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Le Capharnaüm Éclairé
17 juin 2016

"Tendre jeudi" de John Steinbeck

tendrejeudijohnsteinbeck

L'histoire : Doc ne sait pas ce qu'il veut, Suzy fait un complexe d'infériorité. Au cours d'une semaine mouvementée, leurs amis essaieront de les réunir.

La critique de Mr K : Steinbeck fait partie des sacro-saints auteurs US que j'adore et auxquels je voue un culte sans borne : langue simple mais évocatrice à souhait, récits humanistes et une littérature des émotions humaines à nulle autre pareille. Vous imaginez ma joie quand je tombai sur le présent ouvrage lors d'un chinage de plus. Tendre jeudi est la suite de Rue des sardines que je n'ai pas lu, heureusement nul besoin de cela pour apprécier à sa juste valeur ce roman légèrement différent de ce que j'ai pu lire de lui. Il est plus léger, plus tendre et aussi plus humoristique. On est bien loin de la mélancolique noirceur de La Perle ou de Des souris et des hommes. Embarquez avec moi !

Tendre jeudi est une chronique post Seconde Guerre mondiale d'un petit quartier et de ses habitants. La plupart sont des marginaux au regard de la société US de l'époque et ils se débattent avec leurs existences, cherchant des graines de bonheur à planter au quotidien. Doc, un érudit épris des créatures marines a depuis peu fait une croix sur l'Amour et se plonge à cœur perdu dans la rédaction d'une thèse sur les céphalopodes. Cela inquiète ses amis qui veulent lui rendre tous les bienfaits dont il n'est pas avare : toujours présent en cas de besoin, il dispense ses conseils régulièrement à ses concitoyens et parfois les aide financièrement. Ceux ci vont alors tout faire pour le rendre à nouveau heureux. Ça tombe bien, une nouvelle tête vient d'arriver en ville ! C'est la jolie et franche Suzie qui de suite a réussi à capter l'attention du scientifique lors d'un anodin échange de regards. Commence alors un jeu de chat et de la souris entre ces deux âmes esseulées. Le destin leur sera-t-il favorable, aidé par les amis de Doc ?

Ce livre comme chacun des œuvres du maître est un bijou de concision dans la caractérisation des personnages du roman. On s'attache très vite à eux, chacun présentant des aspérités, des fêlures touchantes. Loin de s'y cantonner, l'auteur explore les mécanismes du fonctionnement de cette communauté qui vit quasiment en vase clos. Tout se sait très vite rue de la Sardine mais il se dégage une bienveillance générale et un attachement à l'autre omniprésents entre pudeur de l'époque et nécessité de maintenir cohésion et entre-aide dans une période de renouveau après des années marquées par la guerre et les sacrifices qu'elle a nécessité. Le tableau mental de ce microcosme est remarquablement rendu et donne à l'ensemble une profondeur incroyable.

Bien que nombreux, les personnages intriguent, inter-agissent et font écho à ce que l'humain peut avoir de meilleur. Doc et Suzy forment un duo original et apportent un éclairage neuf sur la séduction entre homme et femme, non-dits et quiproquo balançant le lecteur entre incertitudes et espoirs les plus fous. Il devient lui-même un membre de la communauté et souhaite au plus profond de lui-même une conclusion romantique à leurs destins contrariés. Le lecteur ne peut qu'encourager l'ancien mafieux devenu épicier, le chef de bande et ami de Doc Mack, la tenancière de la maison close et tous les autres à réussir leur entreprise tant la force et la solidarité émane avec opiniâtreté de ces pages malgré les oppositions et les désagréments qui peuplent une vie humaine. Chacun a sa place, sa propre histoire, le tout se conjugue pour donner un récit immersif où amour, amitié et épanouissement de soi ont la part belle.

Grâce à son style imparable, on ne peut qu'être séduit dès les premières pages de Tendre jeudi. On retrouve cette écriture si particulière à la fois accessible mais tellement précise et dense dans ce qu'elle sous-entend. Cette économie de mot ne se fait jamais au détriment de l'humain et du récit, et surtout au profit d'un plaisir de lecture immédiat et total. C'est le cœur gros que l'on quitte ce roman tant on aurait voulu en lire plus (seulement 250 pages, snif !) mais aussi avec l'impression d'avoir lu un grand livre qui l'a touché au plus profond. Vous savez ce qu'il vous reste à faire, John Steinbeck a encore frappé !

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Commentaires
T
tu me recommande lequel pour commencer?
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T
Et bien figure toi que je n'ai jamais lu Steinbeck! ton avis me donne envie de m'y mettre!
Répondre
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