couv26404026

L’histoire : Une virée dans un Vietnam reconstitué, vaste parc d'attractions où de riches touristes jouent et rejouent à la guerre.

L'Enfer tel que l'a imaginé Dante débarque sur Terre, mais uniquement pour les télévangélistes et leurs ouailles.

Grâce aux Résurrectionnistes, la Mort est enfin vaincue : leur technologie de pointe ramène à la vie vos chers disparus... jusqu'à un certain point.

Le cancer vous fait peur ? Attendez de savoir à qui profitent les métastases pour avoir vraiment peur...

La critique de Mr K : Ça faisait un bail que je n’avais pas lu Dan Simmons (décembre 2017, la honte !), un auteur que j’apprécie tout particulièrement. C’est à l’occasion du défi Instagram Mai en nouvelles que j’exhumai le présent volume de ma PAL gargantuesque. Avec Le Styx coule à l’envers, j’explorai une nouvelle facette du maître : l’art de la nouvelle, un genre que j’aime beaucoup. Quand on connaît la propension de Dan Simmons à livrer de gros pavés, je me demandais bien ce que ça allait donner. Loin d’être une déception, ce recueil s’est révélé très plaisant.

Douze nouvelles, douze voyages bien barrés qui oscillent entre fantastique et science-fiction, douze pièces précédées d’une courte introduction de Dan Simmons pour présenter la genèse du texte, raconter une anecdote ou livrer une pensée ou un coup de gueule. J’ai aimé ce principe qui permet de recontextualiser l’histoire à venir et livre des éléments intéressants sur le procédé d’écriture et parfois sur la personnalité de cet écrivain décidément hors norme.

Les sujets traités sont très variés. Une société où l’on peut faire revenir les morts (la nouvelle éponyme) avec une mère de famille qui revient mais qui n’est pas tout à fait la même. On suit ce retour via la voix de son jeune fils partagé entre joie, incompréhension et peur sur fond de dilemme moral et de questionnement éthique sur la recherche scientifique. La nouvelle est assez effroyable et m’a cueilli d’entrée. Dans Vanni Fucci est bien vivant et il vit en Enfer, un esprit revient des enfers mettre le souk sur le plateau d’une télévision évangélique. C’est dark et jouissif à la fois, on sent bien que Simmons a ces moralisateurs dans le nez. On enchaîne ensuite avec Passeport pour Vietnamland où des touristes peuvent s’immerger et même participer à la guerre du Vietnam. Très vite les frontières entre virtuel et réel se brouillent. Cette nouvelle dérangeante et âpre fait partie des meilleures du lot avec une tension de plus en plus palpable et un lecteur totalement conquis.

Deux minutes et quarante cinq secondes voit des hommes discuter dans un train des montagnes russes d’un projet top secret. Pour le coup, il s'agit à mes yeux de la nouvelle la plus faible de cet opuscule, j’ai été très vite perdu et je n’ai pas saisi la portée du texte. Heureusement, suit la terrible nouvelle Métastases où un fils nous raconte l’agonie et la mort de sa mère des suites d’un cancer. Il commence à avoir des visions d’étranges créatures qui rodent autour des malades. Qui sont-ils ? Que veulent-ils ? On nage ici en plein fantastique mâtiné d’une réflexion très profonde sur le deuil et la manière de le surmonter. Un grand crû ! Dans Douce nuit, sainte nuit, l’auteur nous sert un récit de noël post-apocalyptique bien saisissant avec la venue d’un prédicateur dans une communauté éloignée de tout. Le monstre n’est pas forcément celui auquel on pense, la fin est renversante, j’ai adoré.

Dans Mémoires privées de la pandémie des stigmates de Hoffer, Dan Simmons nous fait lire la lettre d’un père à son fils alors qu’une terrible épidémie a défiguré l’humanité selon les pêchés de chacun. L’amateur de David Cronenberg que je suis a été comblé avec un luxe de détails peu ragoûtants et une réflexion intéressante sur le Bien et le Mal. Là encore la fin renverse tout et laisse le lecteur pantois. Les fosses d’Iverson m’a beaucoup moins plu, ce voyage dans des souvenirs de la guerre de sécession m’est apparu brouillon dans sa construction et sans réel intérêt en terme de trame. Un coup dans l’eau pour le coup. Le conseiller lorgne lui dans le thriller hardboiled où un conseiller d’éducation se révèle être un ange exterminateur qui règle les problèmes familiaux de ses élèves avec la manière forte. Jouissif et un pur shoot d’adrénaline, Simmons excelle dans l'exercice. Dans La photo de classe, une professeur passionnée par son métier continue à faire classe malgré un apocalypse zombie. Dur dur d’enseigner à des créatures non mortes mais elle a de la suite dans les idées. Ma nouvelle préférée et un texte d’intro où je me suis pleinement retrouvé dans la définition que donne Simmons du métier, l’auteur lui-même rappelons-le a été enseignant dans sa jeunesse. Le récit alterne moments branques et pensées intimistes très touchantes, on passe par toutes les émotions.

Dans Mes copsa mica, un homme part sur les trace des Dracula dans les pays de l’est et c’est le prétexte pour livrer des réflexions sur la mort, la pollution, l’humanité et la planète. Un récit précurseur dans son genre bien que peu digeste. Pas complètement réussi mais pas complètement raté non plus... Enfin, À la recherche de Kelly Dahl clôture le recueil avec une histoire de quête très poétique et remplie d’émotion. Différente des autres textes, elle offre un récit touchant et enivrant à la fois.

Malgré deux faux pas, on passe donc un très agréable moment en compagnie de Dan Simmons qui maîtrise parfaitement le genre et offre des textes surprenants et prenants à la fois. L’écriture est toujours aussi subtile et se fait ici maligne avec des chutes que bien souvent on ne voit pas venir. Personnages ciselés, contextes et background parfois incroyables, on se laisse porter avec plaisir et l’on ressort heureux de cette lecture pas tout à fait comme les autres. Avis aux amateurs !

Lus et chroniqués du même auteur au Capharnaüm éclairé :
Ilium
Olympos
Terreur
L'Homme nu
Les Chiens de l'hiver
- L'épée de Darwin
- Revanche