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Le Capharnaüm Éclairé
21 décembre 2022

"Les fins de moi sont difficiles" d'Hubert Ben Kemoun

bk

L’histoire : Mathilde est prête à tout pour s'intégrer dans son nouveau lycée. Á tout. Quitte à dépasser les limites. Un jour la rumeur se répand, l'accusant d'avoir trahi un de ses amis. Mathilde lutte mais seule, elle ne tiendra pas bien longtemps...

La critique de Mr K : Il y a d’abord cette couverture sublime à sa manière, qui attire irrémédiablement l’œil sur l’étagère des nouveautés du CDI de mon établissement, ce visage enfoui dans le néant, ce regard qui interpelle, qui interroge. Puis il y a un nom, Hubert Ben Kemoun, un auteur jeunesse reconnu et que j’ai déjà lu par deux fois avec un plaisir certain. Il n’en fallait pas moins pour que j’emporte Les fins de moi sont difficiles à la maison pour une lecture express et émouvante.

Mathilde vient d’arriver dans un nouveau lycée et comme tout le monde dans cette situation, il faut faire son trou. On choisit son masque, on se calque sur les autres pour pouvoir se sentir reconnu, intégré voire aimé. Très vite, elle s’est rapprochée de Camille et Selma, deux filles de sa classe fort en gueule, "populaires" et surtout qui n’ont pas froid aux yeux. Le roman débute par une scène de "fauche" dans un magasin de fringues, Mathilde fait diversion pendant que ses deux copines enlèvent des antivols et piquent tout ce qu’elles peuvent dans les cabines d’essayage. C’est l’hybris, le sentiment d’invulnérabilité, l’insouciance et le frisson qui les guident. Ce n’est pas un coup d’essai, cela dure déjà depuis un certain temps. Vous imaginez bien que tout cela va être bouleversé lorsqu’elles vont finir par se faire chopper, que certains camarades vont dépasser les bornes et qu’une rumeur d’abord insidieuse puis teintée de menaces et d’actes terribles va faire redescendre Mathilde sur terre et la voir affronter une véritable meute...

On s’attache immédiatement à Mathilde. Très bien croquée, j’ai aimé son franc parlé, son goût pour les bons mots, les beaux textes, sa relation particulière avec sa professeur de français, ses incertitudes et ses doutes. Elle glisse dans le n’importe quoi pour se sentir entourée, elle a bien conscience des limites entre le bien et le mal mais l’attirance est trop grande et son nouveau statut la presse d’imiter ses copines. Mais tout est éphémère, les illusions vont tomber, livrer des vérités sur la nature humaine qu’elle va prendre en pleine face. On a vraiment le ventre noué tout du long, l’évolution du récit laisse peu d’espoir et pourtant...

De manière générale, la reconstitution du microcosme scolaire et familial sont très réalistes. Pas d’effets de manche, de caricature trop poussée des personnages, de futilité stylistique, on va à l’essentiel, dans le vrai et ça touche en plein cœur. Les erreurs d’appréciations des adultes, les incompréhensions qui en résultent, l’adolescence et ses contradictions, le lien parent-enfant, la bêtise, le désespoir face à l’adversité sont décrits avec finesse, une justesse de tous les instants. C’est rude à encaisser par moments, la cruauté se dispute parfois à la stupidité mais à cet âge, la conscience paraît bien enfouie sous des couches d’apparat, de posture et de logiques binaires.

La lecture de cet ouvrage s’est donc révélée un plaisir de tous les instants, un one-shot efficace, édifiant et prenant que l’on relâche uniquement au mot fin. À mettre entre toutes mains, y compris celles de lecteurs moins aguerris, Mathilde devrait les toucher et les emporter avec elle.

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Commentaires
H
Merci infiniment pour votre lecture et vos mots. Hubert Ben Kemoun
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