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Le Capharnaüm Éclairé
22 novembre 2013

"Mémoires d'outre-espace: histoires courtes 1974-1977" d'Enki Bilal

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L'histoire: Recueil de quelques histoires courtes de SF des années 70 d'Enki Bilal éditée dans cette version par le quotidien Libération.

La critique de Mr K: Voici un bel ouvrage dégoté chez l'abbé à un prix modique et qui est régulièrement rangé au titre de classique par les amateurs de SF en bande-dessinée. Je dois avouer que pour ma part je préfère largement le Bilal de cette époque que celui qu'il est devenu. Je fais un blocage avec ses derniers ouvrages qui virent au monochrome bleu et qui me lasse profondément, même si je reconnais les indéniables qualités du bonhomme. Heureusement, il me reste des volumes de ses débuts à me procurer et justement, Mémoires d'outre-space en fait partie. Cette édition est loin d'être prestigieuse, il s'agit d'un volume édité par Libération quand en 2006, ils décidèrent d'accompagner le quotidien tous les samedis d'une BD titrée à Angoulême. Personnellement, ça ne me dérange pas tant qu'on ne touche pas au contenu.

À travers huit récits plus ou moins courts (on oscille ici entre quatre et dix pages par historiette) aux chutes bien senties et à l'humour noir dévastateur, Bilal nous offre des histoires basiques à la SF: colonisation de nouveaux mondes par l'espèce humaine, première rencontre avec une civilisation extra-terrestre, la montée des totalitarisme dans un monde futuriste inquiétant... Autant de micro-récits qui traitent avant tout de la nature humaine, sujet inépuisable qui intéresse beaucoup l'auteur. Comme dans l'essentiel L'homme est-il bon? de Moëbius, le constat est ici implacable, la nature profonde de l'humain est mauvaise quand il s'agit de rencontre avec d'autres mondes et espèces. Violence et cruauté, abrutissement, corruption, envie et orgueil, tout le catalogue des défauts et pêchés propres à notre espèce y passe et finalement, les figures portant le mieux l'humanisme sont des organismes extra-terrestres. Un comble! Au final, à la fin de chaque récit un humain ou plusieurs (voir même l'espèce dans son entier) meurent ou finissent en piteux état!

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Cette BD est une vraie réussite aussi dans sa forme. Bilal en début de carrière avait déjà ce coup de crayon unique et une imagination fertile. Par contre, il utilisait encore toute la gamme des couleurs qui ici font écho au dessin et à la trame. Cela donne des planches absolument somptueuses auxquelles résonnent des textes percutants et simples. Cette accessibilité est vraiment délectable et l'on voit que le Bilal de l'époque s'adressait déjà à un vaste public, une époque (fin des seventies) où le militantisme était beaucoup plus prégnant qu'aujourd'hui et où l'industrie n'avait pas mis à mal la créativité (voir la maison d'édition Soleil qui bien trop souvent se contente de reproduire des recettes qui marchent). La SF est donc ici une arme pour aborder des thèmes bien plus sérieux et bien plus graves qu’il n’y paraît... et comme dans ses autres albums, les préoccupations politiques et sociales chères à Bilal ne sont jamais très loin.

Memoires_d_outre_espace-_1

Au final, j'ai dévoré ce volume avec un plaisir renouvelé à chaque histoire. Les propos sont porteurs d'une manière de voir et de penser qui me correspondent tout à fait, le tout illustré impeccablement par la maestria d'un Bilal au sommet de sa forme. Un petit bijou de BD que tous les amateurs de SF se doivent d'avoir compulsé.

Egalement lus et chroniqués du même auteur au Capharnaüm éclairé:
- "La Trilogie Nikopol"
- "La Croisière des oubliés"
- "Partie de chasse"

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