les glaces commencent à fondre, la chaleur monte (chose impensable pour ces millions d’humains enfermés dans des dômes et des trains climatisés), l’ordre établi vacille car tout lui échappe et le chaos s’installe. Cela donne lieu à de belles scènes de chaos, de fuites éperdues de populations terrifiées et le rapprochement étonnant entre puissants qui naguère se méprisaient. Les forces se rééquilibrent et la possibilité que le Soleil rebrille constamment dans le ciel est une éventualité plus que sérieuse.
Au delà des hommes, ce sont surtout les hommes roux qui sont à la peine. Ne supportant pas la chaleur, ils risquent de tous périr. Au même moment que l’astre du jour refait son apparition, répondant à un mystérieux appel, ils s’élancent sur la banquise vers l’Amérique lointaine en emportant le corps conservé dans la glace de leur déesse, la maman de Jdrien. Ce dernier, pressenti comme une sorte de messie se dirige lui-aussi vers ce point de réunion. Véritable récit de l’exode que l’on peut comparer à celui des hébreux dans l’ancien testament (certaines scènes font irrémédiablement penser au récit biblique d’origine), on entre encore plus dans l’intimité et la pensée de ces hommes-bêtes déconsidérés et même asservis par les humains. On sent bien que quelque chose de puissant va se produire, la suite nous le dira sans doute.
J’avais fait part dans ma chronique précédente d’une légère déception concernant le héros principal (Lien Rag) que je trouvais uniquement préoccupé par les joies de la bagatelle, la série glissant malheureusement vers le mauvais roman érotique de gare. Il n’en est rien dans ces deux romans réunis ici, Lien Rag reprend la stature qu’il possédait au début : celui d’un scientifique dégoûté par le pouvoir en place, qui continue ses recherches sur les origines des hommes roux et cherche à améliorer le quotidien de l’humanité. Il est très bien secondé par sa nouvelle compagne Leouan, dont les charmes n’ont d’égal que sa sagacité et sa ruse. Les deux forment un duo détonnant, plongé notamment dans une mission secrète en plein territoire ennemi. Ce fut aussi un réel plaisir de retrouver le Kid qui n’est pas loin de tout perdre et qui d’une épreuve terrible va devoir se relever pour continuer son chemin. On a beau se dire que l’auteur a déjà beaucoup développé ses personnages, il trouve encore le moyen de nous surprendre et d’innover de chapitre en chapitre. C’est en cela qu’on reconnaît les grands feuilletonistes.
L’aventure avec un grand A reprend donc ses droits, les péripéties sont nombreuses et l’on ne s’ennuie pas une seule seconde. Lire le premier chapitre, c’est l’engagement certain d'entrer dans une lecture addictive et plaisante qui procure sensations et réflexions. Du grand art qui n’est pas près de s’arrêter vue l’étendue de la saga originelle. Quitte à me répéter, vivement la suite !
Déjà lus et chroniqués au Capharnaüm éclairé de la saga "La Compagnie des glaces" de G.J Arnaud :
- La Compagnie des glaces tomes 1 et 2
- La Compagnie des glaces tomes 3 et 4
- La Compagnie des glaces tomes 5 et 6
- La Compagnie des glaces tomes 7 et 8
- La Compagnie des glaces tomes 9 et 10
"La Compagnie des glaces" tomes 9 et 10 de G. J. Arnaud
L’histoire : Lien Rag était un aventurier, un rebelle qui s’était dressé maintes fois contre la tyrannie des grandes compagnies ferroviaires. Aujourd’hui, il n’est plus qu’un ingénieur bien rémunéré, choyé par la plus puissante des compagnies, la panaméricaine.
Mais quand les projets de son impitoyable dirigeante, Mrs Diana, mettent en danger la vie de millions de personne, Lien Rag sait qu’il n’a plus le choix : il lui faut, de nouveau, entrer en résistance...
La chronique de Mr K : C'est avec un grand plaisir que je me suis replongé dans la lecture de la saga de La Compagnie des glaces de G. J. Arnaud. On en arrive aux volumes 9 et 10 compilés ici dans un ouvrage de 400 pages faisant une fois de plus la part belle à l'anticipation dans un monde apocalyptique gelé et contrôlé d'une main de fer par des compagnies ferroviaires toutes puissantes qui ont remplacé les anciens États. Encore une fois le voyage fut exquis et immersif à souhait malgré quelques scories qui commencent à apparaître, certaines obsessions de l'auteur qui à mon sens en fait un peu trop.
