dimanche 27 février 2022

"Cet escape game est une vraie tuerie" d'Arthur Tenor

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L’histoire : Dans une petite ville, 5 adolescents Aristide, Charlotte, Valentin, Esther et Cédric, ont envie de rompre avec la monotonie de leur existence de collégiens. Ils acceptent de tester la nouvelle version d'un escape game réputé dans le parc d'un château voisin. Le marché : le jeu est gratuit à condition qu'aucun des 5 n'abandonne en route. Le lieu est impressionnant, planté à côté d'un petit cimetière. Ils sont accueillis par une réplique plus vraie que nature du conte Dracula et commencent le parcours dans cette maison qui rassemble toutes les facettes de l'horreur... Ils devront résoudre les énigmes et déjouer les pièges tendus par des personnages échappés des pires cauchemars, des morts vivants à Frankenstein... Mais une présence surnaturelle hante les lieux... Quelles seront leurs surprises jusqu'au twist final ?

La critique de Mr K : Chronique d’une lecture fun et fraîche aujourd’hui avec ce roman d’horreur jeunesse sorti en 2021 chez Scrinéo. J’ai connu Arthur Tenor par hasard lorsqu’un extrait d’un de ses livres avait été retenu pour composer le cœur d’un sujet de DNB. J’avais aimé ce court texte et dévoré l’ouvrage dont il avait été tiré : Le Livre dont vous êtes la victime. C’est donc avec une certaine impatience que j’entamai cet ouvrage emprunté au CDI de mon établissement. Je dois avouer qu’au final, même si ce livre ne renouvelle pas le genre et propose souvent des scènes convenues, les pages se tournent toutes seules et le plaisir de lire est au rendez-vous.

Tout débute dans la cour d’un collège privé où deux potes prennent connaissance de l’existence pas très loin de chez eux d’un Escape Game novateur basé sur les films d’horreur cultes situé dans un très vieux château consacré. Très vite, ils réunissent trois autres connaissances et ils partent en scooter le lendemain pour une expérience qu’ils ne sont pas prêts d’oublier ! Les lieux qu’ils découvrent sont impressionnants, le château et son domaine attenant se prêtent parfaitement à ce type de jeu et de thématique ! On baigne littéralement dans le gothique... et les hostilités démarrent très vite ! Après un accueil pour le moins glacial, les énigmes vont s’enchaîner, les esprits s’échauffer et les événements se précipiter entre comédie et drame avec un jeu qui va très vite dépasser nos cinq lascars. Le dénouement viendra les cueillir ainsi que le lecteur avec un ultime retournement de situation très malin.

Les cinq adolescents sont plutôt attachants, cinq archétypes certes mais cinq individualités qui se complètent bien et qui donnent lieu à des échanges et des scènes tragi-comiques vivantes et entraînantes. Bon, on est rarement surpris, la caractérisation est légère mais on se laisse porter par leur esprit frondeur, leur propension à se la raconter et à tout tourner en dérision alors que quelque chose est en train de se jouer. J’ai beaucoup souri à leurs blagues pourries, leurs punchlines venues de nulle part ou encore leur comportement parfois débridé. Ils ont vraiment parfois des réactions totalement à l’ouest et l’on s’amuse beaucoup. Au delà de ça, l’aventure révèle des fêlures, des réalités du quotidien par forcément agréables dans la vie de ces jeunes, et des pulsions réellement inquiétantes par moment (je pense notamment au parallèle fait avec le Dr Jekyll et Mister Hyde). Le mélange est subtile en tout cas entre tension et comédie, ça marche bien et les pages se tournent toutes seules.

Les références sont nombreuses dans ce récit et les amateurs du genre se régaleront. Il y en a pour tous les goût, allant d'un Jack Torrance particulièrement inquiétant à la poupée Annabelle qui a fait frémir plus d’un de mes élèves (perso, elle m’a toujours laissé de marbre). On visite la cuisine du Dr Lecter, on rend visite à une jeune fille alitée possédée par le Démon, on croise des vampires et des zombies... La frontière devient au fur et à mesure mince entre réel et fantastique. L’auteur se plaît à brouiller les pistes, à mixer les genres et bien malin la jeune âme qui saura démêler le vrai du faux avant l’ultime chapitre. Nos héros quant à eux ne font plus trop les malins vers la fin...

D’une lecture très agréable, Arthur Tenor marquera des points auprès de tous avec une écriture légère, incisive et qui va à l’essentiel. Ce roman plaira à tous les jeunes qui aiment doucement se faire peur, amateurs de mystères et de bons trips entre copains. Pour ma part, ce fut un bon moment de lecture qui à défaut d’être original m’a procuré un plaisir simple et jubilatoire par moment.

