"Stigmate" de Jérôme Camut et Nathalie Hug
L'histoire: Quand les victimes d'un monstre fascinant et obscène se lancent sur les traces du prédateur qui a dévasté leur vie, elles ignorent qu'elles n'auront pour seules issues que la fuite, la mort ou... les voies de l'ombre.
J'ai de l'amour pour mes chiens d'attaque. Certains il a fallu les tabasser, d'autres pas. Il n'y a pas de règles. C'est ça l'extraordinaire chimie de la nature humaine. C'est passionnant. Approche-toi, ami voyeur. Et n'aie pas honte de ton vice. Viens pénétrer le monde d'un artiste du crime. Il est temps que je me présente et que j'offre ma réflexion à la multitude.
Kurtz
La critique de Mr K: Dans l'enthousiasme de ma lecture du premier volume, Prédation, voici aujourd'hui mon compte-rendu sur le suivant: Stigmate. Je n'ai pas pu résister très longtemps vu le suspens dans lequel nous avaient laissé les auteurs. L'histoire reprend quelques semaines après les derniers faits relatés dans Predation. Rufus a disparu ainsi que Kurtz et les prisonniers-esclaves de l'odieux tortionnaires sont libres... du moins physiquement! Car ça tourne à plein régime dans leurs cerveaux désormais malade: la vengeance comme l'état qui anime Michèle veuve inconsolable naviguant à vue dans sa solitude, le pardon comme Thomas a su le donner à son geôlier, la désorientation la plus totale pour Andréas qui ne se contrôle plus et a peur pour sa fille Clara... Au delà de leur emprisonnement, Kurtz joue encore avec leurs vies et croyez moi ce n'est pas fini!
Dans la digne lignée du premier, on retrouve tous les points forts du premier opus. Un sens millimétré du suspens tout d'abord, avec des chapitres courts qui laissent pantelant le lecteur et l'oblige à poursuivre sa lecture jusqu'à parfois très très tard... C'est avec un plaisir non dissimulé que l'on retrouve des personnages connus dans la suite de leur cauchemar. Loin de calmer le jeu, les auteurs le complexifient en donnant notamment davantage la parole au génie du mal. Ainsi un chapitre sur trois / quatre en moyenne est consacré à l'exposition d'une partie du manuscrit de Kurtz: Les voies de l'ombre. Il faut s'accrocher car il s'agit d'un ramassis d'horreurs sur la nature supposée soumise de l'homme et autres bêtises du même acabit. Là où c'est prenant, c'est qu'on a vraiment l'impression de pénétrer dans l'esprit dérangé d'un fou sanguinaire. En parallèle, on voit les applications de ces paroles en suivant les différentes victimes qu'il a semé en route et qui ont survécu.
Avec ce deuxième opus, on fait un pas de plus vers l'horreur. Moins concentré sur les sévices, il est davantage question vous l'avez compris d'explorer les fêlures des êtres humains avilis par un monstre. Ce dernier, manipulateur hors-norme, tient toujours les ficelles et joue habilement pour arriver à son grand projet. Et oui! Jusqu'à maintenant tout n'était qu'entraînement et préparation, vers la fin du présent volume, s'esquisse un objectif bien plus important qui sera exploré dans la troisième partie de ce cycle. Pour certains personnages, Stigmate est une véritable traversée des Enfers mêlant haine, désir de meurtre, alcoolisme, camisole chimique et autres dérivatifs de la réalité... N'espérez aucune pitié des auteurs à votre endroit, des personnages que vous adorez vont encore s'en prendre plein la figure voir disparaître à jamais... ces deux écrivains sont diaboliques!
Une bien bonne lecture donc! Même si l'écriture reste moyenne (mais on s'y fait à la longue), l'envie d'en lire plus l'emporte largement et il est vraiment très difficile de se détacher de l'histoire. D'ailleurs, il faut que je vous laisse car le volume 3 Instinct m'attend! À découvrir!
"Les Druides, vol 4 et 5" de Lamontagne, Jigourel et Istin
L'histoire: Gwenc'hlan...
Mon maître, celui vers qui se tournent toutes mes pensées maintenant, à l'heure où il me tarde de le rejoindre dans l'autre monde, là-bas, par-delà les brumes... Nous, druides, pensions à raison que l'écriture ne devait pas figer nos sciences, que nous devions les enseigner par la parole et non par l'encre.
Mais vint le crépuscule des druides, et maintenant que nombre d'entre nous se sont convertis à la religion du dieu unique et que les autres ont disparu, il nous faut consigner par écrit ce qui sera perdu faute de bouche pour initier... Il apparaît fort louable que ceux qui restent, et dont je fais partie, transcrivent notre mémoire sur ce papier, si éphémère, mais qui demeure en ce jour notre seule possibilité de perdurer au travers des époques à venir... Mes souvenirs épreignent mon coeur, se changent en larmes et mes larmes se mêlent à l'encre...
