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Le Capharnaüm Éclairé
26 avril 2013

"Pour le meilleur et pour l'empire" de James Hawes

 

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L'histoire:Un jeu de télé-réalité au milieu de la jungle tourne à la bérézina. Brian Marley se retrouve seul avec pour uniques compagnons araignées géantes, moustiques sanguinaires et crocodiles affamés. Quasi fou et demi-mort, il s'apprête à enregistrer sur sa caméra un ultime message pour son fils. C'est sans compter sur l'apparition inattendue d'une communauté locale pour le moins étrange...

La critique de Mr K: Changement de registre aujourd'hui dans mes lectures avec ce livre vendu comme un ersatz littéraire des Monty Python. Étant un grand amateur de l'humour anglais à la mode «non sense», c'était l'occasion de recoller à un style que j'apprécie beaucoup mais que j'ai rarement eu l'occasion de côtoyer en livre. Mon avis en fin de course est mitigé.

Tout commence idéalement avec la description d'un jeu télé-réalité tellement difficile et violent qu'on ne peut que se gausser. On est ici loin de la mort d'un candidat lors d'une épreuve de Koh Lanta et à des années lumières d'émissions poubelles qui pullulent sur nos chaînes télé (désolé pour les amateurs de femmes sans cheveux et de shampooing). Six candidats sont ici abandonnés en pleine jungle, sans aucune assistance et ils doivent survivre au sens propre. Dès le début, on comprend que Marley (antihéros classique) est le dernier (et il ne peut en rester qu'un! Sic) car les autres ont soit abandonné soit sont passés de vie à trépas. Le décor est planté, le monde de la télé est beaucoup plus cynique et dangereux que la jungle en elle-même. Complètement exténué, Marley va tomber évanoui et va se réveiller au sein d'un groupe humain bien particulier où seule la folie douce semble régner... je n'en dirai pas plus pour ne pas dévoiler le mystère.

Mais voilà, un bon pitch ne fait pas forcément un très bon bouquin. Certes on rit énormément par moment et les formulations sont bien senties mais le souci réside dans l'écriture que j'ai trouvé ampoulée donc pesante pour le pauvre lecteur. Il y a un côté rebutant dans la prose de Hawes qui empêche que l'on si plonge avec délice et sans filet. J'ai de plus en plus traîné la patte au fur et à mesure de ma lecture et je dois avouer que j'ai fini sur les rotules en toute fin d'ouvrage. Déception aussi vis-à-vis de la manière dont l'auteur s'y est pris pour mener son récit. On quitte très vite la jungle et les événements ubuesques qui s'y déroulent pour plonger dans le passé du principal personnage. Le procédé du flashback aurait pu être intéressant s'il ne s'apparentait pas à un catalogue de situations pseudo-rigolotes qui n'apportent pas vraiment grand chose à la trame principale. Il y a quand même quelques passages succulents, je ne résiste d'ailleurs pas à vous reproduire ci-dessous un portrait au vitriol d'une frange de la jeunesse d'aujourd'hui:

Dans la vieille golf Gti blanche et rouillée à, cause de laquelle Grant Brodie venait de friser la crise cardiaque pour la deuxième fois de la soirée, l'air était saturé d'une fumée âcre et entêtante aux relents de fauve et de fumier, et le beat suramplifié de l'album de 50 cent «Get Rich or die trying»faisait vibrer les panneaux en plastique de l'habitacle. Les occupants de la voiture étaient tous de jeunes Blancs au teint pâle, âgés de dix-sept ou dix-huit ans. Ils avaient passé la mâtinée à trainer dans des piaules pourries, loin de leurs familles décomposées, avachis sur des canapés achetés à crédit, à s'abrutir devant des jeux vidéo bourrés de scènes de massacre et de pornographie ou à se gaver de pubs vantant des biens de consommation qu'ils n'auraient jamais les moyens d'acquérir alors qu'ils étaient censés leur apporter à coup sûr le bonheur; l'après-midi, ils l'avaient consacré à soulever des poids et à suivre un cours de gym-combat dans la salle polyvalente de leur quartier, afin de préparer leurs corps à des efforts que la vie ne leur demanderait jamais. Et maintenant, ils étaient partis s'éclater en voiture. Dans leur imaginaire inondé de testostérone, leur voiture n'avait pas la fonction d'un moyen de transport, mais celle d'une arme leur permettant d'exhiber leur virilité, et dont le manque de prestige ne pouvait être compensé que par la témérité suicidaire avec laquelle ils en faisaient usage: c'était le seul moyen qu'ils avaient pour marquer de leur aigre urine d'adolescents ce monde qui ne les respectait pas. Alors qu'ils approchaient à présent de ce bref et vertigineux apogée de leur force physique, de leur puissance sexuelle et de leur indice musculo-graisseux, ils restaient en carafe à l'extérieur du grand Club de la Vie, à baver devant ce qui brillait en vitrine et à regarder de vieux cons dégarnis d'au moins trente berges monopoliser les belles bagnoles de sport, les belles gonzesses genre top model, les plages immenses de sable blanc et autres lofts à partouze. Au demi-milliard d'années d'évolution présociale qui bouillait dans leurs veines s'ajoutait à présent le cri massivement hurlé à la jeunesse par le marketing moderne: «profitez-en maintenant que vous êtes jeunes et vifs». Afin de montrer à quelle sous-tribu ils appartenaient quand ils se trouvaient dans des lieux par ailleurs socialement anonymes, où la musique était si forte qu'il était impossible de communiquer par la parole, tous arboraient diverses pièces d'habillement ostensiblement estampillées NPR, nom de la ligne de sportswear dessinée par Steve «Skagga» Tomb, le pape de ce qui déchirait chez les Ricains. Sur leurs T-shirts trop grands, sur leurs pantalons trop larges, sur leurs casquettes, sur leurs sweats à cagoule anti-caméras de surveillance et sur leurs baskets à coussins d'air, c'était tout ce qu'on lisait, NPR, ce qui, bien sûr, veut dire Ne Pas réanimer et si t'as besoin qu'on te le précise alors ha! Ha! Excuse-moi eh bouffon mais qu'est-ce qu'on en a à foutre de ce que tu penses de toute façon, hein? Hein?

Sachez donc que l'auteur a vraiment une imagination débordante et que j'ai tout lu à propos de cet ouvrage. Les opinions sont tranchées et Pour le meilleur et pour l'empire n'a laissé personne indifférent. À vous de vous laisser tenter si le cœur vous en dit!

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