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Le Capharnaüm Éclairé
9 janvier 2015

"Memoria" de Laurent Genefort

genefort

L'histoire: Il travaille pour le compte des multimondiales qui se partagent l'univers. Il erre de planète en planète au gré de ses contrats. Il est le tueur à gages le plus redouté des mondes humains. Le plus cher, aussi. Nul ne sait qui il est véritablement. Pas même lui. Tel est le prix de son immortalité, qu'il doit à un artefact extraterrestre unique et qui ne le quitte jamais. Tout comme les "crises de souvenirs" qui le terrassent de plus en plus souvent. Des souvenirs dont il ne sait même pas s'ils sont les siens. Des crises qui masquent une terreur secrète, tapie au fond de lui sous la forme d'un cauchemar qui, inexorablement, se rapproche et menace de l'engloutir.
Le compte à rebours est engagé...

La critique de Mr K: Du même auteur, j'avais adoré Les Opéras de l'espace, une lecture enthousiasmante procurant une évasion totale et un bonheur de tous les instants. Je savais que Laurent Genefort serait présent aux Utopiales 2014 et il me tardait de le rencontrer et de lui dire tout le bien que je pensais de son œuvre. Patatra, j'oubliai le livre à la maison! Ne voulant pas passer à côté d'une belle rencontre, je décidai d'acheter un autre livre et de le lui faire dédicacer. Bel échange et une promesse à la clef: même univers mais un style plus polar. Il ne m'aura pas fallu longtemps pour céder à la curiosité...

On rentre directement dans le vif du sujet avec la confrontation entre le héros et une de ses cibles. En un chapitre, l'auteur nous résume la vie de son personnage principal: il se déplace de corps en corps en transposant à chaque fois sa mémoire et ses souvenirs dans un nouveau réceptacle, mêlant ses souvenirs et expériences avec ceux de sa victime grâce à une technologie inconnue et incomprise. Tueur à gages expérimenté, recherché mais aussi craint, peu à peu sa routine devient inquiétante par l'apparition de cauchemars de plus en plus prégnants. Qui est-il vraiment? D'où vient-il? Au fil des missions ici relatées (trois exactement), le voile va se lever sur ce personnage de plus en plus torturé par ses origines et lassé de son immortalité. L'auteur m'avait bien prévenu, on change radicalement de genre de SF avec ce volume.

On retrouve parsemé des éléments contextuels qui rappelle l'univers des Portes de Vangk (gigantesques artefacts permettant de se déplacer instantanément d'un point à un autre de l'univers) avec quelques descriptions soignées dont l'auteur a le secret. J'ai retenu tout particulièrement les éléments de végétations environnants du spatioport de Koh-Pat ou encore celle fort saisissante d'un météorite aménagé pour la vie humaine. Au gré des pérégrinations, on voyage donc beaucoup et l'on rencontre nombre de sociétés humaines aux mœurs et coutumes divergentes. Mais finalement, ce n'est pas cet aspect purement SF que l'on retient le plus dans Memoria.

En effet, ce roman est avant tout une sorte de quête intérieure. Non désirée au départ, elle s'insinue dans l'esprit du héros sans nom (il change d'identité toutes les centaines de pages) sous forme de visions cauchemardesque se déclenchant au départ lors des transferts mémoriels puis surgissant à l'improviste même dans des situations critiques où il pourrait se faire repérer. La tension va donc crescendo mettant le personnage aux prises avec des souvenirs surgissant du néant et se mêlant à d'autres fragments mémoriels étrangers. Il s'y perd et s'interroge beaucoup. Qu'est-ce qui est vrai? Qu'est-ce qui est faux? Peut-il se fier à ce qu'il voit? Ce qu'il ressent? Totalement embrouillé, il doit cependant penser à mener à bien ses contrats tout en essayant de faire le jour sur sa véritable identité. Cette tension permanente est remarquablement décrite par l'auteur qui nous plonge admirablement bien dans cette psyché torturée par ses déphasages mémoriels. On retrouve une ambiance semblable à celle ressentie à la lecture de certaines nouvelles de la grande époque de K. Dick: crise de paranoïa, danger omniprésent et invisible. La révélation vient nous cueillir aux deux tiers de l'ouvrage ne laissant finalement au héros qu'un seul choix logique à défaut d'être flamboyant. Ce n'est vraiment pas plus mal et cela rend le récit crédible et profondément humain.

On retrouve dans cet ouvrage tous les talents de conteurs de Genefort avec ici un style plus direct et économe en mots. On alterne réflexions intérieures et scènes d'action bien menées sans tape à l'œil inutile. Le background est très bien rendu et sert à merveille une histoire plus dense qu'il n'y paraît de prime à bord.

Au final, ce fut donc une lecture rapide et enthousiasmante. Ça devient une habitude avec cet auteur! Alors? Tentés?

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Commentaires
M
Plus que tentée après la lecture de ta critique ! Je l'ai pris aux Utopiales 2018, j'ai quelques années de retard ;-)
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