Gwenc'hlan... Mon maître...
La critique de Mr K: Retour chez les Druides aujourd'hui avec les volumes 4 et 5 de la série éponyme que j'avais débuté grâce à l'aide de notre cher voisin. Ayant grandement apprécié les trois précédents volumes, c'est avec beaucoup d'attente et d'appétit que j'ai entamé ma lecture. Impossible de décrocher jusqu'à la fin du volume 5, je suis retombé dans le piège!
On avait laissé nos héros en position critique et le moins que l'on puisse dire c'est qu'ils les accumulent! Toujours à la recherche des meurtriers de membres du clergé et d'anciennes reliques druidiques, Gwenc'hlan et Taran multiplient les rencontres dans ces deux volumes car le voyage est long et loin d'être terminé. C'est ainsi qu'ils explorent un peu plus le Nord et rencontrent des "hommes peints" (les Celtes) et finiront même jusqu'à rencontrer des vikings. C'est l'occasion de se voir confrontées des cultures très différentes les unes les autres et le tout, toujours dans un souci d'exactitude assez bluffant de la part des auteurs.
J'ai retrouvé avec plaisir les deux personnages principaux, figures intemporelles du maître et de son padawan... euh... je voulais dire apprenti! Et des personnages jusque là plutôt secondaires prennent de l'épaisseur, notamment Gwenolé qui commence à livrer un aspect très intéressant de sa personnalité loin de l'image rugueuse et intransigeante qu'il laissait transparaître jusque là. Cerise sur le gâteau, à la fin du volume 5, les auteurs consentent enfin à mettre un visage clair et connu sur l'un des décideurs de cette fameuse compagnie de moines encapuchonnés (on dirait presque des Nazghuls!). Je dois avouer qu'ils m'ont cueilli et du coup, j'attends encore avec plus d'impatience le volume suivant.
Les dessins sont toujours aussi réussis, le rythme narratif est à la fois haletant dans le déroulement du récit mais il se révèle aussi parfois plus contemplatif pour s'arrêter sur telle ou telle curiosité ou élément de civilisation (voir le passage sur Stonehenge). On se divertit donc mais on s'instruit sans s'en rendre compte. Décidément, il y a des série qui méritent d'être découvertes et celle-ci en fait partie! Courez-y!
"Les Ecriveurs: tome 1 - La Cité lumineuse" de Frédéric Mars
L'histoire: "Ne vous êtes-vous jamais demandé pourquoi ce cadeau ou cette place d'honneur qui vous semblaient destinés ont atterri dans les mains d'un autre que vous? Pourquoi des obstacles de dernière minute se dressaient sur votre route alors que rien ne semblait s'opposer à votre succès? Pourquoi le bus que vous deviez prendre partait sans vous à quelques secondes près?
Vous invoquez le sort, la malchance, la fatalité? Vous pensez que c'est comme ça et qu'on n'y peut rien?
Mais bientôt, dans quelques instant, VOUS SAUREZ. Ma vie et la vôtre, que vous le vouliez ou non, sont dorénavant liées à jamais...
Pourquoi ça? Oh, c'est très simple. Ca se résume même en une phrase:
Votre vie, c'est moi qui l'écris!"
La critique Nelfesque: J'ai découvert Frédéric Mars avec "Le Sang du Christ" et transformé l'essai il y a quelques mois avec "Non stop". Cet auteur a décidément de multiples facettes puisqu'avec ce premier tome "La Cité lumineuse", de sa nouvelle saga "Les Ecriveurs", il s'attaque à la littérature jeunesse. Je ne suis pas spécialement adepte de ce genre ci mais comme c'est justement Frédéric Mars qui tient la plume et que j'avais aimé les deux ouvrages pré-cités, j'ai tenté l'expérience.
Je commence par les points positifs ou les points négatifs? Allez, pour faire envie de vais m'attaquer aux bons côtés de ce roman. Si vous ne voulez pas entendre parler de ses défauts, vous pourrez ainsi en rester là.
Points positifs donc: "Les Ecriveurs" est un très bon page turner. Je n'arrêtais pas de râler sur ce roman et finalement je l'ai lu très rapidement. Pour en finir plus vite diront les mauvaises langues? Non pas vraiment. Ok, ce roman est clairement dédié aux jeunes lecteurs (ados et pré-ados) et de ce fait je n'ai pas vraiment été conquise par l'histoire, la trouvant trop lisse, trop propre et trop simple, mais on peut lui accorder le fait que l'écriture est dynamique et le choix de la narratrice et personnage principal, Lara Scott, qui découvre ses "pouvoirs" d'écriveurs et son destin, est judicieux. Cette gamine est fraîche, drôle, elle n'a pas la langue dans sa poche et découvrir ses pensées en même temps que l'histoire est savoureux.