On retrouve donc nos personnages principaux, Lien Rag, Le Kid, Yeuse et Jdrien qui chacun a fort à faire. L'un doit désormais s'affranchir de la tutelle dominatrice de lady Diana qui pour les intérêts de la Panamérica n'hésite pas à planifier un véritable génocide au nom de l'agrandissement et l'enrichissement de sa compagnie au détriment du droit et de la morale. Ne pouvant plus soutenir cette politique et échappant de peu à un attentat contre la commission de vérification, il tente de s’enfuir vers l’est. Le Kid lui, continue d’étendre sa compagnie ferroviaire en essayant de conserver ses idéaux démocratiques, il doit cependant faire face à des esprits séditieux et le regroupement des Hommes Roux aux abords de la cité. Ces derniers attendent une sorte de messie qui devrait les libérer du joug des humains, ce ne serait nul autre que le fils de Lien Rag, mais Jdrien a disparu...
À travers sa saga, G-J Arnaud en profite pour critiquer en filigrane notre propre monde. Cette fois ci, c’est clairement l’ONU et ses organismes apparentés qui sont visés. On ne peut que rester sceptique face à leur impuissance à agir contre l’incurie de certains pays ou entreprises multinationales. C’est aussi le cas dans ces volumes où finalement Mrs Diana va tout faire pour contourner les lois internationales pour mener à bien ses projets d’hégémonie, toute ressemblance avec les crises ukrainienne et syrienne est fortuite vu la date d’écriture du roman mais ça m’y a diablement fait penser. C’est donc le cœur déchiré qu’on suit les développements de l’histoire qui conjugue les notions de complot, de trahison et d'extermination en masse d’innocents au nom du sacro-saint pouvoir. C’est puissant, bien vu et bien mené.
On continue aussi à suivre des personnages qu’on a appris à aimer. J’ai une tendresse toute particulière pour le Kid et Yeuse qui ayant tout perdu (la compagnie de cirque/théâtre qui les employait a disparu) doivent se refaire entièrement malgré leur disgrâce et leur condition (un nain et une femme). Ils se caractérisent par une intelligence et une capacité d’adaptation hors du commun. Même s’il est moins présent dans cet ouvrage, Jdrien est toujours aussi attachant, il grandit et commence à avoir des velléités d’indépendance car ses pouvoirs se développent et il est irrémédiablement attiré par son peuple qui semble se réunir pour lui. Lien Rag lui m’indiffère de plus en plus, il semble bien trop souvent obnubilé par son appareil génital, l’auteur se complaît à nous livrer ses pseudos états d’âme et désirs, quitte à virer dans le roman érotique à deux balles où les femmes ne sont là que pour satisfaire les désirs du mâle alpha. Ce qui était marrant en début de saga devient un peu lourd-dingue à la longue et a freiné quelque peu mon enthousiasme lors de certains passages mettant en jeu ce perso. J’en viendrais presque à souhaiter qu’il disparaisse pour alléger l’ensemble mais bon, gageons que la suite me donnera tort.
Au delà de cette déception ponctuelle, c’est toujours un bonheur de replonger dans cette terre gelée où le danger peut venir de partout et de n’importe qui, on ne peut que s’incliner devant le talent déployé pour décrire ce monde rude où chacun survit à sa manière malgré des obstacles de plus en plus importants. L’écriture aérienne la plupart du temps immerge immédiatement le lecteur et les 400 pages se lisent quasiment d’une traite quitte à s’endormir très tard. Un bon volume donc qui fait avancer la trame principale et incite à poursuivre sa lecture. Vivement la suite !