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jeudi 24 février 2022

"Truffe" de Fanny Britt et Isabelle Arsenault

Place aujourd'hui à une maison d'édition québécoise avec un album jeunesse au format carré et au concept original. C'est une totale découverte pour moi et je dois dire que j'ai souri plus d'une fois à la lecture de ces pages. Nos amis du Québec ont aussi de très intéressantes propositions littéraires. Voyez plutôt !

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Le contenu : Ce livre réunit 3 histoires :
- Truffe rockstar : Truffe rêve de former un groupe de musique avec Flo et Ryad, ses meilleurs amis. Bon, il faudra d’abord apprendre à jouer d’un instrument.
- Truffe aime Nina : Depuis que Truffe et Nina sont amoureux, ils sont devenus timides et ne savent plus comment se parler. C’était tellement plus facile quand ils étaient amis !
- Truffe devant l'existence : L’arrière-grand-mère de Truffe vient de mourir à l’âge de quatre-vingt-dix-neuf ans. Le jour des funérailles, Truffe se met à contempler le monde qui l’entoure avec une sensibilité accrue.

La critique Nelfesque : En préambule, je dois vous dire que je ne suis pas tombée sur cet ouvrage par hasard. Quand j'ai vu Isabelle Arsenault à l'illustration, je n'ai pas réfléchi très longtemps avant de me le procurer. En effet, je vous avais déjà parlé de cette incroyable illustratrice en août dernier avec le très bel album "Tu es chez toi" pour lequel j'avais eu un véritable coup de coeur, autant pour la forme que pour le fond.

Rien à voir ici mais il y a des noms comme ça qui vous sautent directement dans la rétine dès que vous les recroisez. Nous allons faire la connaissance ici d'un petit garçon du nom de Truffe, le petit frère de Louis bien connu des adeptes des albums de La Pastèque et que l'on croise ici encore.

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"Truffe" rassemble 3 histoires mettant en scène le jeune homme et ses amis et/ou sa famille dans son quotidien. Ce dernier veut devenir une star du rock. Il va monter son groupe avec ses 2 meilleurs amis, "Les plantes carnivores", et le chemin vers la célébrité n'est pas sans embûches. Il leur faut un nom, un style, apprendre à jouer d'un instrument et des compositions... Truffe dort musique, mange musique, court musique, vit musique. Le suivre dans ses aspirations est très attendrissant. Par la suite, on va le découvrir amoureux, appréhendant les premières sensations physiques de l'amour et les premières interrogations. Encore une fois ici, on ne peut qu'être attendri. D'autant plus que Truffe a une personnalité très attachante, c'est un jeune garçon sensible, volontaire et inventif. La dernière histoire enfin place Truffe face au décès de sa grand-mère et là nous entrons avec lui dans une dimension plus intime, une expérience qui le touche au plus profond et dans laquelle nous nous retrouvons tous. La tristesse de Truffe est palpable...

Les illustrations savent être tour à tour douces et poétiques, originales et inspirées ou minimalistes et percutantes. Un savant mélange au petit goût de nostalgie du rock des années 60/70. De nombreuses références sont d'ailleurs présentes et pour les adeptes de cette époque que nous sommes à la maison, ce côté vintage est très apprécié. Et puis c'est une chouette entrée en matière pour les plus jeunes.

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Petit bonus, il est aussi possible de se procurer le vinyle qui va avec l'album jeunesse sur le site de la maison d'édition ou directement chez La Pastèque au Québec (oui, pour nous français, ça fait un peu loin). Un très beau double vinyle à la couleur des cheveux de notre petite mascotte. L'un d'eux est la version audio de l'album et l'autre nous permet d'appréhender tout le talent de Truffe et son groupe avec deux de leurs titres originaux. C'est encore une fois très attendrissant. Je ne vous cache pas qu'à bientôt 40 ans ce n'est pas le genre de titres que j'écouterai tous les jours (sans vouloir porter ombrage au talent de ces 3 artistes en herbe) mais je peux vous dire que ma fille de 2 ans apprécie ! Cette proposition apporte une touche de fraîcheur supplémentaire à l'ensemble et rend tout cela encore plus palpable. Où s'arrête le réel ? Où commence l'histoire ? C'est une bien belle idée que ce petit avant goût musical pour faire rêver nos enfants ! A noter également que la jaquette du livre se déplie pour révéler une jolie affiche. Quand je vous disais que le concept était original ! Ils ont travaillé dur chez La Pastèque pour offrir ainsi à leurs lecteurs toute une ambiance joyeuse, fun et colorée. Bravo à eux !

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mercredi 23 février 2022

"Petit traité de taxidermie" de Maja Thrane

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L’histoire : Le récit du quotidien de Björn et Vera, un jeune couple de néoruraux habitant dans une maison au coeur de la campagne, anciennement occupée par un intendant taxidermiste du muséum d'histoire naturelle de Göteborg.

