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Le Capharnaüm Éclairé
26 février 2008

La République entâchée, les médias complices

sarko

Du vitriol dans l'eau de rose

Cela devait arriver: quand on taquine la ligne blanche à chaque virage, la sortie de route n'est pas loin. La publication par le site du Nouvel Observateur d'un SMS très privé qu'aurait adressé Sarkozy à Cécilia son ex, n'est que l'aboutissement logique de plusieurs mois de contrôlages plus ou moins contrôlés. Cécilia s'en va, Cécilia revient. Les amoureux sont en Égypte, les amoureux sont fâchés. Une journaliste arrive, Une présentatrice de télé s'en va. Le divorce est dans l'air, le divorce est consommé. Un mannequin vedette apparaît, les amoureux (pas les mêmes) sont en Égypte. Le mariage est dans l'air. Le mariage est célébré.

Ces événements considérables ont nourri, jusqu'à l'indigestion, tous les journaux, et pas seulement les pipoles. Qu'est-il arrivé à la presse française connue pour sa retenue en matière d'information sur la vie privée des politiques?

D'abord, Sarkozy a été le premier metteur en scène de ce médiocre feuilleton. Il s'est lui même exposé, dans tous les sens du terme, avec son épouse, ses enfants, sa maîtresse. La quasi totalité des photos de scènes d'intimité ont été au minimum autorisées, parfois organisées et scénarisées. Dernier exemple, les photos du mariage avec Carla Bruni, publiées la semaine dernière dans "Paris Match". Qui peut croire que ces clichés un peu flous et à demi masqués par les feuillages ont été volés? Il suffit d'imaginer que le téléobjectif aurait pu être remplacé par un fusil à lunette. Si le photographe perché sur un arbre était vraimnt clandestin, le chef de la sécurité de l'Élysée serait déjà muté à la circulation. Il ne l'a pas été...

La presse a docilement suivi les péripéties, transformant l'Élysée en une annexe du rocher de Monaco. Bien sûr, les tirages y ont trouvé leur compte. Mais était-il possible de rester intransigeant sur les principes, et de résister à la dérive? En réalité, quelques séquences "vie privée" ont éclairé d'une lumière crue la psychologie, le caractère, et parfois les fragilités du chef de l'État. Ce sont là des informations politiques de première importance. Impossible de les ignorer. Alors, jusqu'où aller trop loin? Tout le monde ayant peu ou prou les doigts dans la confiture, il n'est pas question de distribuer bons et mauvais points, encore moins de s'ériger en arbitre des usages journalistiques.

Il faut tout de même observer qu'un SMS est une correspondance privée. Décacheter à la vapeur des lettres d'amour n'est pas notre activité préférée. Et de quoi auront l'air les journalistes qui demain s'indigneront, à juste titre, d'une écoute téléphonique illégale ou d'un viol de leur correspondance?

Un coup d'arrêt, un signal rouge vient d'être donné. Mais il l'a été par celui qui était le moins qualifié pour le faire, le président de la République lui-même. Après avoir orchestré avec talent l'exposition de son intimité, Sarko a choisi la limite, sa limite. Stop, il ne joue plus. Il porte plainte. Metteur en scène, acteur, arbitre, n'est-ce pas un peu trop?

Louis-Marie Horeau, le Canard enchaîné n°4555

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