"Cléo" de Fred Bernard
L'histoire: Je ne suis pas la plus belle
mais pas mal quand même,
je ne suis pas sotte
mais je dis des bêtises,
je ne suis pas folle
mais je dis des sottises,
je n'ai pas trente ans
et je suis une reine.
En amour,
j'ai l'impression d'avoir fait le tour,
mais je cherche mon roi.
Je suis une fille comme les autres ?
Peut-être...
La critique Nelfesque: J'aime bien la 4ème de couverture de cette BD. Ca me rappelle une chanson de Jeanne Cherhal, "Je suis liquide". Toute la contradiction des femmes se tient dans ces quelques phrases. Ces mots et la couverture kitsch m'ont donné envie de découvrir cette oeuvre.
Je m'attendais à découvrir la vie d'une quasi-trentenaire. Une vie décalée, voilà ce que laissait entendre le synopsis. Finalement, c'est à la vie sexuelle de Cléo essentiellement que nous avons affaire et la BD est très branchée cul. J'utilise sciemment le terme "cul" car l'auteur ne fait pas macher ses mots à son héroïne. Les partouzes, elle connait, la branlette aussi, se taper plusieurs mecs dans une même soirée ne lui fait pas peur. Nous voici donc pris dans le récit de ses histoires de fesse qui nous sont livrés sans retenue. Cléo est souvent à poil, elle se balade toute nue, tout le temps (non pas dans la rue quand même!): on voit en détail son passage à la douche, elle danse toute nue dans son appartement... Fred Bernard met à nue Cléo pour nous raconter sa vie sentimentale de femme de bientôt 30 ans, qui peine à trouver l'amour et qui a du mal à se faire à l'idée qu'elle va passer la barre fatidique des 30. Cette fameuse barre où tu es censé avoir trouvé l'homme de ta vie, t'être marié et avoir des enfants. Dur pour une fille qui peine à grandir...
Niveau dessin, je suis assez mitigée. Autant je trouve superbes les dessins pleine page au graphisme travaillé, aux ombrages subtiles où transparait la poésie de l'auteur et la fragilité de Cléo, autant je n'ai pas totalement adhéré aux dessins "casés", moins fournis. Certains passages sont toutefois de toute beauté quand l'auteur part dans des trips poétiques et fait flotter son personnage dans l'air.
Au fil des pages on se rend compte que son malaise est plus profond. Ce n'est pas seulement une histoire de fesse qui mine le moral de Cléo mais une difficulté à vivre conformément à des règles préétablies par la morale judéo-chrétien. Les rapports qu'elle entretient avec ses parents, amoureux de l'Egypte et vivant Egypte tous les jours, représentés eux même en Horus et Thot, sont très bien rendus. On sent là toute la complexité de leur relation et la difficulté de communiquer avec Cléo, plutôt attirée par le Japon.
Finalement, "Cléo" est une BD assez complexe au niveau des sentiments qui se lit avec plaisir autant pour l'évolution du personnage et ses réflexions personnelles que pour la poésie de certains dessins.