Oui mais voilà... Les points positifs, en ce qui me concerne, s'arrêtent là... Alors que les premiers avis glanés sur la blogosphère font éloge de ce premier tome, j'ai été parasité par des références en matière de littérature jeunesse (une référence en l'occurence (oui mais quelle référence!)) qui m'ont complètement gâché ma lecture. De là à y voir de la pâle copie plutôt que de l'inspiration, il n'y a qu'un pas. Si je vous dis: une jeune fille découvre ses pouvoirs qui jusque là lui étaient inconnus, ça vous rappelle quelque chose? Et si je vous dis qu'elle va se retrouver dans un monde dont tout un chacun ignore l'existence afin de faire ses classes et apprendre à se servir de ses facultés et les apprivoiser ça ne vous dit toujours rien? Le fait que son stylo avec lequel elle doit écrire ses ordres pour contrôler ses "Ecrits" soit fabriqué par un artisan unique et qu'il doit être essayé par l'Ecriveur afin de voir si il lui correspond réellement car chaque Ecriveurs à son stylo propre... Toujours rien? Vous n'y mettriez pas un peu de mauvaise foi là!? Bon alors j'en rajoute une couche en vous parlant d'un sport complètement inventé par l'auteur, sport dont les habitants sont friands et dont on nous détaille les règles, les matchs et les joueurs pendant des pages et des pages. Et enfin, clou du spectacle, figurez-vous que Lara a perdu sa maman très jeune, celle ci ayant un ennemi qui maintenant va devenir celui de sa fille... et qui la cherche partout... lui tend des pièges... Ca sent la confrontation avec Voldemort ça! Oups, miiiiince, j'ai dit le nom... Bon ben voilà c'est dit, c'est bien à la saga "Harry Potter" que j'ai pensé pendant toute ma lecture. Vous conviendrez que c'est balot tout de même... Surtout quand on sait que cette dernière est une putain de tuerie (désolée d'être vulgaire) et qu'elle ne pourra pas être égalée sur son terrain...
Au final, j'ai aimé le style d'écriture de ce roman mais les détails précédents m'ont tellement mise en colère que j'ai même fini par croire que c'était une blague. J'espère que la suite présentera une réelle originalité et ne se contentera pas d'être Harry version SF au pays des illuminés. En ce qui me concerne je m'arrêterai là. Dommage, ça aurait pu être pas mal...
"Predation" de Jérôme Camut et Nathalie Hug
L'histoire: Un cadavre dénudé est découvert dans une friche industrielle, la main droite est déchiquetée. Un homme se tire une balle en pleine tête, dans un centre commercial bondé. Un jeune père, dressé comme un chien, est tourmenté sans relâche au fond d'un cachot sans porte ni fenêtre.
Aucune piste, aucun lien, aucun mobile... Qui sont ces hommes? Pourquoi ont-ils été choisis? Pour quelle mise à mort aberrante?
La critique de Mr K: Predation est le premier volume de la trilogie Les voies de l'ombre (du moins à ce jour!). C'est une série de romans mettant la police aux prises avec un psychopathe d'une rare perversité et intelligence: Kurtz. Être dégénéré, à l'enfance broyée, amateur des Doors et du film Apocalypse Now, il enlève, rééduque et se débarrasse de ses victimes comme il l'entend suivant un plan machiavélique, millimétré et implacable. Depuis le personnage d'Hannibal dans les œuvres de Thomas Harris, je n'avais pas rencontré un tel "génie du mal". Âmes sensibles s'abstenir car la descente est rude et toute trace de raison disparaît au profit de la folie la plus pure et la plus sombre! Sachez simplement que Kurtz mène le jeu et qu'il ne connaît aucunement la pitié et la commisération.
Face à Kurtz, on suit les pérégrinations de quelques policiers typiques: le vieil inspecteur à qui on la fait pas en pleine dépression (Rufus), la coéquipière sympathique un peu jeune dans le métier et volontaire (Cécile), le légiste lugubre à souhait et plus étonnant, un commissaire plutôt cool avec ses troupes et facilitant le travail de ses hommes. La tension dans l'équipe d'enquêteur ne vient donc pas des conditions de travail (ce qui est souvent le cas dans ce type de livre) mais plutôt de la prise de conscience de la nature du monstre qu'ils doivent combattre. Insaisissable mais proche à la fois, les indices sont rares et les rares survivants de ses méfaits sont incapables de se remettre de leur épreuve. Ils sont transformés et irrémédiablement différents. La manipulation est de mise et les auteurs s'en donnent à cœur joie pour égarer le lecteur et le faire frémir: pour cela, ils sont très efficaces! Essayez aussi ne pas trop vous attacher aux personnages principaux, vous pourriez être très déçus... les auteurs ne les ménagent pas et attendez-vous à des changements de taille!