La critique de Mr K : Je vous invite à découvrir aujourd’hui un objet livresque non identifié à la poésie étrange et au propos alambiqué avec le Petit traité de taxidermie de Maja Thrane. On aime ou on déteste. Perso, j'appartiens à la première équipe !

Ce très court roman d’une centaine de pages réunit des moments de vie qui se sont déroulés dans une demeure perdue au fond de la campagne suédoise profonde. On partage ainsi des parcelles d’existences notamment celles de Björn et Véra, deux citadins venus chercher une forme de paix dans un lieu isolé, leurs amis, leurs voisins et l’on croise très régulièrement un zoologiste / taxidermiste qui a réellement existé et a habité la maison (August Wilhelm Malm 1821-1882).

Divisé en très courts chapitres, de quelques lignes à deux pages maximum, l’auteure nous invite à laisser notre sens logique au vestiaire, à plonger directement dans sa matière poétique et à nous laisser porter par son verbe. C’est assez déroutant, on ne sait jamais vraiment où l’on va, quel est le but et parfois les symboles cachés derrière cette lecture... mais finalement, on s’en fiche un peu, l’essentiel est ailleurs. Dans le bonheur de lire une langue splendide, magnifiquement traduite (sacré boulot je pense, même si je ne suis pas un spécialiste), une écriture qui s’adresse à l’âme, belle, musicale et âpre à la fois.

On saisit cependant bien quelques thématiques qui reviennent, des interrogations éternelles et propres à notre espèce : la notion d’existence, de sa permanence et de sa fin ; notre rapport à la nature (avec de très belles évocations) et notre propension à la transformer selon nos envies (chapitre Nature et Culture du programme de philosophie de nos années de Terminales -sic-), le lien passé / présent qui nous construit et nous enrichit, la science et les croyances plus ésotériques... Par petites touches, des allusions souvent fugaces, l’ensemble porte en lui une puissance évocatrice certaine et engendre une succession d’émotions diverses et porteuses de sens.

J’ai bien conscience que cette chronique ne livre pas beaucoup d'éléments sur le contenu mais c’est typiquement le genre de livre qu’on doit découvrir seul, on y apporte ce qu’on veut et on en retire chacun je pense quelque chose de différent car ici on ne rationalise pas, on expérimente, on ressent. Un livre vraiment différent au charme étrange et puissant. À la croisée des genres et des styles.

mardi 22 février 2022

"Pollution" de Tom Connan

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L’histoire : David, jeune diplômé au chômage partiel, quitte un Paris confiné pour une expérience de woofing dans le Cotentin. Sur place, il retrouve Alex, fils de fermier, et Iris, une addict des réseaux sociaux. Tandis qu'il pensait fuir la pollution et l'épidémie, David se retrouve au cœur d'un scandale sanitaire dont il n'imaginait pas l'ampleur.

La critique de Mr K : Belle découverte que Tom Connan, auteur du remarqué Radical, premier roman décrit par beaucoup comme une très belle première œuvre. Pour ma part, mon premier contact avec ce jeune (et très talentueux) écrivain s’est faite avec Pollution, paru en ce mois de janvier chez Albin Michel. À travers l’expérience que mène David, le héros, c’est tout notre monde, notre manière de vivre et les changements ultra-rapides que nous connaissons (y compris la période pandémique actuelle) que dissèque un auteur inspiré qui livre un portrait désenchanté de la France mais aussi des aspirations de sa génération. Édifiant.

David n’en peut plus de Paris. En chômage partiel pour cause de Covid, il est à la recherche d’un second souffle. Son existence parisienne ne lui convient plus et une annonce de woofing attire son attention. Contre des travaux à la ferme, le voila nourri et blanchi dans une exploitation agricole du Cotentin tenue par Alex (le fils du propriétaire parti pour raison médicale), en compagnie d’Iris une instagrammeuse compulsive qui cherche à se lancer dans le monde du virtuel en créant une chaîne Youtube. S’ensuivent la prise de contact initiale, des rapports humains changeants, des fractures et des retrouvailles... Puis peu à peu, une menace sourde, les animaux ne vont pas bien et bientôt meurent. Les deux jeunes woofeurs et leur compagnon décident de s’emparer du net pour porter leur voix (sur l’insistance forte d’Iris). Cela ne va pas aller sans soucis avec certains locaux qui voient d’un mauvais œil cette mauvaise publicité pour la région et des craintes quant à la pérennité de leurs emplois.

