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Le Capharnaüm Éclairé
26 février 2023

"Y avait-il des limites si oui je les ai franchies mais c'était par amour ok" de Michelle Lapierre-Dallaire

y avait-il des limites

L’histoire : J’ai eu peur de mon désir... Je me sentais aspirée vers le fond, vers une noirceur exquise. Je sentais que vivre, pour une fois, rivalisait avec l’intensité et l’ivresse de la mort.

À force de désir, d’émotion, de douleur, l’auteure de ces lignes a connu plusieurs morts, pour revivre avec une ardeur insolente.

Depuis l’adolescence, elle teste les contours de son corps, de son être et de sa liberté, sans demander la permission d’exister.

La révolte dans la peau, elle dresse un témoignage incisif et lucide sur la manière de vivre, la violence familiale, la maladie mentale, et les relations sexuelles. Comment assumer puis rejeter les agressions subies depuis l’enfance et l’adolescence pour ne plus jamais être le jouet des hommes.

La critique de Mr K : Dans la catégorie des premiers romans, Michelle Lapierre-Dallaire frappe un très grand coup avec Y avait-il des limites si oui je les ai franchies mais c’était par amour ok, un livre incandescent, brut de décoffrage. Véritable déflagration littéraire, ça heurte, ça fait mal, c’est même malaisant... mais c’est profond et essentiel dans son propos. C’est un roman qui vous prend aux tripes d’entrée de jeu, le genre d’ouvrage qui resserre son emprise, vous étouffe, vous transporte et vous déchiquette sans vergogne tout en nous rendant totalement accro. Une très très grosse claque pour ma part.

Le livre s’ouvre sur un "avertissement" annonçant que le roman aborde des sujets sensibles : "troubles de la santé mentale, suicide, agressions sexuelles, pédophilie, violence, troubles alimentaires, alcool et drogues". Il est clair que les âmes sensibles peuvent passer leur chemin, le propos est bien borderline, totalement barré, extrême. Pour autant pour les courageux, les amateurs de récits jusqu’au boutiste (et j’en fais partie), l’expérience est totalement enivrante, fascinante et au final totalement enthousiasmante malgré des situations rudes et un personnage totalement en roue libre.

L’auteure / narratrice a vécu des choses affreuses dès son plus jeune âge car à partir de ses cinq ans, elle a été régulièrement abusée par un beau père pédophile. La mère finit par se suicider bien plus tard mais aura laissé faire... Autant vous dire que ça vous détruit une personne, un psychisme, et le récit s'en fait l’écho à travers une structure générale chaotique (du moins en apparence) où Michelle Lapierre-Dallaire ne respecte pas la chronologie mais propose des "confessions" instantanées qui s’entrechoquent temporellement entre flash-back et présent, entre la jeune femme désaxée et la petite fille désorientée et exploitée.

La jeune adulte se livre totalement et a pour le moins une sexualité libérée, déviante diront les pudibonds. Elle poursuit à travers ses aventures d’un soir une forme de quête d’amour, de reconnaissance, tout ce qu’elle n’a jamais vraiment connu. C’est profondément mélancolique, désespérant même de voir ce comportement auto-destructeur, cette folie douce, ce désordre mental exposé à nu causé par une souffrance extrême et une perte de repères totale. Mais on s’attache à elle, on veut qu’elle s’en sorte, que cesse sa consommation inextinguible de sexe, de drogue. On l’aime nous et on aimerait tellement qu’elle aille mieux.

Le style d'écriture m’a fait pensé à du Despentes, c’est crû, c’est rude, c’est féministe. On est dans le frontal, le direct à l’estomac littéraire au service de personnages forts, de rébellion incandescente et de dénonciation de la perversité humaine notamment la misogynie qui a entouré l’héroïne durant la majeure partie de son existence. La langue oralisante, thrash et poétique à la fois m’a bien souvent laissé pantois et admiratif malgré des crispations et des nœuds au ventre. C’est aussi pour ce genre d’expérience que j’aime autant la lecture. Un authentique chef d’œuvre à mes yeux.

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Commentaires
M
On dirait bien un uppercut littéraire ! C'est autobiographique ? Ou c'est une fiction ?
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