Déjà lus et chroniqués au Capharnaüm éclairé de la saga "La Compagnie des glaces" de G.J Arnaud :
- La Compagnie des glaces tomes 1 et 2
- La Compagnie des glaces tomes 3 et 4
- La Compagnie des glaces tomes 5 et 6
- La Compagnie des glaces tomes 7 et 8
"La Compagnie des glaces" tomes 7 et 8 de G. J. Arnaud
L’histoire : On l’a surnommé le gnome, car il mesure à peine plus d’un 1m10. Nain dans un monde recouvert de glace, où tout est étroitement contrôlé par de grandes compagnies ferroviaires, il est devenu le père adoptif de Jdrien, l’enfant hybride de Lien Rag...
Son rêve ? Fonder sa propre compagnie ferroviaire ! Et en faire la compagnie la plus puissante du globe ! Mais entre le envieux qui préparent un coup d’état, la puissante panaméricaine qui complote pour lui voler ses ressources, et Lien Rag qui souhaite toujours, plus que tout, lui récupérer son fils, le Kid arrivera-t-il un jour à réaliser son rêve ?
La critique de Mr K : Retour dans l’univers de la saga de La Compagnie des glaces de G. J. Arnaud dont les tomes 7 et 8 sont réunis dans cette réédition tout juste sortie chez French Pulp éditions. La plus grande saga de SF jamais écrite, revient ici en laissant quelque peu de côté le héros principal Lien Rag pour s’attarder davantage sur son métis de rejeton aux prises avec la cupidité et le racisme des hommes et sur l’aventure commerciale menée par l’ancien aboyeur du théâtre Miki devenu entrepreneur de compagnie ferroviaire. Loin de ralentir la progression de l’intrigue principale, ces deux volumes complètent la caractérisation principale de ce monde futuriste inquiétant et procure un plaisir de lecture inchangé depuis les débuts de la saga.
Lien Rag exilé loin de lui et Yeuse déportée dans un train goulag pour l’assassinat d’un officier, Jdrien (le fils de Lien, fruit de son union contre-nature avec une femelle des hommes-roux) se retrouve confié au gnome et à sa compagne. Aimé et choyé, il va attirer bien des convoitises, notamment celle d’un général dictateur en fin de vie dont les souffrances sont apaisées par la présence de cet enfant différent. Car la jeune pousse a un don qui pourrait se transformer en malédiction si l’on découvrait sa vraie nature... Le gnome pour sauver cet enfant va devoir entreprendre un périple aux confins du monde et cette expérience va l’amener à s’interroger sur ses rêves et aspirations. Commence alors la longue construction d’un empire ferroviaire avec ses moments de gloire et ses difficultés. En parallèle, aux cours de quelques chapitres, nous retrouvons tout de même Lien Rag aux prises avec Mrs Diana, chef de la puissante compagnie panaméricaine qui souhaite mener à bien un projet qui risquerait bien de provoquer une apocalypse...
Loin de spoiler, ce résumé bref laisse entrevoir les nombreuses péripéties qui peuplent ses pages. On ne change pas une technique qui gagne et en bon feuilletoniste qui se respecte, l’auteur accumule les circonvolutions scénaristiques, les coups de théâtre et les visions hallucinées d’un avenir très sombre. Tractations et complots, trahisons et nouvelles alliances, amours et haines, espoirs et déchéances s’alignent à un rythme enlevé sans jamais perdre le lecteur. On reste en cela dans la droite lignée des opus précédents et même si la surprise est rarement de mise, le flot continue englobe le lecteur dans une douce euphorie et dans des tableaux évocateurs à souhait. Cette terre privée de soleil, plongée dans un froid polaire est décidément bien inhospitalière entre le climat rigoureux et les machinations inhumaines ourdies par les puissants. L’espoir a donc peu de place malgré quelques fulgurances joyeuses et de beaux moments de solidarité qui permettent aux personnages principaux de sortir pour un temps la tête de l’eau.
Derrière l’œuvre d’anticipation se cache aussi toujours de belles paraboles et réflexions sur le genre humain et notamment ici sur la conduite du pouvoir. Qu’il soit autoritaire ou démocratique, la puissance grise et donne à voir le pire de l’être humain. Luttes intestines, répression, propagande, domination des faibles et des minorités, autant d’éléments abordés avec finesse et frontalement par un auteur épris d’humanisme. Cela donne donc des passages parfois bien rudes où l’on se prend à s’agacer face à l’incurie de certains acteurs du roman voir leur passivité coupable. Bien vu aussi dans ce recueil, le focus sur la création d’une compagnie ferroviaire (rappelons qu’elles dominent le monde dans cette saga) depuis l’idée jusqu’à son exploitation. Tous ces passages enrichissent le background déjà exceptionnellement développé de cette saga qui n’en finit pas d’étonner et de bluffer par sa densité et sa qualité littéraire.