Ces péripéties occupent en fait seulement la moitié de l’ouvrage. C’est bien mené, les personnages sont caractérisés comme il faut avec parfois un peu d’outrance (j’ai vraiment eu du mal avec Iris mais elle est tellement le fruit de notre époque...), l’action est lente mais monte crescendo vers une vérité qui gène et qui va se prolonger ensuite quand l’expérience de woofing va s’achever. Je n’ai pas vraiment été surpris par le déroulé, on est dans le convenu. Pour autant, on ne s’ennuie pas un instant, on se laisse porter par le souffle distillé par ces trois jeunes que la vie n’a pas épargnés et qui tentent de sortir de l’ornière. Mais finalement la trame principale se révèle n'être qu’un prétexte...

Un prétexte pour l’auteur, à travers les réflexions de David, de porter sa vision désabusée sur notre monde actuel. Il y a de quoi faire et le spectre balayé est large dans cet ouvrage. Scandales d’État, politique internationale inique, le tout numérique et ses dangers, l’industrialisation de la nourriture, l’égoïsme et la turpitude des puissants, la pauvreté galopante, le tour de vis sécuritaire, la gabegie du gouvernement face à la pandémie, la dépression et la solitude en plein confinement et bien d’autres choses que je vous laisse découvrir. En fil rouge pour relier tout cela, la jeune génération qui n’a pas de réel idéal et se sent perdue. C’est remarquablement amené au fil du récit et finalement, c’est ce que l’on retient le plus dans cet ouvrage qui s’apparente à un long cri déchirant et qui à défaut d’inspirer de l’optimisme, permettra à beaucoup de lecteurs (peut-être moins portés sur l’actu et la philosophie que moi, toute proportion gardée évidemment) de gagner en lucidité. Et il en faut par les temps qui courent !

Frais dans le style, moderne mais à la fois très littéraire par moment, l’ouvrage est très facile à lire, diablement addictif. C’est rude dans le contenu, on ne rigole pas beaucoup mais qu’est-ce que c’est bien de lire cela dans un livre grand public. Si un jour les masses réalisaient tout cela, réagissaient face à ce vidage de neurones institutionnalisé et l’exploitation dont nous sommes tous victimes d’une manière ou d’une autre, je pense que ça tremblerait en haut lieu. Une très chouette lecture que je vous conseille vivement.

lundi 21 février 2022

"Rosemonde : Tout simplement superstar" de Didier Lévy et Ronan Badel

Partons aujourd'hui à la rencontre d'un nouveau personnage à découvrir en librairie avec les 2 premiers tomes qui lui sont dédiés, "Tu parles d'un prénom !" et "Tout simplement superstar". Rosemonde est une fillette prenant vie sous les plumes littéraires et graphiques de Didier Lévy et Ronan Badel qu'il sera intéressant de suivre...

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L'histoire : - T'en mets beaucoup du rouge, non ? C'est un maquillage d'Halloween ? De clown ?
- Un maquillage de Rosemonde, juste.
- Et tu vas sortir comme ça ?
- Je pense que oui, mon cher Charlus.

La critique Nelfesque : Rosemonde est une petite fille sûre d'elle. Audacieuse, elle assume qui elle est et se moque du regard des autres. Elle est différente par son prénom qu'on ne voit pas tous les jours mais aussi par ses choix. Comme le sont tout autant les autres petites filles et petits garçons qui peuplent les cours de récréation. Dans ce tome-ci, elle a décidé de sortir promener son poisson en poussette. Mais avant cela, elle se maquille très précautionneusement devant le miroir et choisit ses plus beaux fards et rouge à lèvres.

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Accompagné de son chien Charlus qui est bien plus frileux que sa maîtresse face au regard d'autrui et de son poisson rouge Gaston (qui, il faut bien le dire, n'a aucun avis sur la question), elle va nous montrer par l'intermédiaire de son ami à 4 pattes que parfois oser suffit à se libérer de ses craintes. C'est avec beaucoup d'humour et avec des histoires très ancrées dans notre époque que les auteurs nous invitent à prendre du recul sur notre société où la "norme" est imposée à chaque coin de rue.

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Avec un message très lisible et clair, des dessins très expressifs et des personnages attachants, cette nouvelle série plaira à coup sûr aux plus jeunes lecteurs, à partir de 4 ans. Et puis, il n'est jamais trop tôt pour apprendre le respect de la différence et la confiance en soi. Rosemonde permettra alors d'ouvrir le dialogue et de définir un cadre avec les parents, tout en s'amusant !


dimanche 20 février 2022

"Ma'at" de Simon G. Phelipot

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L’histoire : En 2051, sur Terre, la notion de gouvernement a disparu. Un libéralisme sans limite a supplanté le capitalisme et l'ordre mondial est désormais entre les mains d'une poignée de sociétés commerciales ultra puissantes. A Bombay, Isis, une jeune fille orpheline, est recueillie par Wadi, un chercheur généticien ami de ses parents défunts. Ce dernier a un fils, Soh, et les deux enfants livrés à eux-mêmes tissent ensemble une relation fusionnelle qui va petit à petit se transformer en amour passionnel. A la mort de Wadi, Soh disparaît sans laisser de trace. Partie à sa recherche, Isis est enlevée et transportée dans un centre de recherche aux abords d'un cratère lunaire où elle subit diverses expériences génétiques. En 2093, au nord de l'Inde, les satellites détectent une forme de vie humaine au beau milieu d'une pluie de météorites. Isis ?