Le livre se lit très vite car dès les premières pages on est pris par l'histoire et touché en plein cœur par certains personnages. Pour ma part, j'ai adoré le traitement clinique qu'ont adopté les auteurs pour nous présenter et nous livrer le personnage d'Andréas, la dernière victime de Kurtz qui découvre ses conditions de détention extrêmes et le deal que lui propose son tortionnaire. Les chapitres sont courts et s'enchainent à vitesse grand V! Petit bémol, j'ai trouvé l'écriture très moyenne (pourtant ils se sont mis à deux pour écrire), les auteurs se bornant à faire des phrases simples donnant un effet "liste de course" à certains passages qui auraient gagnés en noirceur en rallongeant les phrases et en densifiant les détails. Mais finalement, on finit par s'habituer et l'ensemble des éléments fournis s'imbriquant de façon parfaite, on ne perd rien à cause de ce défaut.
Après la lecture de ce livre, je voulais enchaîner sur tout autre chose. Malheureusement, la fin ne laisse aucune chance à l'heureux lecteur que je suis d'échapper à l'emprise de Kurtz et consorts. Comme ma mère m'a prêté les tomes 2 et 3, j'ai enchainé directement sur Stigmate, le volume 2 qui d'ors et déjà s'annonce aussi bon que celui-ci, mais vous le saurez bientôt dans une chronique à venir. En attendant, je ne peux que vous conseiller très fortement de tenter l'expérience même si elle s'avère extrême et éprouvante. Un excellent plaisir coupable de plus!
"La Taupe" de Tomas Alfredson
L'histoire: 1973. La guerre froide empoisonne toujours les relations internationales. Les services secrets britanniques sont, comme ceux des autres pays, en alerte maximum. Suite à une mission ratée en Hongrie, le patron du MI6 se retrouve sur la touche avec son fidèle lieutenant, George Smiley.
Pourtant, Smiley est bientôt secrètement réengagé sur l’injonction du gouvernement, qui craint que le service n’ait été infiltré par un agent double soviétique. Epaulé par le jeune agent Peter Guillam, Smiley tente de débusquer la taupe, mais il est bientôt rattrapé par ses anciens liens avec un redoutable espion russe, Karla.
Dans un climat de suspicion, de manipulation et de chasse à l’homme, tous se retrouvent à jouer un jeu dangereux qui peut leur coûter la vie et précipiter le monde dans le chaos. Les réponses se cachent au-delà des limites de chacun…
La critique Nelfesque: Non mais rendez-vous compte que c'est le premier film que nous voyons au cinéma cette année! Damned, nous sommes fin février!!! Pourquoi ce long silence pour des personnes qui adorent le cinéma? Et bien pour faire simple: les bons films ne passent pas chez nous, ici on n'a que de la bouse... Espérons que les 10 mois restants nous envoient des films que l'on a envie de voir sur grand écran...
Et puis là miracle, l'envie renait avec "La Taupe". Tomas Alfredson est au commande et Tomas Alfredson c'est quand même le réalisateur de l'excellent "Morse" (vous ne l'avez pas vu? Réparez vite cela!). Et puis (comment dire sans passer pour une midinette...), il y a Colin Firth à l'affiche (voilà, c'est dit) accompagné de Gary Oldman (excusez du peu!).
Le film est long et lent. Autant le dire tout de suite, "La Taupe" n'est pas réalisée par un épileptique sous acide et il faut du temps pour rentrer dans l'histoire, capter un minimum ce qui se passe et être capté par l'intrigue. Pour moi ça a pris 45 minutes (pour un film de plus de 2h). Dur dur... Mais au bout de 3/4 d'heure, l'ambiance est assumée, l'intérêt est là et le jeu de Gary Oldman tout en flegme et en sobriété centralise l'attention.
"La Taupe" est daté (décidément que de louanges). L'histoire se passe dans les années 70 mais plus que cela on a l'impression d'être devant un film de cette époque ci. Le réalisateur a sû se fondre dans une époque et plus que la déco et les vêtements des acteurs, c'est la façon de filmer et le rythme que Tomas Alfredson donne à son film qui rappelle les films d'espionnage des 70's. Un bel hommage.