En effet, on ne peut que reconnaître le talent déployé en tant que conteur et faiseur d’histoire. La langue reste toujours aussi gouleyante, simple et efficace avec de magnifiques passages descriptifs, des moments plus techniques sur les technologies développées et des dialogues au cordeau, sans ajouts inutiles. Certes certains personnages peuvent se révéler à l’occasion un peu trop caricaturaux mais ils se prêtent finalement très bien au genre du feuilleton SF et l’ensemble dégage une force peu commune. Quand on sait qu’il reste plus de 80 romans de base à rééditer, on n'est pas près de voir se tarir une source de plaisir littéraire sans cesse renouvelée. Merci à French Pulp editions pour cette exhumation fort à propos dans un monde contemporain de plus en plus inquiétant.
Déjà lus et chroniqués au Capharnaüm éclairé de la saga "La Compagnie des glaces" de G.J Arnaud :
- La Compagnie des glaces tomes 1 et 2
- La Compagnie des glaces tomes 3 et 4
- La Compagnie des glaces tomes 5 et 6
"La Compagnie des glaces" tomes 5 et 6 de G. J. Arnaud
L'histoire : La lune a explosé et la Terre connaît une nouvelle ère glaciaire. L'humanité est complètement dépendante des grandes compagnies ferroviaires, qui ne se privent pas d'exercer un pouvoir tyrannique. Un homme, Lien Rag, a déjà tenté de se soulever contre leur joug. Désormais réfugié chez les hommes-roux, ces étranges humanoïdes résistants au froid, il n'a plus qu'un seul souhait : cacher le fils hybride qu'il a eu avec une femme-roux, ce qui est formellement interdit...
La critique de Mr K : Retour en terres glaciaires, dans la gigantesque saga d'anticipation de G-J Arnaud qui reparaît depuis quelques temps chez la jeune maison d'édition French Pulp. Ce volume réunit les volumes 5 et 6 de la saga, intitulés respectivement L'Enfant des glaces et Les Otages des glaces, et fait une nouvelle fois la part belle à l'aventure, la prospective et la dénonciation du genre humain à exploiter les autres au mépris de la compassion et du partage.
On retrouve Lien Rag, le héros principal de la série en bien mauvaise posture. Il se cache des autorités car il a commis l'irréparable : aimer et frayer avec une femelle des hommes roux. De leur union est né Jdrien, enfant métisse des deux races qui représente une abomination aux yeux des compagnies qui luttent contre les échanges inter-raciaux et pourchasse sans pitié celles et ceux qui transgressent ce qui s'apparente à un tabou. Les volumes précédents mettaient en lumière les politiques de déportation et d'asservissements dont étaient victimes les hommes roux, ici les propos se veulent plus intimistes même si l'on retrouve par moment quelques éléments de réflexion plus généraux avec l'évolution du conflit en cours.
Car les colonies dans ces deux romans sont plus que jamais en guerre les unes contre les autres, les équilibres sont fragiles et on explore un peu plus la planète avec notamment un séjour dans la lointaine Sibérie où les règles tribales ont repris le dessus et l'inatteignable Amérique, terre d'invention, de renouvellement idéologique mais aussi d'apartheid, clin d’œil aux états esclavagistes du sud. Une fois de plus, on ne peut s'empêcher de faire de nombreux parallèles avec ce que nous avons connu et/ou connaissons encore. G-J Arnaud s'y entend comme personne pour proposer un récit vivant mais aussi intelligent. Ainsi, rien ne nous est épargné des dérives liées à la guerre, notamment le traitement réservé aux prisonniers mais aussi aux civils qui se voient convoyés d'un point à un autre sans autre choix que d’obéir. Bel éclairage en tout cas sur l’état de guerre permanent entretenu par un pouvoir oligarchique prônant des mesures liberticides pour mieux contrôler les masses et par là-même le monde.