La critique de Mr K : Aujourd’hui, je vais essayer de vous rendre compte de ma lecture du diptyque Ma’at de Simon G. Phelipot, un cadeau de Noël de ma très chère Nelfe. J’ai bien dit "essayer" tant ce fut une expérience à nulle autre pareille, l’ouvrage combinant planches narratives pures et tableaux dantesques, proposant un voyage quasi subliminal par moment. On est ici dans de la SF visionnaire et intimiste qui fascine et décolle littéralement les rétines.

Le background décrit dans le résumé ci-dessus donne le ton. La Terre a été livrée à des entreprises privées dont le seul but est l’enrichissement et quelque part l’asservissement volontaire de la population. On suit Isis, une jeune fille sans attaches sur qui on va mener des expériences génétiques qui vont la transformer en quelque chose d’autre, un être hybride qui détient un pouvoir incommensurable dont elle n’a pas conscience de prime abord et dont elle ne mesure pas ensuite la portée et la puissance. Différents flashback, le rôle de Soh (ami fusionnel d’Isis) et d’autres personnages secondaires densifient le récit sans en livrer trop. Il faut accepter de ne pas tout comprendre, l’auteur semant les indices comme autant de petits cailloux que l’on se doit de relier entre eux pour saisir les tenants et aboutissants d’un récit complexe et alambiqué.

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L’ésotérisme de l’œuvre n’est aucunement un frein à la lecture tant on est émerveillé par les planches qui se succèdent et qui s’apparentent bien souvent à de véritables tableaux dans lesquels on s’immerge avec émotion. Beauté formelle des visages et des corps, scènes d’Apocalypse saisissantes, illustrations purement abstraites faisant appel à nos ressentis et nos émotions contradictoires, c’est un véritable voyage intérieur qui frappe autant qu’il interpelle. Les dessins explosent en couleur, contiennent une multitudes de détails et s’observent, se décortiquent avec un plaisir renouvelé. Il y a peu ou pas de texte bien souvent ce qui impose une lecture de l’image emplie de sens et de connotation.

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On navigue donc bien souvent à vue entre fantastique, science-fiction et récit initiatique. La trame se déroule tranquillement et la tension monte peu à peu, l’addiction est là. On ressort de cette lecture totalement conquis par une œuvre fascinante et différente. Décidément, Nelfe me connaît très bien, voila un ouvrage qui rentre directement dans mon top ten des meilleurs BD de SF que j’ai pu lire.

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vendredi 18 février 2022

"Un endroit pour vivre" de Jean-Philippe Blondel

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L’histoire : C'est à cause du nouveau proviseur - M. Langlois (...). De ses discours autoritaires. De sa façon d'insister sur tous les mots négatifs qu'il emploie : ne pas, interdit, plus jamais, personne. De la manière dont ils le regardaient tous - comme des moutons -, les yeux mouillés, un regard glissé par en dessous, obéissants, jugulés. Ça m'a bouffé.

Caméscope au poing, l'adolescent décide de filmer ses camarades et de raconter son lycée pour ce qu'il est aussi : un lieu de vie, d'amitié, de haine comme d'amour.

La critique de Mr K : Très sympathique lecture d’une vingtaine de minutes que ce court ouvrage de la très bonne collection D’une seule voix de chez Actes sud junior. Dans Un endroit pour vivre, Jean-Philippe Blondel nous parle fort justement de la prise de conscience d’un jeune face à l’injustice et sa réplique poétique pour lutter contre l’arbitraire. Incisif, politique et solaire, ce roman est un petit bijou d’intelligence et d’émotion.

Le narrateur est un môme réservé et rêveur. Souvent dans la lune, pas très sociable sans être pour autant asocial, cet amateur de lecture vit un peu dans son monde (ce qui agace sa tatillonne de mère) et il n’a pas tendance à donner son avis sur ce qui se passe autour de lui. Plutôt bon élève, il ne fait pas de vagues et ne se connaît qu’un seul ami : Yvan, le fils de la CPE dont il va devenir le sous-délégué lors d’une élection qui marquera son entrée dans la lumière. Cet être banal, ordinaire se livre alors avec beaucoup de force, surtout qu’un événement va tout changer.

