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Le Capharnaüm Éclairé
18 juillet 2013

"La Reine Margot" d'Alexandre Dumas

004

L'histoire: Sous des rideaux de velours fleurdelisé d'or, dans un lit de chêne sculpté, une femme à moitié nue, appuyée sur son bras, ouvrait des yeux fixes d'épouvante.

La Mole se précipita vers elle.

"Madame! S'écria-t-il, on tue, on égorge mes frères; on veut me tuer, on veut m'égorger aussi. Ah! Vous êtes la reine... Sauvez-moi."

Et il se précipita à ses pieds, laissant sur le tapis une large trace de sang.

La critique de Mr K: Retour dans le classique aujourd'hui avec ce roman de Dumas que je n'avais toujours pas lu malgré des lectures enthousiastes comme "Les Trois mousquetaires" ou "20 ans après". J'avais adoré le film de Chéreau lors de sa sortie et pensait alors lire assez rapidement la matrice littéraire originelle. Le temps a passé et seules restent les pensées comme disait l'autre... Puis un soir, Nelfe et moi regardions la dernière émission de l'année de La Grande librairie sur France 5. Des auteurs célèbres étaient conviés pour remplir la valise de vacances parfaite du lecteur, ils devaient donner un nom de classique de la littérature et un titre plus contemporain. L'un deux a proposé "Les Trois mousquetaires" créant la surprise sur le plateau et provoquant chez moi un reflux de souvenirs oubliés. Justement, dans ma PAL, dégoté chez l'abbé, traine depuis bientôt quatre ans, "La Reine Margot" du même auteur! Je me lançai dans sa lecture quelques semaines après...

L'action se déroule dans une période bien particulière de notre Histoire. Charles IX règne alors sous l'égide de sa mère omniprésente Catherine de Médicis. Marguerite (surnommée Margot) sa soeur épouse Henri de Navarre (futur Henri IV) pour consolider les relations du royaume de France avec ce petit territoire frontalier. Mais cela ne suffit pas à rasséréner la vieille reine-mère férue d'astrologie, ultra-possessive avec ses enfants et qui s'étant fait prédire qu'un jour ce petit insolent de navarrais serait roi de France décide de tout mettre en oeuvre pour conforter sa famille dans sa main mise sur le trône.

Pour éviter l'écueil du roman historique lénifiant et ennuyeux, Dumas a rajouté deux personnages imaginaires qui vont se mêler à l'Histoire avec un grand H. Il s'agit du huguenot (protestant) La Mole et du digne comte catholique Coconnas qui vont tomber profondément amoureux l'un de la reine de Margot l'autre d'une comtesse proche du pouvoir. Cela donne lieu à des passages de romance d'une rare sensibilité et de très belles pages sur l'amitié qui contrastent avec les intrigues incessantes qui nous sont décrites. Décidément rien n'est épargné à Henri de Navarre et ses proches, le milieu de la cour est très bien rendu et la figure mortifère sous un masque aimable de la Médicis plâne du début à la fin. La menace est sourde mais discrète, le lecteur ressent un profond malaise et ne peut que s'effrayer devant les travers de la politique de l'époque. Le point d'orgue est une description de la nuit de la Saint Barthélémy d'août 1572 aussi crûe que réaliste, montrant l'absurdité et le fanatisme qui règnent en ces temps de guerre des religions.

Cet ouvrage est remarquable pour de nombreuses raisons. La caractérisation des personnages est un modèle du genre, rien ne nous est épargné de leur nature et de leurs motivations. Leur richesse et leur finesse est incroyable, on les voit vivre et ressentir leur vie sans pouvoir intervenir. Les figures de Margot et d'Henri, les deux épousés au centre d'une union arrangée ne s'aiment pas et pourtant face à leur ennemie commune, ils vont devoir remuer ciel et terre pour survivre et obtenir leur réelle indépendance. On alterne donc scènes de complot et scène d'action rythmées, genres dans lesquels l'écriture de Dumas excèle. De la finesse, de la fluidité, une légèreté très moderne pour l'époque qui font que le plaisir est immédiat et durable. Comme un bon chocolat qui fond dans la bouche, ce roman se dévore et se vit. Bien que très épais, les pages se tournent inexorablement et avec ferveur jusqu'au mot FIN.

Que dire de plus sinon que ce livre est un classique chez les classiques! Il s'apparente à ce qui se fait de mieux dans le domaine du roman historique entre vérité et petits rajoûts personnels pour romancer l'Histoire. Une très belle réussite, une histoire et un style qui marquent et donc un bonheur littéraire à lire ou relire de toute urgence!

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Commentaires
L
J'ai également passé un très bon moment avec ce roman !
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T
J'ai lu le livre suite à ma vision du film (un téléfilm même si mes souvenirs sont bons). J'ai vraiment été étonnée de la facilité à laquelle ça se lisait. Dumas c'était le page turner du 19ème !
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M
Ouuuh la vilaine! Il n'est jamais trop tard pour bien faire! ;)<br /> <br /> Je te conseillerai plutôt ""La Reine Margot, par certains côté il te rappellera la série de "Game of Throne". Bonne lecture! :)
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W
Je suis complètement convaincue pour lire ce livre. Une chronique bien appétissante puis je suis assez férue d'histoire. Honte à moi, je n'ai jamais lu de Dumas et on m'a déjà conseillé Les Trois mousquetaires aussi.
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M
Tulard ne parle pas des personnages qui auraient inspiré La Mole et Cocconas dans sa préface (très bien d'ailleurs). Vu le régal qu'a été cette lecture, je pense que j'essaierai d'en lire d'autre de Dumas, des moins connus... Mais quel talent de conteur! Quelle verve! ;)
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M
Si j'ai bonne mémoire, Dumas s'est inspiré de plusieurs personnages réels pour La Mole (mais je n'ai plus les noms en tête).<br /> <br /> En tout cas, très belle chronique qui me donnerait envie de le lire… si je ne l'avais pas déjà fait plusieurs fois :)<br /> <br /> <br /> <br /> Le film de Chéreau est vraiment un must du genre : il rend parfaitement l'atmosphère sombre et sanglante du livre. Un régal lui aussi.
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