"Battue" de Lilian Coquillaud et Marine Levéel

L’histoire : Alors qu'elle mène une nouvelle vie, loin de sa contrée natale et de ses racines, Camille reçoit la visite d'Hassan, un ami d'enfance devenu journaliste. Des retrouvailles amères qui font ressurgir un passé qu'elle avait chassé depuis longtemps. Alors qu'elle mène une nouvelle vie, loin de sa contrée natale et de ses racines, Camille reçoit la visite d'Hassan, un ami d'enfance devenu journaliste. Des retrouvailles amères qui font ressurgir un passé qu'elle avait chassé depuis longtemps.

Hassan cherche à infiltrer la "Grande Battue", chasse exclusive menée une fois l'an dans les montagnes de leur région par les Blanchistes, un groupuscule d'influence néo-païenne et réputé proche de l'extrême-droite. Il voudrait mettre au jour ce mouvement et son idéologie, persuadé depuis toujours que cette chasse cache les complots ou les exactions qui permettraient de les dissoudre.

Camille, fille repentie d'un Blanchiste, pourrait l'aider dans sa mission. Très froide, la jeune femme prend rapidement congé de son vieil ami : elle ne veut plus se pencher sur cette part de son histoire.

Les hasards de la vie, avec la mort de son père, figure tutélaire de ce mouvement, se chargeront de brouiller ses plans et la feront replonger dans ce passé haï qu'elle avait fui enfant, grâce à sa mère.

La critique de Mr K : Lecture mitigée que celle de cette bande dessinée qui a été offerte à Nelfe à son anniversaire par mon plus vieux pote. Autant j’ai aimé le développement du personnage principal et le parti pris esthétique, autant le dénouement m’a laissé sur ma faim avec un goût d’inachevé. Reste que Battue de Lilian Coquillaud et Marine Levéel se révèle être une expérience hors norme au niveau visuel, un ouvrage qui ne ressemble à aucun autre.

Camille rentre au pays après des années d’éloignement qu’elle a souhaité. Contactée par Hassan, un vieux copain journaliste, elle accepte d'intégrer la battue organisée chaque année par les Blanchistes, une organisation sectaire et impénétrable, dont le père de Camille était le chef. Ce retour va se révéler tour à tour étrange, fascinant, déroutant et même effrayant avec une tension qui monte crescendo au sein de ce groupe de chasseurs parti quelques jours dans la nature pour chasser. Tout cela cache un lourd secret qui nous sera dévoilé en toute fin d’ouvrage.

De suite, on est interpelé par la marque et le style du dessinateur. Combinant plusieurs techniques entre dessin classique, aquarelle et encre de Chine, on est souvent proche de l’impressionnisme et / ou de l’expressionnisme. Cette fausse précision donne à voir merveilleusement attitudes et sentiments des protagonistes dans un déluge de couleurs, des effets de surimpression et de contrastes qui cueillent littéralement le lecteur. Le parti pris est osé et ne plaira sans doute pas à tout le monde. Pour ma part, j’ai été conquis. Évocation de la Nature, grandes pages et personnages sont bien rendus et remarquablement évocateurs. La plongée est maximale et la remontée d’émotions variée.

J’ai beaucoup aimé l’évolution du personnage de Camille qui finalement retrouve ses origines et se confronte à ses propres contradictions au contact de ces hommes et femmes habités par les traditions et règles du groupe. On sent assez vite que malgré sa mission, la jeune femme est sur le fil du rasoir, en fragilité, qu’il suffirait d’un rien pour qu’elle bascule. La narration pleine de finesse permet une immersion totale et l’on est partagé sur elle mais aussi sur cette compagnie étrange qui conjugue esprit réactionnaire et communion avec la nature avec des scènes de baignades collectives improbables et des fêtes de viandards au clair de lune notamment. Le malaise monte peu à peu et l’on se doute bien qu’il y a quelque chose qui cloche. Exercices de tir, préservation des animaux fragiles, communions collectives mais aussi tensions internes vont emmener le lecteur vers une fin de battue qui donnera à voir sa vraie nature.

Et là… déception ! C’était attendu et finalement la conclusion qui suit semble anecdotique. J’aurais presque terminé l’ouvrage dix pages avant la fin. Au final, le principal défaut vient à mes yeux du personnage d’Hassan que j’ai trouvé caricatural, agaçant parfois, pas finaud lorsqu’il suit à distance Camille. Une fin en eau de boudin qui m’a déçu et a fait retomber mon enthousiasme. Pour autant, je n’ai pas perdu mon temps car on a affaire à un ouvrage différent, engagé et poétique à la fois. Cette BD ravira les amateurs de choix esthétiques originaux et stylés. À tenter si le cœur vous en dit !