Depuis septembre, un nouveau proviseur a été nommé au lycée et le moins que l’on puisse dire c’est qu’il a décidé de mettre tout le monde au pas. Autoritaire et rigoriste, il multiplie les interdits et les décrets liberticides car à ses yeux le lycée est avant tout un lieu de travail et non un lieu de vie (d’où le titre du livre). Face à l’évolution de la situation, l’aspect "mouton" de la plupart de ses condisciples, le narrateur décide de réagir en prenant la caméra de son paternel et de filmer certains de ses camarades, de partager sa vision du lycée qui cristallise des vies faites de hauts et de bas, de sentiments divers et surtout d’énergie.

L’ensemble se lit avec grand plaisir. Les personnages sont crédibles et sensibles (sauf peut-être le proviseur qui est vraiment un affreux bonhomme), on a l’impression d’être de retour au lycée. Le personnage principal m’a beaucoup touché, j’y ai retrouvé une bonne partie de moi-même à son âge. Il se raconte de manière frontale, sans jamais rien éluder avec une concision efficace et évocatrice. À partir du moment où il commence son projet de mise en image, l’ouvrage se fait beaucoup plus poétique avec des envolées parfois bien barrées, des pensées qui s’entremêlent, des impressions et sentiments qui s’entrechoquent. Les pensées couchées sur le papier rendent bien compte du processus de création qui est en cours dans cet esprit encore jeune et en formation. Cette épreuve et cette opposition à l’injustice sera fondateur et mènera à un dernier acte hautement symbolique.

J’ai relevé quelques défauts mais c’est l’âge qui parle. Le proviseur caricatural par exemple (dans la réalité la moitié des nouvelles règles édictées sont illégales) ou encore la grande cohésion de groupe des élèves, ici tout le monde est beau et gentil ou presque... Dans la réalité que je peux vivre, malheureusement les voies de l’individualisme et du narcissisme (liés pour beaucoup aux écrans et autres réseaux sociaux en surdosage) prennent souvent le pas sur l’engagement détaché de tout intérêt. Ce n’est pas grave pour autant car le propos ici est autre, la symbolique forte et propose un voyage au bout de l’engagement d’un jeune lambda.

Une chouette lecture vraiment qui prend encore plus de force quand on la lit à voix haute. Avis aux amateurs !

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jeudi 17 février 2022

"Abandonner un chat" d'Haruki Murakami

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L’histoire : Je suis le fils ordinaire d'un homme ordinaire. Ceci est parfaitement évident. Mais au fur et à mesure que j'ai approfondi cette réalité, j'ai été convaincu que nous sommes tous le fruit du hasard, et que ce qui a eu lieu dans ma vie, dans celle de mon père, tout a été accidentel. Et pourtant, nous les humains, ne vivons-nous pas en considérant comme la seule réalité possible ce qui n'est après tout qu'un simple fait dû au hasard ?

La critique de Mr K : Deux ans que je n’avais plus pratiqué Haruki Murakami, sans conteste mon écrivain japonais favori ! Je reviens à lui avec cet ouvrage très particulier. En effet, Abandonner un chat n’est pas un roman mais un témoignage, celui d’un fils sur son père qu’il a mal connu. Très court car en plus illustré de fort belle manière par Emiliano Ponzi, cet ouvrage se lit avec délectation et nous livre un Murakami comme on ne l’a jamais vraiment lu.

Ces micro-mémoires s’ouvrent sur un épisode de l’enfance de l’écrivain qui donne son titre à l’ouvrage. Sans se rappeler des raisons, Murakami nous raconte comment son père et lui à vélo sont partis abandonner leur chatte pleine jusqu’aux yeux. Une fois de retour chez eux, elle les attend déjà et force l’admiration du paternel qui décide de la garder jusqu’à sa mort. De cette anecdote découle alors le portrait intime d’un père par son fils qui revient sur l’enfance de son géniteur, sa formation, les années de guerre (contre la Chine puis durant la Seconde Guerre mondiale). Homme complexe, professeur de japonais dans un lycée privé et grand amateur / auteur d’haïkus, plutôt froid mais amateur d’ivresse, ils cesseront de se voir très longtemps avant d’ultimes échanges avant la disparition du père suite à une longue et douloureuse maladie.

Mêlant biographie et impressions plus personnelles, il nous dresse un portrait de son père qui touche en plein cœur, plein de nuances et de contrastes. Les rapports évoluent avec le temps, l’enfant grandit, marque sa différence, des fractures apparaissent, l’éloignement est de mise. Il n’y pas vraiment de regrets exprimés par Murakami, il accepte les choses telles qu’elles arrivent, une forme de stoïcisme de l’évidence qui donne à l’ensemble une légèreté et une volupté alors que certains sujets abordés sont difficiles. Il nous apporte aussi par la même occasion son regard sur la famille, les liens humains et finalement le destin, l’essence même de la vie.

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Le livre se lit tout seul en à peine une heure. Les dessins de Emiliano Ponzi magnifient les textes et nous accompagnent dans cette culture lointaine qui est si fascinante. On ressort très heureux de cette lecture mélancolique et sublime à la fois. À découvrir si vous êtes fan de l’auteur, il vous surprendra et vous séduira une fois de plus.