Je ne saurais dire si j'ai aimé véritablement ce film, je ne vais pas spontanément vers ce genre là. En tout cas, je l'ai apprécié et ai passé un bon moment devant cette sorte d'ovni au sein du paysage cinématographique actuel.
La critique de Mr K: 5/6. Notre premier film pour 2012 et une très bonne séance en salle obscure en terre périgourdine. Il flottait comme un parfum de nostalgie dans ce film d'espionnage "à l'ancienne" aux antipodes de James Bond. Le rythme est lent et permet ainsi de suivre l'enquête que doit mener Smiley (Gary Oldman) au sein de son ancien service afin de dénicher la fameuse taupe qui vend des secrets d'État au bloc communiste. Pas de cascades, de grosses explosions et autres fioritures, c'est du brut et avant tout des relations complexes tissées entre les différents protagonistes depuis des années (à cet égard les flashbacks sur une soirée en commun quelques temps avant permettent de cadrer davantage les uns et les autres).
J'ai adoré ce film malgré un début un peu poussif. En fait, bien qu'un peu rébarbatif, le commencement pose des jalons essentiels pour la suite et l'on est pas déçu quand l'enquête débute vraiment. Trahisons à tout va, torture et suppression de témoins génants ou de personnages secondaires, suspicions à tous les niveaux, passage à suspens lors d'une introduction frauduleuse dans les archives du département... autant de moments qui raccrochent le spectateur et le plongent dans un monde sans pitié. La fin est devinée assez aisément et vire un peu au happy end déplacé dans ce film noir de chez noir... mais on oublie ce léger défaut à la vue de la qualité technique du film (ambiance terrible, belle photo et musique à l'avenant) et surtout le jeu époustouflant des acteurs (Oldman en tête mais je perds un peu le sens commun quand je le vois dans un film...).
C'est un film que je recommande donc chaudement, surtout aux amateurs de films noirs et d'espionnage à la Ipcress - Danger immédiat -.
De l'art de l'indignation électoraliste...
Dessin de Xavier Gorce tiré de son blog.
"Les voies d'Anubis" de Tim Powers
L'histoire: Vraiment, pourquoi Brendan Doyle, jeune professeur californien, aurait-il refusé de faire à Londres cette conférence payée à prix d'or? Comment deviner que l'attend la plus folle et la plus périlleuse des aventures?
Voyez plutôt: à peine arrivé, le voici précipité, par une mystérieuse brèche temporelle, dans les bas-fonds de Londres. De Londres en 1810! Sorciers, sectes et rumeurs de loup-garou... Et, nul doute, quelqu'un cherche à l'enlever sinon à le tuer!
Au hasard de sa fuite, Doyle régressera jusqu'en 1685 puis sera projeté dans l'Égypte de 1811 où des magiciens vénèrent encore le dieu Anubis.
Traqué, maintes fois capturé et toujours s'échappant, il cherche à corps perdu la "brèche" du retour.
Ô douce Californie d'aujourd'hui, où es-tu?
La critique de Mr K: Voila un livre que je voulais lire depuis longtemps et qui s'est éternisé dans ma PAL. Deux ans tout de même pour une œuvre considérée comme un classique dans le cercle des amateurs de Science-Fiction. Tim Powers est considéré comme un incontournable dans le milieu et malgré son absence de dernière minute à sa séance de dédicace aux Utopiales 2011, je me lançai dans cette histoire de voyage dans le temps, thème classique par excellence mais qui m'a toujours attiré. Mon avis final après une semaine de lecture est mitigé, partagé que je suis entre la densité impressionnante du scénario, les personnages attachants / repoussants à souhait et finalement un livre que je vais oublier assez vite...
Un des gros points fort de ce livre est le héros: Brendan Doyle. Citoyen lambda par excellence, il est entraîné dans des aventures qui le dépasse et nous sommes plongés avec lui dans d'ahurissants bouleversements de situation et d'étranges rencontres. Malgré un background de SF pure (c'est pas tous les jours qu'on peut revenir dans le passé!), on baigne dans le réalisme pur au niveau du traitement du personnage principal et l'on se dit que dans les mêmes conditions, on aurait fait la même chose. L'empathie fonctionne à plein régime et l'on passe par tous les états car le malheureux subit un nombre incroyable d'épreuves avant la fin du livre! Face à lui, des êtres de cauchemar sortis de l'imagination débridée de l'auteur le pourchassent: le lecteur se retrouve face à une galerie effrayante de sorciers dégénérés, d'êtres hybrides aussi mystérieux qu'étranges (un loup garou changeant de corps en même temps que de victime) et d'armées de gueux sorties des tréfonds de Londres. C'est à leur apparition que l'on lorgne avec les frontières de la fantasy et du fantastique. On tremble à de nombreuses reprises et je dois l'avouer, c'est plutôt rare de ressentir cela en lisant (hormis assez régulièrement dans le genre polar).
