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Le Capharnaüm Éclairé
30 avril 2020

"Le Mystère de la crypte ensorcelée" d'Edouardo Mendoza

Mendoza

L’histoire : Deux pensionnaires d'un collège religieux de Barcelone ont disparu. Une nonne délirante et un policier véreux promettent la liberté à un délinquant fou à condition qu'il éclaircisse le mystère...

La critique de Mr K : Chronique d’une lecture bien branque aujourd’hui avec Le Mystère de la crypte ensorcelée d’Edouardo Mendoza. La quatrième de couverture m’avait bien intrigué et amusé à la fois, l’occasion faisant le larron, j’en faisais l’acquisition lors d’un chinage de plus. Que j’ai bien fait ! L’auteur propose un ouvrage totalement délirant avec des personnages vraiment hors norme, une écriture délicieuse à souhait et en filigrane une critique féroce de la société espagnole.

Le héros, dont on ne saura jamais vraiment le nom, est interné en asile psychiatrique. Ex-délinquant amateur d’embrouilles, trois personnes viennent le chercher dans sa cellule pour essayer de résoudre une disparition mystérieuse. Le docteur de la clinique, une nonne pour le moins dérangée et un policier pourri jusqu’à la moelle ont besoin de ses services ! Pourquoi ? Cela ne nous sera jamais vraiment dit mais peu importe, comme vous allez le voir, l’intérêt de cette lecture est tout autre. Libéré provisoirement de sa geôle, le voila qui parcourt les rues de Barcelone en essayant de démêler les fils de cette affaire qui prend une tournure de plus en plus étrange au cours des découvertes successives que va faire ce héros peu commun.

La personnalité du héros m’a vraiment charmé dès le départ. Le gars est bien perché. Usant d’un langage très soutenu, baroque, il se perd en circonvolutions délirantes où se multiplient les digressions. Il faut un temps d’adaptation au départ, d’ailleurs nombre de lecteurs s’y sont perdus quand on consulte des avis sur le net, pour ma part j’ai trouvé l’entreprise jouissive dans son genre. L’érudition est source ici de passages ubuesques, de références jubilatoires et servent malgré tout le récit même si celui-ci n’apparaît que comme secondaire au final. Autour de notre héros, gravitent toute une kyrielle de personnages étranges, aux réactions parfois brutes de décoffrage et aux motivations plus que suspectes. Il y a d’ailleurs un sacré décalage entre l’aliéné mental (mais l’est-il vraiment au final ?) et les personnes qu’il croise. Cela donne des scènes ubuesques où des confrontations fortes en gueule se succèdent et provoquent irrémédiablement le rire du lecteur. En temps de confinement, ça fait son petit effet !

L’enquête en elle-même prend un aspect facultatif mais n’est pas abandonnée pour autant. Par toutes petites (mais alors toutes petites !) touches, elle progresse et l’on devine qu’elle va déranger pas mal de monde et l’on commence à comprendre les raisons qui ont poussé un commissaire de police installé à faire appel à ce marginal quelque peu à côté de ses pompes. Dans cette Espagne post franquiste où un retour des militaires au pouvoir n’est pas encore totalement exclu, les aventures du héros mettent en lumière les vices cachés d’une société qui ne s’est pas totalement remis de Franco avec son lot de contradictions, de mauvais souvenirs, une Église catholique intouchable et une corruption des élites qui prédomine sur la morale et la justice élémentaire. Cette dénonciation se fait avec une finesse toute en ironie et cynisme larvé donnant une dimension supplémentaire à cet ouvrage qui de prime abord pourrait avant tout passer pour une simple farce policière.

On passe donc un très agréable moment comme toujours avec Mendoza dont la langue inventive et gouleyante nourrit autant le lecteur que le récit qu’elle propose. C’est fun, recherché, cultivé et totalement addictif. Du pur bonheur à découvrir au plus vite si ce n'est pas déjà fait !

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Commentaires
M
Ça m'a l'air bien perché ! Je note ^^
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