Egalement lus et chroniqués du même auteur au Capharnaüm éclairé :
"1Q84 : Livre I, Avril-Juin"
"1Q84 : Livre II, Juillet - Septembre"
"1Q84 : Livre III, Octobre - Décembre"
"Kafka sur le rivage"
"La Ballade de l'impossible"
"Sommeil"
"La Course au mouton sauvage"
"L'Incolore Tsukuru Tazaki et ses années de pèlerinage"
"Au sud de la frontière, à l'ouest du soleil"
"Le Passage de la nuit"
- "Après le tremblement de terre"
- "Danse, danse, danse"
- "Saules aveugles, femme endormie"

mardi 15 février 2022

"Où est mon pull ?" de Nicola Slater

Un petit livre plein de peps, de malice et de bienveillance, ça vous dit ? Ca tombe bien, c'est ce que je vous propose de découvrir aujourd'hui avec cet album jeunesse qui fait parti des préférés de Little K. Suivez le guide et partez pour une exploration de la maison avec Rififi !

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L'histoire : Rififi ne trouve plus son pull rose ! Il part à sa recherche dans toutes les pièces de la maison et demande de l'aide aux animaux rigolos qu'il croise sur son chemin.

La critique Nelfesque : Voici un petit livre cartonné qui fait fureur à la maison auprès de notre Little K qui vient d'avoir 2 ans. "Où est mon pull" est drôle, robuste, coloré et c'est le genre d'ouvrage qui apporte plus qu'on ne le croit à nos petits lecteurs.

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Le postulat de départ est simple : Rififi a perdu son pull. Son petit pull rose tant aimé a disparu un beau matin. OK, il commençait à être serré mais c'est son pull préféré. Impossible de vivre sans, de le voir s'envoler sans lui avoir dit au-revoir. Ni une, ni deux, n'écoutant que son courage, Rififi va partir à sa recherche.

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La maison est grande et il y a de nombreuses pièces. Le pull peut être n'importe où, sans compter les extérieurs. Heureusement il y a plein de façons de passer d'un espace à un autre, des portes, des fenêtres, des escaliers, des canalisations... et Rififi va pouvoir compter sur une ribambelle d'animaux décalés pour l'aider. "Avez-vous vu mon pull ?", Rififi n'a que cette phrase à la bouche et sa quête est l'occasion pour les plus petits d'explorer les moindres recoins d'une maison, d'apprendre le nom et la fonctionnalité de chaque pièce, de découvrir aussi qu'il y a des endroits méconnus.

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Chaque page est une découverte. On apprend à compter, on scrute le moindre détail et des petites fenêtres trouées dans les pages cartonnées ainsi que de nombreux rabats aiguisent la curiosité. Ici, des lamas dansent la samba dans la buanderie, des cochons se croient à Downton Abbey et prennent le thé dans la cuisine, des merles chantonnent sous la douche, des crocodiles font la queue pour aller aux toilettes... Un véritable festival !

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La chute, toute mignonne mais que je ne dévoilerai pas ici (eh oh, on évite les spoilers au Capharnaüm éclairé, vous le savez bien !) est une ode à l'entraide et au partage. Carton plein donc pour cet ouvrage cartonné (huhu) amusant, interactif et intelligent. Conseillé à partir de 3 ans, c'est bien sûr à moduler en fonction de votre enfant. Plus jeune ça passe aussi très très bien ! Bonne enquête domestique !

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lundi 14 février 2022

"Lady Chevy" de John Woods

ladychevy

L’histoire : Amy Wirkner, lycéenne de 18 ans, est surnommée "Chevy" par ses camarades en raison de son surpoids. Solitaire, drôle et intelligente, elle est bien décidée à obtenir une bourse pour pouvoir aller à l'université et quitter enfin ce trou perdu de l'Ohio où la fracturation hydraulique empoisonne la vie des habitants, dans tous les sens du terme. Mais alors qu'elle s'accroche à ses projets d'avenir et fait tout pour rester en dehors des ennuis, les ennuis viennent la trouver.

Convaincue que l'eau de la région devenue toxique est à l'origine des malformations de naissance de son petit frère, elle accepte de participer avec son meilleur ami Paul à un acte d'écoterrorisme qui va très mal tourner. Mais Amy refuse de laisser l'erreur d'une nuit briser ses rêves, quitte à vendre son âme au diable...

La critique de Mr K: Cette lecture est ma première grosse claque littéraire de l’année, le genre de lecture qui emprisonne littéralement son lecteur et le marque durablement au fer rouge. Roman noir de chez noir aux personnages inoubliables, Lady Chevy de John Woods est éblouissant, fournit un plaisir de lecture addictif quitte à rendre asocial et mauvais père (bon, là je plaisante mais à peine...). Je peux vous dire que je ne suis pas près d’oublier la Lady Chevy qui donne son nom à ce roman d’une force incroyable.