L'aventure est une fois de plus prenante, plus particulièrement dans L'Enfant des glaces qui voit notre héros en perpétuelle fuite, le récit s'apparentant à un road movie SF bien maîtrisé et sans temps morts. Les Otages des glaces m'a paru plus lent, parfois répétitif et même quelque peu frustrant. Gageons que la suite reprendra des couleurs et perpétuera l'aspect feuilletonnesque tellement prenant des tomes précédents. Reste des personnages attachants, des passages mêlant évasion, passion et actes de bravoure du quotidien. Je me souviendrais ainsi longtemps de la nourrice lapone qui se sacrifie pour que le fils de Rag puisse vivre, figure christique et innocente confrontée à la haine et au fanatisme. De manière générale, on passe un très bon moment malgré quelques redites et des passages érotiques qui tournent un peu au ridicule, comme si une majorité de personnages pensaient tout le temps à la chose malgré les températures polaires qui règnent sur terre. Mais bon, on ne se refait pas, l’auteur est un coquin, il aime à décrire éveil des sens et autres parties de scrabble sous la couette...
Malgré quelques scories, l'écriture de C. J. Arnaud reste toujours aussi foisonnante et simple d'accès, les amateurs de sensations fortes et d'imaginaires bien trempés seront comblés. Nombre d’éléments de fond sont en suspens et de nouveaux groupes / personnages font leur apparition, garantissant une source inépuisable de développements futurs. Affaire à suivre ici même dans les semaines à venir !
Déjà lus et chroniqués de la saga "La Compagnie des glaces" de G.J Arnaud :
- La Compagnie des glaces tomes 1 et 2
- La Compagnie des glaces tomes 3 et 4
"La Compagnie des glaces" tomes 3 et 4 de G.J. Arnaud
L'histoire : Lien Rag poursuit toujours son combat contre la dictature établie par les grandes compagnies ferroviaires. Mais sur un monde recouvert de glace, comment échapper à l'emprise du chemin de fer ?
Peut-être en se tournant vers le mystérieux peuple Roux, une tribu à moitié sauvage que le froid ne semble pas indisposer.
Et si le secret de leur origine représentait un énorme danger pour les compagnies ?
La critique de Mr K : Il n'a pas fallu longtemps à la toute nouvelle maison d'édition French Pulp pour poursuivre la réédition de la saga de La Compagnie des glaces de G.-J Arnaud dont le premier volume réunissant les deux premiers romans du cycle m'avait tant séduite il y a quelques mois. La réussite est une fois de plus au RDV avec une lecture prenante, dépaysante et provoquant une évasion immédiate. Et dire que trois autres volumes sont prévus pour le courant de l'année 2017 !
Rien ne va plus sur Terre qui comme l'auteur nous l'avait expliqué lors du tome précédent est désormais recouverte de glace et est devenue quasiment invivable pour l'espèce humaine. Les Compagnies ferroviaires règnent hégémoniquement sur notre planète et seule une poignée d'individus s'opposent à l'ordre établi avec plus ou moins de réussite. Lien Rag est de ceux-là et même si on le retrouve au début de cet ouvrage à travailler pour l'armée de la compagnie ferroviaire, on le sait sceptique sur cette dernière et sur les buts qu'elle poursuit. Ayant échappé à la prison et à la mort bien des fois lors des deux premiers romans, le voila plongé en plein conflit interplanétaire entre les deux principales compagnies. Son cœur balance toujours entre son monde et celui des hommes roux, êtres sauvages à la constitution spéciale leur permettant de résister au froid et exploités par le pouvoir en place. Malheureusement pour lui, plus que jamais des obstacles insurmontables semblent se dresser devant lui et il lui faudra tout son courage et toutes ses relations pour s'en sortir...
On retrouve toutes les qualités énoncées lors de ma chronique précédente dans ce volume qui fait la part belle à l'aventure. Ainsi les rebondissements sont nombreux entre quête initiatique, révélations fracassantes, amours et attirances contre-nature, trahison et vengeance. Plus que jamais l'aspect feuilletonnesque de l’œuvre monumentale de G.-J Arnaud (99 romans dans ce cycle tout de même !) éclate au grand jour avec une multitude de personnages secondaires qui viennent enrichir une galerie principale déjà bien fournie. On explore ainsi certaines stations jusque là inconnues et spécialisées dans certaines domaines comme le bois et son recyclage ou encore l'élevage. Point de visite des beaux quartiers avec ce volume mais plutôt une plongée dans le quotidien plus rude des simples gens, des oubliés de la compagnie et surtout des êtres manipulables à souhait.