Autre point positif, la façon dont l'auteur a éludé les explications liées aux voyages dans le temps. Il n'aborde jamais de front le problème, se contentant d'évoquer des failles existantes qui auraient été créées par un sorcier dément (mention spéciale au Dr Romany, belle figure du mal dans le livre). En fait, il me semble que Tim Powers privilégie sciemment le côté "aventure" du récit (certains vont jusqu'à parler de roman picaresque) ce qui lui donne un rythme endiablé, un peu comme quand on regarde un bon vieil Indiana Jones.
Pour autant, comme je vous le disais plus haut, cette œuvre n'est pas impérissable à mes yeux. Je ne ressentais pas un besoin irrépressible de revenir vers ce livre, l'addiction n'est jamais venue! Il y a même eu de grands moments de lassitude et d'ennui, la faute essentiellement à une écriture certes maîtrisée et évocatrice en diable mais que j'ai trouvé sclérosée et trop souvent ampoulée. Du coup, un sentiment de malaise m'a envahi peu à peu: c'est censé être un chef d'oeuvre mais je n'accroche pas! J'ai aussi été rarement surpris et je pouvais quasiment prédire ce qui allait arriver par la suite. Dommage vraiment car à la base tout était réuni pour que cette lecture soit bonne et enrichissante: SF, voyages dans le temps et XIXème siècle littéraire (références nombreuses aux grands poètes anglais dont mon chouchou, Byron).
Au final, un bilan mi-figue mi-raisin. À chacun de se faire sa propre opinion vu les qualités certaines de ce livre mais aussi quelques défauts qui peuvent se révéler rédhibitoires. À vous de tenter l'expérience!
"Les huit jours du Diable" de Didier Convard
L'histoire: Le monde ne s'est pas défait en un jour...
Yahvé Dieu créa le monde en six jours: le septième, il se reposa.
Il a fallu au Diable huit jours pour le détruire, ou le faire détruire. De l'engloutissement de la civilisation des Atlantes à l'apocalypse atomique, en passant par la damnation de Sodome et Gomorrhe et les diaboliques "miracles" du Moyen Age, à huit reprises le Diable a guidé la main de l'homme.
Par huit fois, le Diable s'est amusé à nos dépens.
Le jour de l'Atlantide.
Le jour de la grande colère.
Le jour du Diable.
Le jour de la Pentecôte.
Le jour des korrigans.
Le jour de la vengeance.
Le jour du mirage.
Et puis, le Diable vit que cela était mauvais.
Il y eut un soir, il y eut un matin:
le jour du dernier homme.
La critique de Mr K: Retour dans les eighties avec cette œuvre de Didier Convard datant de 1983. Parti d'un projet qu'on lui avait soumis sur les villes disparues, il l'a fusionné avec une réflexion plus vaste sur le tentateur, le malin, bref... le Diable!L'entrée en la matière est un texte de l'auteur d'une cinquantaine de lignes qui nous plonge dans le bain directement, pas de quartier, le Mal étant le Mal, on s'apprête à pénétrer dans 8 récits courts et abrupts mettant en scène directement ou symboliquement le seigneur des mouches et surtout, la plus manipulable des créatures: l'homme!
Le jour de L'Atlantide est une variation intéressante autour du mythe de ce continent englouti quelque part dans l'océan. L'auteur y introduit un élément SF en faisant de cette terre dorée l'enjeu de tractations inter-galactiques! Vous connaissez tous la fin mais l'approche originale de l'auteur fait mouche et ce premier récit est une réussite. Le jour de la grande colère reprend le même principe avec le mythe de Sodome et Gomorrhe. J'ai trouvé cette version un peu tirée par les cheveux et un peu bâclée... et surtout très très sage! Même dans la Bible, la damnation des deux cités de la perversion est plus rock and roll! Passons...
Le jour du Diable est plus classique avec la légende de la ville d'Is, de Gradlon, Dahut sa fille et le Diable en personne! Soyons clairs, ce n'est pas la meilleure version que j'ai eu entre les mains, Dahut est ratée (elle doit être ensorcelante, ici c'est une guerrière casquée type quartier du Marais à Paris) et franchement, autant lire la légende originelle ou la variation intéressante décrite dans la série des Druides. Je sais, je n'en sors pas en ce moment... Le jour de la Pentecôte rehausse d'un coup le niveau avec une variation bretonne (eh oui!) d'Aladin et la lampe merveilleuse avec un jeune garçon cherchant fortune dans une caverne merveilleuse. Malheureusement le tentateur guide ses pas et il finira par chuter! Bien mené, assez court, ce récit est une vraie réussite!