Le trou du cul de la Terre ou presque... C’est là où réside Amy (aka Lady Chevy), une jeune fille tout juste majeure, avec de l’embonpoint et à l’intelligence au dessus de la moyenne. Issu d’une famille de bouseux comme elle dit, entourée et aimée à la manière du coin, elle ne souhaite qu’une chose : se barrer ! Partir loin, faire des études de vétérinaire à l’université de l’État et être heureuse, sortir de sa vie morose et sans relief. Pour cela elle bûche comme une folle, prépare précautionneusement son dossier de bourse.

Dans cette région déshéritée, l’espoir est réapparu grâce à l’extraction du gaz de schiste, pratique controversée dont on ignore encore vraiment son impact réel sur l’environnement. Les parents d’Amy ont d’ailleurs cédé un bail sur une partie de leur terrain. Malheureusement, le petit dernier (Stonewall, drôle de nom -sic-) semble atteint de maux incurables qui pourraient être imputés à l’exploitation de cette nouvelle source d’énergie. Cela nourrit le ressentiment d’Amy et lorsque son meilleur ami d’enfance Paul lui propose une virée / vendetta sur un réservoir de l’entreprise incriminée, elle n’hésite pas. De fil en aiguille, le simple sabotage va déraper et aboutir à la mort d’un homme. Commence alors une véritable descente aux enfers pour Chevy qui voit tous ses rêves d’avenir menacés mais elle découvre en elle des ressources insoupçonnées... Les barrières du Bien et du Mal ont été franchies, les conséquences vont être terrible pour la jeune fille mais aussi pour toute la communauté.

Ce roman s’apparente à une lente et constante montée en pression avec une Chevy qui se livre un chapitre sur deux. On en apprend tout d’abord sur sa famille notamment son grand-père suprémaciste blanc aux mains ensanglantées, un oncle fan d’armes à feu complètement perché, ses parents aux mœurs décalés notamment la maman. Adorée par son père, rapports tendus avec sa génitrice, tout s’entremêle et se révèle à la faveur de l’acte horrible que commet Chevy. Gardant le secret, se retrouvant confrontée à la culpabilité mais aussi à sa propre ambition de sortir de l’ornière et devenir quelqu’un, cette anti-héroïne interroge, dérange profondément. Loin d’emprunter les chemins conventionnels, on assiste à l’émergence d’un nouvel être avec sa part sombre qu’elle développe au fil des événements et épreuves qu’elle traverse. On flirte avec les limites de la morale élémentaire, les lignes bougent et l’on est bien souvent pris de stupeur face à certaines de ses réactions, paroles et pensées. J’aime être bousculé et dans ce domaine, l’auteur pousse le curseur loin.

Un chapitre sur deux, on suit Hasting, un policier du cru aux méthodes immorales et musclées. Il n’hésite pas à faire le ménage au sens propre et mène en parallèle une vie de famille rangée. Étudiant en philosophie doué, rentré au pays pour servir sa communauté, il brouille aussi les pistes, on n’en croise pas deux comme lui en littérature et c’est peut-être pas plus mal -sic-. Un rapprochement va s’opérer en toute fin d‘ouvrage entre les deux personnages, une scène d’anthologie qui changera à jamais la vision des choses et la vie de Chevy. J’ai rarement ressenti une telle impression d’étrangeté et de puissance à la fois lors de ce face à face brut et lourd de sens. Tout bonnement génial !

Le parcours des différents personnages est vraiment très bien caractérisé, on ne tombe jamais dans le pathos ou le easy-reading. Tout est finesse psychologique, le poids du passé, des traditions, la culture familiale, des rapports instaurés et des bouleversements prennent leur sens, amènent le lecteur à la lisière parfois de la folie, du pétage de plombs. On est régulièrement pris à rebrousse poil entre stupéfaction et malaise grandissant. Plus d’une fois, j’ai ressenti une grosse boule au ventre et je dois avouer que j’ai éprouvé toute une palette d’émotions bien paradoxales malgré une lecture absolument grandiose. On baigne littéralement dans la face sombre d’une Amérique parfois en perdition, qu’on n’ose pas forcément regarder dans les yeux, une Amérique en crise économique et identitaire, où la communauté compte plus que le pays, la morale et où finalement règne en sous-texte arrangements et corruption.

Lady Chevy est un vrai bijou de noirceur, un premier roman d’une virtuosité rare qui m’a littéralement happé et rejeté ensuite en petit morceaux mais diablement content. Tout amateur de grande et belle littérature américaine doit absolument le lire. Je vais mettre du temps à me remettre je crois !