Car au centre de ce volume, on retrouve le fameux peuple des hommes roux qui attisent la haine et le ressentiment. S'étant détourné des humains qui les exploitaient, le gouverneur de la compagnie lance une grande chasse à l'homme pour les ramener dans le giron du pouvoir et ainsi les réaffecter à leurs emplois désertés. S'ensuivent des dérives que l'on a déjà connu comme les chasseurs négriers d'antant, les camps de triage, l'esclavage et les camps de concentration. Il n'y a qu'un pas à franchir pour faire le lien avec l'esclavage des noirs par les occidentaux ou encore le sort réservé aux tsiganes et aux juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. En sous-texte, la propagande xénophobe et extrémiste religieux avec les néo-catholiques qui se verraient bien revenir au bon temps de l'inquisition et du tout moral qui pénètre les esprits et donne lieu dans la deuxième partie de l'ouvrage à de purs moments d'abjections comme les êtres humains sont capables de commettre quand ils sont plongés dans l'affliction et la souffrance. Certains passages sont donc très rudes et donnent au texte une profondeur encore plus poussée, faisant passer la saga dans une autre dimension, celle des œuvres utiles et divertissantes à la fois.
La SF est donc ici virevoltante, érotique parfois (quel coquin cet auteur !) mais aussi dénonciatrice des travers naturels de notre espèce. L'écriture sert remarquablement bien l'histoire et permet à certains personnages de gagner nettement en densité. On continue aussi à explorer dans cette saga le background inquiétant et saisissant de cette terre privée des rayons salvateurs du soleil qui se retrouve livrée à l'incurie des hommes. Une belle réussite qui en appelle d'autres, je me réjouis déjà à l'idée de lire la suite.
"La Compagnie des glaces" tomes 1 et 2 de G.J. Arnaud
L’histoire : Une nouvelle ère glaciaire s’est abattue sur la Terre. La planète toute entière est recouverte d’une épaisse couche de glace.
Heureusement, les Compagnies ferroviaires ont développé un immense réseau de voies ferrées, sur lesquelles se presse ce qu’il reste d’une humanité frigorifiée... et soumise.
Pour ne pas perdre leurs pouvoirs, les Compagnies interdisent tout progrès qui permettrait à l’humanité de se passer du rail.
Et malheur à ceux qui, comme Lien Rag, tentent de défier leur autorité !
Pourchassé par les Compagnies, encerclé par une nature hostile, il est pourtant bien décidé à libérer l’humanité de l’existence misérable dans laquelle elle est maintenue...
La critique de Mr K : Une sacrée découverte aujourd’hui avec cette réédition toute récente de la saga de La Compagnie des glaces de G.J Arnaud qui a l’origine compte 98 volumes ! Les deux premiers sont réunis en un seul ouvrage ici et la maison d’édition French Pulp compte en sortir deux autres courant 2017 dans leur toute nouvelle offre papier. Il y a du boulot car l’auteur a été prolifique sur cette série et rappelons qu’au total, il a écrit plus de 400 romans dans des genres tout à fait différents comme l’anticipation, le policier et même l’érotisme (avec une variation incroyable de pseudos !). Mais qu’en est-il de cette fameuse Compagnie des glaces ?