Le jour des korrigans est un ovni parmi tous les autres récits. Je n'ai pas vu le rapport avec la choucroute (pardon, le diable et les cités enfouies...). Reste un récit sympathique où des géants se prennent une raclée monumentale par des korrigans et rien que ça c'est un événement à ne pas louper; gentillet mais sympathique, j'ai beaucoup souri à sa lecture mais dans le bon sens du terme. Le jour de la vengeance est cette fois-ci une variation autour du mythe de Faust. Un seigneur cupide veut mettre la main sur les terres des moines du secteur, il fait appel à trois démons pour l'aider. Ils vont l'assister mais pas dans le sens qu'il croyait... Pas original pour un sou, ce récit se suit néanmoins avec plaisir jusqu'à ce que l'arroseur soit arrosé.
Le jour du mirage a pour cadre l'Arabie mystérieuse. Un roi puissant s'aveugle à vouloir construire la cité de ses rêves. A force d'injustices et de cruauté, le rêve s'évanouira mais pas seul. Une belle réussite pour une belle réflexion sur le pouvoir et ses chimères. Le jour du dernier homme clôt ce recueil et de quelle manière! Un jeune homme à la mise moyen-âgeuse parti en quête d'on ne sait quoi va découvrir que l'humanité est quasiment éteinte suite à un holocauste nucléaire et que les chats ont muté pour prendre possession de la terre. Un récit tout bonnement génial: bon OK, j'adore les chats et ça nous change des singes!
Il y a donc de tout dans ce recueil et je pense que chacun y trouvera quelque chose qui le contentera. Certes, il n'est pas parfait, les dessins sont marqués par le temps mais pour les amateurs de BD vintage comme moi c'est tout bon! Les huit jours du Diable malgré des défauts est très attachante et trouvera une place de choix dans la bédéthèque du Capharnaüm Éclairé.
"Le fond de l'enfer" d'Ian Rankin
L'histoire: Un junkie retrouvé mort dans un squat d'Édimbourg, juste un cadavre dont le corps a été placé sur le sol selon un étrange rituel. Une jeune fugueuse terrifiée qui pense que son ami a été assassiné.
Mais tout le monde s'en moque. Ce sont les déchets de la société, des drogués et des petits délinquants. Mieux vaut s'intéresser aux nouvelles entreprises en plein essor et aux lotissements flambants neufs qui vont apporter la prospérité à une ville qui se vante déjà de sa "qualité de vie".
Il n'y a guère que l'inspecteur Rebus pour s'en préoccuper, sentir quelque chose de trop malsain, de trop dangereux pour être laissé dans l'ombre... Quelque chose qui n'est peut-être pas sans lien avec le monde merveilleux que promettent promoteurs et publicistes...
la critique de Mr K: J'avais été enchanté par mon premier séjour livresque dans l'univers de l'inspecteur Rébus et d'Ian Rankin: Nom de code: Witch. Puis le temps a passé, les livres se sont accumulés dans ma PAL (ô malédiction du lecteur!) et c'est seulement deux ans et quelques après ce premier contact que je replonge... Mais quelle immersion et quel plaisir!
L'action se déroule à Édimbourg, Écosse. Dès les premières pages, le décor est planté: l'Écosse c'est gris, ça boit, ça se traîne et l'ambiance n'est pas des plus joviales. Au milieu de ce charmant tableau, un cadavre de junkie qui gène pas mal de monde et du beau linge en plus! Flairant l'entourloupe, l'inspecteur Rebus se met en chasse pour essayer d'abord de comprendre le pourquoi de cette overdose instrumentalisée puis trouver les responsables. Tout au long des 300 pages que compte cet ouvrage, on va suivre les errances de cet inspecteur peu commun entre lieux du crime et pubs enfiévrés peuplés d'habitués hauts en couleur.
Aaaah, Rebus! Il est de la race des Adamsberg et des Bosch, un gars meurtris par la vie possédant un haut sens de la justice mais qui aime à se laisser aller quand son âme se teinte de gris. Dans Le Fond de l'Enfer, il s'est fait larguer par sa compagne et ne s'en est jamais vraiment remis. Son chef nouvellement nommé l'indiffère (pour rester poli) et la routine le guette. Sa route va rencontrer celle de Tracy, jeune paumée liée au défunt. Cette boule d'énergie désespérée va lui permettre de se remettre en selle et finalement de se sentir utile. Cet inspecteur est vraiment très attachant car oscillant constamment entre le râleur invétéré, le pygmalion motivant pour ces jeunes troupes (constable in english) et l'être sensible au fond du gouffre.