Une nouvelle ère glaciaire a débuté sur Terre, suite à l’explosion de la Lune et l’agglomération de ces débris autour de la surface de la planète. Les rayons du Soleil ne percent plus à la surface et un refroidissement terrible s’est installé durablement, la glace a recouvert les terres enterrant les civilisations et facilitant l’émergence de nouvelles puissances : les compagnies ferroviaires. Celles-ci dirigent le monde d’une main de fer dans un nouvel ordre mondial où une classe privilégiée fait ce qu’elle veut et entretient l’humanité dans la servilité et l’obéissance (toute ressemblance avec le monde actuel est purement fortuit -sic-). La menace du froid et de l’extinction de la race humaine a fait son œuvre et rien ne semble en mesure de chambouler l’ordre établi. C’est sans compter l’apparition d’un grain de sable en la personne de Lien Rag, un simple glaciologue qui va se rendre là où il ne faut pas. Il va y faire une terrible découverte qui remet en cause le système entier. Toute son équipe va être décimée et c’est un peu seul contre tous qu’il va devoir tout faire pour révéler la vérité au plus grand nombre et tenter de changer les choses…
Je vous l’accorde la trame est très classique mais le traitement est magique à commencer par un background vraiment puissant et très bien pensé. Comme nous sommes ici dans le genre feuilleton, ne vous attendez pas à de grands passages descriptifs, l’auteur préférant l’action, l’interaction entre les personnages et l’évolution de la narration. Pour autant, il n’en délaisse pas sa description de ce monde glacé et glaçant, c’est donc par petites touches qu’il opère tantôt par un flashback sur les origines de la glaciation, tantôt par un point sur l’organisation de cette société futuriste notamment celle des villes entières roulantes que l’on disperse au gré des desiderata des puissants, les étranges hommes roux qui vivent à l’air libre car supportant les températures extrêmes y régnant (entre -50 et -80 degrés tout de même !). Ainsi nous passons d'espaces luxueux réservés aux dirigeants aux wagons-taudis pour les plus pauvres qui survivent comme ils peuvent sous la menace permanente de l’organe de sécurité des compagnies et du froid, ennemi omniprésent de l’humanité. Peu à peu, on se fait une idée bien précise de cette Terre perdue qui n’a pas encore livré tous ses secrets, certains sont levés durant ces volumes d’autres apparaissent en filigrane et réservent pour la suite des surprises à foison je pense.
Clairement orienté vers l’aventure, le récit réserve de nombreuses surprises au lecteur et les personnages sont loin d’être épargnés. Le héros connaît ainsi de nombreuses désillusions tant en amour qu’en terme de combat contre l’oppresseur. Il n’est pas parfait et se trompe régulièrement. Handicapé par une vieille blessure de guerre à la jambe, on s’attache assez vite à lui et malgré au départ quelques lignes un peu forcées dans son caractère, la nuance fait son apparition par la suite lui donnant une épaisseur séduisante ouvrant sur des horizons insoupçonnés. J’attends de lire les tomes suivants pour me fixer définitivement sur lui. Comme dit précédemment, l’auteur a aussi écrit quelques écrits coquins et cela se ressent dans un certain nombre de passages croustillants qui ne sont pas pour me déplaire et qui ne se révèlent jamais vulgaires et plutôt teintés d’une poésie surannée qui touche toujours juste. Les femmes ont d’ailleurs un rôle primordial dans ce feuilleton à rebondissement, loin d’être de simples potiches ou objets érotiques, elles se révèlent tout à tour des auxiliaires de choix voir des traîtresse sans foi ni loi. L’ensemble est cohérente et répond parfaitement aux canons régissant narration, atmosphère romanesque, anticipation immersive et plaisir de lecture immédiat.
Car c’est là l’essentiel, ce livre vous happe littéralement quand vous en entamez la lecture. L’écriture est d’une limpidité, d’une simplicité et d’une efficacité confondante. Ne laissant jamais aucun lecteur derrière elle, elle procure des sensations multiples et variées au fil des pages qui s’égrainent avec un plaisir renouvelé à chaque chapitre. Certes, une certaine frustration peut apparaître en se disant qu’il y a au total 98 volumes mais il se passe tellement de choses en deux titres conjugués qu’on se dit que ce n’est pas bien grave et que cela rendra l’attente plus belle. Et puis, a contrario d’un G.R.R Martin qui écrit plus que lentement, l’avantage de cette saga c’est qu’elle déjà écrite !
Au final, un très bon livre pour cette nouvelle édition des débuts d’une saga déjà culte pour un certain nombre de lecteurs. J’ai été converti et j’invite chacune et chacun à tenter l’expérience, vous verrez c’est du plaisir à tous les étages et de chouettes moments d’évasion. À bon entendeur...