L'enquête est intense et nous suivons les moindres pistes explorées par Rebus et ses acolytes. Les rebondissements sont nombreux et la fin est implacable à sa manière car même si l'énigme est résolue, la justice n'est pas forcément rendue. On est donc loin du happy end et clairement, on se situe dans le genre du polar bien poisseux où toutes les vérités ne sont pas forcément bonnes à dire et où les apparences sont trompeuses. Avis aux amateurs de polar et policier, Ian Rankin est vraiment très doué et il serait bien dommage de passer à côté!
"Memories of Sand" de Frezzato
L'histoire: J'ai toujours pensé que les pierres abritaient une mémoire et pas que géologique.
Il y a quelques années, j'ai fait un rêve dont je dessinai la partie la plus banale...
J'étais adulte, je voyageais seul et j'avais déjà tout vu. J'arrivai à l'endroit où il y avait un homme dont seule la tête émergeait du sable, les vagues submergeaient régulièrement son visage, mais il ne semblait ni souffrir, ni suffoquer. Il avait mon visage et il me dit: laisse tomber tes petits jeux et viens écouter la légende du sable...
La critique Nelfesque: Je ne connaissais pas Frezzato, dessinateur et scénariste italien, mais une chose est sûre, après avoir lu "Memories of Sand", je vais me pencher plus avidement sur ses précédentes publications.
Je dis que j'ai "lu" "Memories of Sand" mais je devrais plutôt dire que je l'ai admiré et ressenti. Ce n'est pas une bande dessinée à proprement parlé puisqu'ici il n'y a aucun texte et aucune dialogue. Tout se passe dans les yeux des personnages et la beauté des dessins de Frezzato. On se laisse porter par les couleurs vives et le caractère nostalgique qui ressort des quatre histoires contenues dans ce recueil au format à l'italienne qui s'apparente plus à un beau livre qu'à une BD.
"La Rose" tout d'abord montre la chute au sens propre d'un homme, venant d'on ne sait où et se dirigeant vers une destination inconnue. Au long de sa chute, il passe différentes matières, pense s'écraser puis passe à travers et continue de chuter. Il se dégage de cette histoire quelque chose d'angoissant jusqu'à ce qu'il se transforme en phoenix et se mette à voler. Là il aperçoit au loin un ballon coloré sur lequel est allongée une jeune femme complètement nue ayant une rose en lieu et place du sexe. Il va alors perdre la tête et se diriger vers cet antre sacré la bave aux lèvres. Il y a un côté grivois à cette histoire que l'on ne retrouvera pas dans les autres et qui nous fera sourire sur plusieurs cases. Cette destination est-elle le but à atteindre? Qu'y a-t-il dans cette rose? Ca vous le saurez en le lisant!
On retrouve cet homme (qui a cessé de chuter) dans l'histoire suivante: "La Clef". Mon coeur penche pour cette histoire ci et son côté nostalgique. Métaphysique, allégorique, elle est presque une parabole sur l'amour, l'incompréhension et la peur de l'inconnu. Elle peut être lu de différentes façons, peut être que certains n'y verront rien de spécial mais c'est elle qui a su le plus me toucher. Il est difficile d'en raconter l'histoire dans les détails tant elle est imagée.
La suivante, "Le Parapluie" diffère complètement dans son traitement de ses 3 autres compagnes. Le procédé de dessin, la colorisation et les cases tranchent dans ce recueil. Un homme monocycle (toujours le même) pénètre dans une grotte au fond de laquelle, après avoir bravé les éléments, il découvre une jeune fille à la source même des évènements se déchainant. Fragile et perdue, à la fois victime et maitresse de ses pouvoirs, il va tout faire pour la sauver d'elle-même et la sortir de cette grotte. Encore une fois, l'histoire a un fond philosophique et éprouvant mais, de part le personnage du petit asticot cyclope, Frezzato a su dédramatiser l'ensemble et faire sourire le lecteur.
Enfin, la très courte dernière histoire de cet ouvrage, "Le petit cochon", montre la cruauté des hommes à préparer à la chaine des cochons grillés. Frezzato serait-il végétarien? En tout cas son héroïne oui puisqu'elle n'hésite pas à faire sauter sans remords l'usine en question.
Entre fantasy et science-fiction, avec des machines/robots, des situations clairement SF, des créatures improbables et un fond philosophique, Frezzato nous propose, avec "Memories of Sand", un ouvrage hors du commun qui nous émeut et nous réconforte. D'une beauté saisissante et d'un lyrisme touchant, il nous parle d'amour de la plus belle façon qu'il soit. Un seul bémol à ce très bel ensemble: un goût de trop peu...